J’ai ouvert la fenêtre pour humer l’ivresse d’être

Au bout d’un blanc chemin bordé par des prairies,
s’ouvre mon jardin odorant.
Descends parmi les fleurs, visite, je te prie,
le beau chalet de mes parents.

C’est dans cette attentive et studieuse chambre,
où les anges m’ont tout appris, […]
c’est là que j’ai connu, en ouvrant mes fenêtres
sur les orchestres du matin,
l’ivresse turbulente et monastique d’être
sûre d’un illustre destin.
C’est là que j’ai senti les rafales d’automne
m’entr’ouvrir le cœur à grands coups
pour y faire tenir ce qui souffre et frissonne :
c’est là que j’eus pitié de tout !
Tout me semblait amour, angélique promesse,
charité qui franchit la mort.
On persévère en soi bien longtemps : peut-être est-ce
ma façon de survivre encor !

La nuit, me soulevant d’un lit tiède et paisible,
m’accoudant au balcon, j’interrogeais les cieux,
et j’échangeais avec la nue inaccessible
le langage sacré du silence et des yeux
(Anna de Noailles, Les Forces éternelles, 1920, pp. 97-99 & 117).

Amazing réseaux sociaux des animaux

« On s’adresse à son animal avec toute l’affection dont on aimerait être soi-même l’objet. Comme si c’était le double de soi » (Didier Lauru, Revue Enfance et Psy, n° consacré à la relation entre l’enfant et l’animal, 2007).

Quand deux camarades éléphants ne se sont plus vu depuis longtemps, ils se mettent la trompe dans la bouche de l’autre.

Les pandas urinent pour laisser des messages à leurs camarades, en se dressant sur leurs pattes avant, tête en bas, afin d’uriner le plus haut possible, sur un arbre par exemple. Que fait le panda suivant ? Il se sus-panda à ses lèvres, tout joyeux de recevoir son message !?…

Amazing réseaux sociaux, n’est-ce pas ?

Du pain et des jeux : « tittytainment »

« Ces Romains si jaloux, si fiers qui jadis commandaient aux rois et aux nations et régnaient du Capitole aux deux bouts de la terre, esclaves maintenant de plaisirs corrupteurs, que leur faut-il ? Panem et circenses : du pain et les jeux du cirque » (Juvénal, Satire X). 19 siècles plus tard, en 1995, Zbigniew Brzezinski a parlé de la stratégie du « tittytainment », faisant un jeu de mots avec « tit » (sein), « titillate » (titiller) et « entertainment » (divertissement) : endormir le peuple par des divertissements abrutissants, dans le but de paralyser le sens critique et l’opposition politique. Voir Hans Peter Martin et Harald Schumann, Le Piège de la mondialisation. L’agression contre la démocratie et la prospérité.

Salvador Dali

Salvador Dali, Journal d’un génie :
Il vaut mieux péter pour tuer le temps,
que de médire, de faire des libelles ou de mauvais vers.

La peinture est la face visible de l’iceberg de ma pensée.

— Quel est votre secret pour avoir du succès ?
— Offrir du bon miel à la bonne mouche au bon moment et au bon endroit.

Je suis pratiquant, mais pas croyant.

Né original et y rester loyal

« Tous naissent comme des originaux,
mais beaucoup meurent comme des photocopies »
(Carlo Acutis, né le 3 mai 1991 à Londres,
mort le 12 octobre 2006 à Monza,
mort à 15 ans d’une leucémie,
reconnu comme le « cyber-apôtre » de l’Eucharistie,
déclaré bienheureux par l’Église catholique et fêté chaque 12 octobre).

Chateaux : chapeau ! Chat me plaît…

Le long du coteau courbe et des nobles vallées
Les châteaux sont semés comme des reposoirs,
Et dans la majesté des matins et des soirs
La Loire et ses vassaux s’en vont par ces allées.

Cent vingt châteaux lui font une suite courtoise,
Plus nombreux, plus nerveux, plus fins que des palais.
Ils ont nom Valençay, Saint-Aignan et Langeais,
Chenonceaux et Chambord, Azay, le Lude, Amboise.

Et moi j’en connais un dans les châteaux de Loire
Qui s’élève plus haut que le château de Blois,
Plus haut que la terrasse où les derniers Valois
Regardaient le soleil se coucher dans sa gloire.

La moulure est plus fine et l’arceau plus léger.
La dentelle de pierre est plus dure et plus grave.
La décence et l’honneur et la mort qui s’y grave
Ont inscrit leur histoire au cœur de ce verger.

Et c’est le souvenir qu’a laissé sur ces bords
Une enfant qui menait son cheval vers le fleuve.
Son âme était récente et sa cotte était neuve.
Innocente elle allait vers le plus grand des sorts.

Car celle qui venait du pays tourangeau,
C’était la même enfant qui quelques jours plus tard,
Gouvernant d’un seul mot le rustre et le soudard,
Descendait devers Meung ou montait vers Jargeau.

Charles Péguy, Châteaux de la Loire

C’est vendredi 13 août. À moi, Kigali’s routes

Toi qui pâlis au nom de Vancouver,
tu n’as pourtant fait qu’un banal voyage.
Tu n’as pas vu la Croix du Sud, le vert
des perroquets ni le soleil sauvage.

Tu t’embarquas à bord de maint steamers.
Nul sous-marin ne t’a voulu naufrage.
Sans grand éclat tu servis sous Stürmer,
pour déserter tu fus toujours trop sage.

Mais qu’il suffise à ton retour chagrin
d’avoir été ce soldat pérégrin
sur les trottoirs des villes inconnues,

Et, seul, un soir, dans un bar de Broadway,
d’avoir aimé les grâces Greenaway
d’une Allemande aux mains savamment nues

(Marcel Thiry, Toi qui pâlis au nom de Vancouver, 1924).