Comment recevoir l’amour de la Source, pour ensuite le donner gratuitement ?

« L’amour qui fait chanter les chanteurs et danser les amoureux est souvent confondu avec un sentiment. Le véritable amour est, quant à lui, bien plus que ce lien mystérieux qui unit deux personnes séduites l’une par l’autre on ne sait trop pourquoi. Il est une œuvre de liberté, et même la plus belle. Qu’est-il en effet sinon s’engager pour quelqu’un d’autre que soi ? Seule la liberté peut transformer le sentiment éphémère – précieux cependant – en un don de soi qui fait vivre l’autre. « Je ne suis pas amoureux de vous, je vous aime », lance Eric-Emmanuel Schmitt. Le sentiment amoureux est une invasion, l’amour véritable, une décision.

Amour et liberté, c’est tout un ! Pourquoi est-on libre sinon pour aimer et qu’est-ce qui rend libre sinon l’amour ? Quand la liberté n’est mesurée par rien d’autre qu’elle-même, elle devient folle. Amour et liberté séparés l’un de l’autre sont deux mots bien ambigus. La liberté peut être réduite à un refus de toute limite, un oubli du réel. Je m’envole dans mon petit univers privé, je fais comme je le sens. Et l’amour peut ne consister qu’à écouter mon cœur qui bat la chamade. Or, la liberté et le véritable amour sont tournés vers l’autre, sans que celui-ci ait toujours besoin de le mériter.

Il faut être assez libre pour continuer à aimer, même quand cela fait mal. Dans son récent livre, Consolation, Anne-Dauphine Julliand, l’auteur de Deux petits pas sur le sable mouillé, rapporte que Gaspard, son fils aîné lui demanda ce qui faisait le plus mal dans la vie. Et lui-même répondit : « Je crois que c’est l’amour. L’amour, ça fait toujours mal un jour  » (p. 20). On reconnaît quelqu’un qui n’a jamais aimé au fait qu’il se débine chaque fois qu’il faut souffrir, disait un psychanalyste. L’amour dans toute sa pureté commence quand je donne à l’autre la permission de me déranger, quand je rencontre sa tristesse, sa peur ou sa douleur et que j’ai envie de le consoler. Aimer c’est répondre à l’appel de l’autre qui a besoin d’être aimé pour vivre. Jésus ira même jusqu’à parler de l’amour des ennemis. « Donner pour recevoir, c’est jeu d’enfant, écrit Rainer-Maria Rilke. Donner et recevoir à égalité, c’est grisant. Mais quand vient l’heure de donner sans recevoir, et même de recevoir du mal, et de rendre du bien, là se trempe l’Amour de l’autre. »

Aimer ses ennemis, leur pardonner, c’est le choix de ne pas répondre au mal par le mal ; c’est vouloir que l’autre vive alors que, s’il est vraiment mon ennemi, il voudrait que je disparaisse. Dans le couple lui-même, on peut en arriver à se comporter, d’une manière ou d’une autre, en ennemis. « Aime-moi lorsque je le mérite le moins, car c’est alors que j’en ai le plus besoin », dit un proverbe chinois. L’amour est un exercice de liberté toujours à reprendre ! » (Charles Delhez, s.j., L’amour et la liberté : https://www.cathobel.be/2021/02/lamour-et-la-liberte/).