Injustices cachées sous le sol, violences institutionnelles, structurelles

Le reportage « Kongo, cœur noir, hommes blancs » commente les relations Noirs / Blancs avant l’Indépendance du 30 juin 1960 : « Les meilleurs des Noirs, aux yeux des Belges, sont ceux qui cherchent à leur ressembler. On les appelle les évolués. Les plus évolués des évolués peuvent même recevoir une carte d’immatriculation. Mais il leur faut, pour cela, faire patte blanche, montrer qu’ils mangent et boivent comme les Blancs, qu’ils vivent comme les Blancs, qu’ils pensent comme les Blancs. Apparemment, la preuve est difficile à fournir. À la veille de l’Indépendance, ils seront 217 immatriculés à y être parvenus. »

François Ryckmans, interviewé dans l’émission « La semaine du monde » sur la radio « La Première », ce 28 juin 2020, conclut ainsi : « Je suis frappé par la continuité des régimes. L’État colonial, basé sur l’exploitation, est d’une certaine manière un État-prédateur et cet État-prédateur a continué avec des présidents congolais… Les gens me partagent : « Les Belges sont partis et on a eu de nouveaux prédateurs, qui étaient des Congolais comme nous » » et évolués comme eux…

« Les violences dites « institutionnelles » ou « structurelles » tuent et asservissent avec beaucoup plus d’efficacité que les coups directement assenés. Quand un mari bat sa femme –affirme Johan Galtung–, c’est un cas clair de violence personnelle (directe). Quand un million de maris maintiennent un million de femmes dans l’ignorance, il y a violence structurelle, même si personne ne hurle de douleur. De même, dans une société où l’espérance de vie est deux fois plus élevée dans la classe supérieure que dans les couches inférieures, il y a violence, même s’il n’y a pas d’hommes concrets à qui l’on puisse reprocher d’attaquer directement les autres, comme quand un frère tue son frère. De même, si une personne meurt de tuberculose au XVIIIe siècle, on ne peut pas dire que violence lui est faite ; mais aujourd’hui il y a violence structurelle si les moyens actuellement possibles pour enrayer la tuberculose ne sont pas effectivement employés dans tel bidonville, dans tel pays sous-développé. […] La violence est incorporée (built into) dans la structure et se manifeste par des différences de pouvoirs et donc des différences de chances de vie. […] Il y a violence dès que des êtres humains sont influencés de manière telle que leur accomplissement somatique ou mental est inférieur à leur accomplissement potentiel. » Galtung définit donc la violence structurelle comme « quelque chose d’évitable qui fait obstacle à l’épanouissement de l’être humain », « la cause de la différence entre ce qui pourrait être et ce qui est ». « Est violence tout ce qui accroît la distance entre l’actuellement possible et l’actuellement réalisé (ou qui empêche la distance de diminuer) » (Chomé Étienne, Le nouveau paradigme de non-violence, 2017, p. 25, reprenant Galtung Johan, Violence, peace and peace research, dans Journal of Peace Research, n° 3, Oslo, 1969, p. 167 & 171).

Agressivité venant d’un vécu douloureux : manière de dire < > Agressivité tactique pour obtenir : manière d’obtenir

La méthode C-R-I-T-E-R-E, troisième étape : distinguer violences-manières-de-dire et violences-manières-d’obtenir

« À partir des bassesses dont il a été témoin, Louis de Funès invente son personnage de petit chef : dur avec les faibles et minable avec les puissants. « J’adore les faux-jetons. Comme personnage, je crois que ce sont les plus comiques, ceux-là. Il n’y a pas à bouger, à faire des grimaces, ni à sauter par-delà une haie. Il y a des énormes volumes, là ! […] À son insu, ma mère fut mon professeur de comédie : elle avait de ces colères mais souvent des colères feintes ; moi, je restais de marbre. C’est par elle que j’ai trouvé mon personnage de faux-jeton, un personnage truculent, très drôle, très amusant. » […] Quand on s’énerve et qu’on trépigne, c’est d’abord la preuve qu’on est vivant » (interviews dans les archives de l’INA, commentées par Lucie Cariès dans « La folle aventure de Louis de Funès »).

Nos colères contiennent, pour une part, une manière tragique d’exprimer notre frustration et notre besoin de vivre ; d’autre part une stratégie pour obtenir quelque chose. Pour se calmer, la colère-manière-de-dire a besoin de recevoir de l’empathie et de la considération du besoin en souffrance, tandis que la colère-manière-d’obtenir tombe à plat pour peu que sa proie n’est pas dupe du tour de passe-passe. Ces deux dimensions de colère se soignent avec des remèdes radicalement différents ; d’où l’importance de les démêler !

Plus d’explications à l’étape 3 de mon parcours de formation et dans mon livre La méthode C-R-I-T-E-R-E pour mieux gérer nos conflits, Presses universitaires de Louvain, 2009, p. 113 à 129 (qui distingue une troisième dimension : la saine colère contre l’injustice).

Syntonie musculaire : « la libération du ressenti par le dialogue tonico-émotionnel »

La syntonie musculaire est la clé de la formation de « la libération du ressenti par le dialogue tonico-émotionnel » du Dr Jean Lerminiaux, neuropsychiatre, 89 ans, naïf / natif à souhait ! Il est passionné par l’étude du tonus musculaire et de la relation tonico-émotionnelle comme base d’une thérapie, notamment à partir d’une lecture corporelle minutieuse.

Je vous recommande vivement sa formation, ancrée dans le meilleur des découvertes en neurosciences : durant 6 week-ends de trois jours (à Bruxelles), des exercices et des mises en situation conduisent chaque participant à développer ses propres capacités d’observation et d’écoute de son ressenti, jusqu’à rencontrer ses propres blocages…

Site web : http://www.sfp-asbl.com.

E-mail : jlsecretariat@gmail.com.

IFS (Internal Family System), dialogue intérieur à partir de notre « Self »

« Fondateur de l’IFS (Internal Family System), Richard Schwarz  propose un protocole de dialogue intérieur à partir de notre « Self », qu’il définit comme cet espace intègre, intact, qui n’a pas été blessé par la vie et où règne le calme, la confiance, la compassion, la curiosité, la créativité, le courage, la clarté, la capacité à entrer en contact. De ce lieu-source en nous, nous pouvons apprendre à pratiquer la culture d’hospitalité pour chaque part de nous, déployer un authentique dialogue avec elle, l’écouter, prendre en considération ce qu’elle nous dit de son vécu, de son besoin, de ses motivations, de son intention positive » (Chomé Étienne, Construire la paix sociale à partir d’un dialogue intérieur non-violent, dans Ensemble, construire l’interculturel, CEAFRI – L’Harmattan, 2019, p. 115).

AND autority AND comprehension without any autoritarism or permissiveness

June 2th 2020 : Donald Trump threatens to send the army to « dominate the streets ».

Reaction of the demonstrators: « He wants to dominate us but he will never be able to dominate us ».

The project consisting in dominating someone (take power on / pressure over) brings about costs, falls into traps, leads to deadlock. The C-R-I-T-E-R-E method teaches the right attitude that articulates the plans to 1) understand the people on the street (the power to be with them) and 2) guarantee justice (the power to respect the common good).

Leaving the false dilemma between hawks and doves. Eliminating all gestures, all words like « power on / under the other » and deploy the powers « for / to » and « with ».

Cf. CHOMÉ Étienne, The C-R-I-T-E-R-E method for improved conflict management, PUL, p. 50 sq. & Le nouveau paradigme de non-violence, p. 149 sq.

The C-R-I-T-E-R-E method,  : AND autority AND comprehension without any autoritarism or passivity.

Les forces jugulant la violence sont d’une autre nature que celle-ci

Ma thèse de doctorat s’intéressa à l’émergence d’un nouveau paradigme : les forces efficientes à même de juguler durablement la violence destructrice sont d’une autre nature, d’un autre ordre que celle-ci. Ces forces non-violentes méritent, à ce titre, d’être qualifiées autrement que par la formule « violence légitime ». L’enjeu est bien plus profond que la terminologie. Il s’agit de connaître la nature de ces forces dites non-violentes et reconnaître leurs qualités, leurs caractéristiques, distinctes de la violence.

Parmi celles-ci, 1) les forces du droit, à même de mettre hors-la-loi les violences ; 2) les forces sociopolitiques, à même de gérer le conflit sans qu’il ne dérape en violence ; 3) les forces psychologiques et spirituelles, à même de créer une bonne relation entre les uns et les autres, par le respect de chacun.e dans sa dignité et dans sa vérité profonde.  

« Il faut s’arrêter, nous dit le général Jean-René Bachelet, à l’expression de « violence légitime« , introduite en son temps par Max Weber pour exprimer certaines capacités du pouvoir de l’État, dont les capacités militaires. Car j’ai l’outrecuidance de penser que l’expression, aujourd’hui curieusement admise sans discussion comme un lieu commun, doit être récusée, sauf à nous engager dans une impasse. En effet, la violence étant le plus communément définie comme « abus de la force », qui ne voit que l’idée de légitimité d’un abus comme prérogative d’État, outre qu’elle s’accommode mal du principe démocratique, porte en germe les déviances les plus funestes, au rang desquelles les « comportements barbares » que nous voulons précisément éradiquer ? De fait, la force que nous allons opposer à la violence, une force nécessaire dès lors qu’ont été épuisées toutes autres solutions face à l’inacceptable, ne saurait être elle-même violence, sauf à trahir les valeurs au nom desquelles son emploi est jugé nécessaire. Face à la violence déchaînée, la force est d’une nature différente » (Bachelet Jean-René, La formation des militaires à l’éthique dans le métier des armes, dans International Review of the Red Cross, n° 870, 2008, reprenant l’adresse qu’il prononça à l’ouverture de la Rencontre internationale sur le rôle des sanctions dans le renforcement du respect du droit international humanitaire, tenue à Genève, du 15 au 17 novembre 2007. Il a été général d’Armée ER et Inspecteur général des Forces Armées de la France.