Je me suis tu et vous êtes venue
À pas menus, comme toujours
Vous faisiez semblant de n’être point là
Et pourtant, c’est vous, je vous ai reconnue,
Qui habitiez en moi
Vous êtes venue comme un agneau
Sans cri, sans écart et sans voix
Comme ce je-ne-sais-quoi qui fait que c’est vous
Ces pas sur le sable, sur le gravier
Sur les dalles des salles voûtées
Vous êtes venue comme une grande dame
Quand je ne songeais plus à vous
Quand ma mémoire, comme un aéroplane
Planait sur d’autres pays
Sur d’autres lits de fleuves asséchés
De déserts où les chameaux vont ventre à terre
J’avais même désespéré de vous revoir un jour jamais
Pourtant, je reconnais ce pas sur le pas de ma porte
Et ce je-ne-sais-quoi qui porte l’espérance si forte
Et j’ai tiré mon grand chapeau
Et dans mon cœur j’ai fait la révérence
Et, vous ne l’avez pas vu, j’ai tressailli de bonheur
Tout au fond, sans le savoir
Sans savoir pour qui ni en quel honneur
Vous êtes venue comme la bise qui passe sous la porte
Et pénètre dans la maison de l’hiver
Près du feu de bois, vous vous êtes réchauffée
Et j’ai reconnu cette voix et cet éclair dans vos yeux
Et ce je-ne-sais-quoi qui fait que c’est vous
Le vent, avec la mer
Avec tous les vents d’hiver
Tous se sont tus
Et vous êtes venue
À pas menus, comme toujours
Vous faisiez semblant de n’être point là
Et pourtant, c’est vous, je vous ai reconnue,
Qui habitiez en moi
Julos Beaucarne