Vie grille-pain tremplin

« J’aime que l’on entende quelque chose qui n’est pas forcément écrit : deux mots peuvent donner un autre mot, ou même un seul mot peut avoir plusieurs significations. J’aime bien le fait que lorsqu’on entend quelque chose, ce n’est pas forcément ce qui est écrit, ou quand on lit quelque chose, ce n’est pas forcément l’idée première de la phrase », nous partage Florentin Fouch, qui se présente comme un « obsédé textuel », notant dans son carnet toujours à portée de main les jeux de mots que font jaillir les interactions du quotidien. 

Quand la forme fertilise le fond, le flow fluide de la phrase féconde
l’éclosion des émotions. Mots fléchés, jets d’émoi, jeux de moi et toi ?

Le carême pas par obligation mais poussés du dedans

Bon ramadan, sœurs et frères musulmans.
Bon carême, sœurs et frères chrétiens.

Je nous souhaite de vivre le carême non par obligation ni par plaisir, mais poussés du dedans, comme un appel à nous recentrer sur l’essentiel. Je nous souhaite de plonger dans le dépouillement du carême par une motion intérieure, une décision libre et autonome, comme celle de Jésus quand il s’exclame : « Ma vie, nul ne la prend, je la donne ». Et quelle surprise quand elle lui sera redonnée plus encore !

J’ai envie de vivre le carême car j’ai envie d’être en mesure de suivre quelque peu la plongée de Jésus dans le dépouillement extrême, dans cette Pâque-passage où tout semble perdu, où Plus encore est finalement donné.

Cadeaux de l’imagination s’envolant grâce à la lecture

Dans une lecture, je crée mon propre film. C’est encore mieux qu’au cinéma ! Je m’arrête de lire dès que mon imagination déploie ses ailes. À tout moment, je peux m’envoler au milieu des échos du texte en moi. Comme elles sont bienfaisantes, ces envolées qui scandent la lecture… Dans les silences du texte, mon esprit, mon cœur et mon âme se mettent à respirer en propre, chacun à son rythme, comme le nouveau-né qui se passe du cordon ombilical.

Guérir

Aller jusqu’au bout de la guérison de mes blessures, de mes patterns-ornières, sous peine que la Vie me renvoie les mêmes plats, tant que je n’aurai pas débloqué en moi, guéri et réconcilié ce qui doit l’être. La vie nous convie à ce chemin, à ce retour vers la plénitude-complétude, vers l’intégrité-intégralité personnelle. Les épreuves sont des invitations à grandir, à sortir de nos programmes de survie archaïques, à créer des harmoniques nouvelles autour de nos invariants, telles que nos ornières deviennent peu à peu des sillons d’ensemencement vers de nouveaux champs féconds !

Ravauder : raccommoder à l’aiguille.

Prendre au sérieux de ne pas se prendre au sérieux

« S’il te plait, appelle-moi par mes vrais noms
Ne dis pas que je partirai demain,
car je nais aujourd’hui encore.
Regarde profondément : je nais à chaque seconde.
Je suis un bourgeon sur une branche au printemps.
Je suis un petit oiseau aux ailes encore fragiles
qui apprend à chanter dans son nouveau nid.
Je suis une chenille au cœur d’une fleur.
Je suis un joyau caché dans la roche.
Je ne cesse de naître, pour rire et pour pleurer,
pour craindre et espérer.
Le rythme de mon cœur, c’est la naissance
et la mort de tous les êtres en vie.
Je suis l’éphémère se métamorphosant à la surface de la rivière
et je suis l’oiseau qui, quand le printemps arrive,
naît juste à temps pour manger l’éphémère.
Je suis la grenouille qui nage heureuse dans l’étang clair
et je suis l’orvet qui, approchant en silence,
se nourrit de la grenouille.
[…]
Ma joie est comme le printemps,
si chaude qu’elle fait fleurir les fleurs
sur tous les chemins de la vie.
Ma souffrance est comme une rivière de larmes,
si pleine qu’elle remplit les quatre océans.
S’il vous plaît, appelez-moi par mes vrais noms,
que j’entende ensemble mes cris et mes rires,
que je voie ma joie mais aussi mes peines.
S’il vous plaît, appelez-moi par mes vrais noms
pour que je puisse me réveiller
et pour que reste ouverte la porte de mon cœur,
la porte de la compassion… »
(Thich Nhat Hanh, moine bouddhiste décédé le 22/1/22).

Qui joue avec moi ?

« J’avais l’habitude de penser que j’étais la personne la plus bizarre au monde… Et puis je me suis dit : il y a beaucoup de personnes bizarres dans le monde, alors il doit bien y avoir quelqu’un comme moi, qui se sent étrange et meurtrie comme moi… Je me l’imagine et j’imagine qu’elle aussi doit être en train de penser à moi… Si tu existes et que tu me lis, sache que, oui, j’existe et que je suis aussi étrange que toi, …à créer mon propre paradis, en puisant dans mon enfer personnel… » (Frida Khalo).

Pendu perdu retrouvé

« Je suis très touché par un chapiteau médiéval qui se trouve dans la Basilique Sainte Marie-Madeleine à Vézelay, en France, où commence le Chemin de Saint-Jacques de Compostelle. Sur ce chapiteau, d’un côté il y a Judas pendu, les yeux ouverts, la langue dehors, et de l’autre il y a le Bon Pasteur qui l’emmène avec lui. Et si nous regardons bien, attentivement, le visage du Bon Pasteur, les lèvres d’un côté sont tristes, mais de l’autre côté elles arborent un sourire » (Pape François).

Hommage à ma différence

« Aujourd’hui, je veux rendre hommage à ma différence. Précisément à cette partie de moi si loin des autres.

À cet ennui qui vient quand tout le monde applaudit. À ce sentiment de ne pas être à ma place. À mes cellules rebelles et révolutionnaires, vraies.

Être différent est un signe d’authenticité. C’est ainsi qu’on découvre artistes, poètes, pèlerins de l’âme : par leurs diversités dont ils ne peuvent se passer. C’est le rythme de leur cœur. Un rythme souvent incompréhensible à l’entour.

Ce battement les conduit à des actions étranges, des pensées variantes, des vies mouvementées mais harmoniques, selon leurs propres lois intérieures…

Quant à moi, les masses m’effraient, m’immobilisent, m’assoupissent. Je préfère les bizarres, les fous, les sauvages de l’esprit. Ceux qui parviennent à s’écouter malgré tout le bruit du monde. Vivent ceux qui ne se laissent pas distraire, ceux qui continuent à marcher sur le chemin de leur âme, malgré les blessures, les chaînes qui retiennent, les voix qui envoûtent. Les victorieux sont ceux qui n’éteignent pas leur voix intérieure » (Elena Bernabè).

‘Oom’ en Afrique du Sud est un mot employé pour saluer un homme âgé, avec respect et affection.

‘Difé’ = du feu, dans plusieurs créoles des îles. 

Conformité calamiteuse

« Si je diffère de toi, loin de te léser, je t’augmente »
(Saint Exupéry, Lettre à un otage).

« La confiance en soi libère de la conformité » (Emerson, Self-Reliance).

La conformité est la mort de l’âme.

Copie formée,
Copie qu’on forme,
Copie fermée,
Copie conforme,
Il y a dans ces conformités,
Peu de réformes.
Choses ordinaires,
Choses qui dorment,
Qui enferment,
Ou qui ronronnent,
Il y a dans ces termes,
Peu de réformes.
Opinion majoritaire,
Opinion con-forme,
Auquel on adhère,
Ou qu’on nous forme,
Il y a dans ces filières
Peu de réformes.
Pensées inconscientes,
Pensées sans causes,
Sciences sans conscience,
Ou sous hypnose,
Il y a dans ces fréquences
Peu de réformes.
Au delà de nos coutumes
De nos croyances et religions,
Au regard de nos habitudes
Et de nos conventions,
N’y a t-il pas dans nos attitudes
Une forme involontaire d’exclusion?
Face à cette lignée de conformité,
Académique, traditionaliste,
Conservatrice ou éprise de normalité,
Ne faudrait-il pas lâcher prise
Et prendre conscience de nos excès
Pour mieux lutter contre le conformisme ?
         (Jean-Stéphane Bozzo, Conformisme).

Tabou levé

Est-il tabou de toucher au mot tabou ? C’est en tous les cas un des rares mots qui signifient la même chose dans toutes les langues. What about tabou (anagrammes !) ? C’est un mot polynésien qui désigne les interdits sacrés. Le terme est parvenu à l’ensemble des humains via les carnets de voyage du capitaine Cook : sous l’influence des missionnaires chrétiens, la reine Elizabeth Kaahumanu a eu le courage, à la mort de son époux, en 1819, de lever le tabou interdisant les femmes de manger avec les hommes lors d’un banquet. Sa manière à elle d’honorer la mémoire de son époux sans laids poux !