La brebis égarée affolée

Il y a 33 ans, j’avais en charge un troupeau de brebis que je chérissais, en pleine brousse africaine (nous étions pile sur l’équateur). Et au moment de fermer l’enclos, avant la tombée de la nuit, quelle angoisse s’il en manquait une, vu les grands dangers alentours. Je courrais la chercher jusqu’à la trouver. Mais quel drame déchirant quand, déboussolée, la brebis s’enfuyait encore plus loin…  Affolée, il lui arrive de ne plus reconnaître la voix du bon berger.

La loi du talion

Dans beaucoup d’esprits, la loi du talion a figure de pratique archaïque et barbare. En fait, nous péchons souvent par ignorance des civilisations antiques et notre appréciation commet alors plusieurs contresens. J’ai écrit toute une étude là-dessus reconnue pour sa qualité par plusieurs exégètes. 

En bref, « œil pour œil, dent pour dent » (Mt 5,38) n’est pas d’origine biblique et les Mésopotamiens d’il y a 4000 ans ne l’employaient pas dans un sens littéral (cf. le § 218 du code d’Hammourabi). La loi du talion est un progrès juridique. Il s’agit de sanctionner la violence physique par un dispositif de droit pénal. Le défi est de mettre hors-jeu les représailles arbitraires et aveugles et enrayer l’escalade des violences. Le talion prescrit à l’homme offensé une limite à sa légitime défense : seulement une dent à la place d’une dent,  « un œil (et non pas deux !) pour un œil ; une dent (et non pas la mâchoire !) pour une dent abîmée ».

« Œil à la place de œil, dent à la place de dent » (Mt 5,38), pour les civilisations bien antérieures aux Hébreux, ne demande pas du tout à être pris à la lettre. Outre un progrès juridique, bien plus tard, progressivement, la Bible témoigne que les Juifs étaient en chemin dans un double progrès supplémentaire :
1) sociologique : étendre les bienfaits d’un État de droit à davantage de catégories sociales, affirmer l’égalité de tous devant la loi ;
2) spirituel : la vie humaine n’a pas de prix et ne peut être mise en tarif. Une vie perdue, un œil perdu ne pourront jamais être validement compensés par de l’argent. La Bible affirme le « prix sans prix » de la vie humaine : « prends garde à ne pas blesser ton frère ou attenter à sa vie, car le seul prix imaginable pour son œil ou pour sa vie serait ton œil ou ta vie ! ». Ce genre littéraire de la dissuasion, de l’hyperbole amorce une preuve par l’absurde : « rien ne peut remplacer l’œil de ton frère, sinon par impossible ton propre œil ». Cela ne signifie pas : « on va te mutiler ». Cela veut dire : « ne crève jamais l’œil de ton frère ».

Pour les références exégétiques de cet article + plus de précisions notamment sur « taḥ’at » (à la place de), lire mon étude dans mon livre Tends l’autre joue, ne rends pas coup pour coup. Mt 5, 38-42, non-violence active et Tradition, Éd. Lumen Vitae & Sortir de la violence, 2008, p. 17-23.

Assomption 

« Cœur humble,
Foi inébranlable,
Amour Infini,
Reliée à l’Essence-ciel,
Tu es Femme et tu ascensionnes ! »
(Binela Arian, femme mauricienne d’origine indienne qui se présente en passionnée par l’Universalité de Dieu et ainsi reliée à toute l’Humanité).

Il est tôt, en ce 15 août, et pourtant j’ai déjà reçu divers « bonne fête de l’Assomption » (comprenant chaque fois un texte spirituel lumineux + une image pieuse de Marie) venant notamment de 4 Hindous très pratiquants. Et cela va continuer. À Maurice, de religions différentes, les voisins et amis, même simples connaissances, s’échangent ainsi mutuellement des bons vœux profonds à l’occasion de leurs fêtes religieuses respectives. Cette bienveillance et reconnaissance mutuelle : quelle force ! Vive le petit peuple de Maurice, laboratoire de l’humanité en voie de divinisation…

Clés ouvrant les paraboles de Jésus

Chers amis de l’ICJM,

Étienne Chomé, Docteur en théologie, nous propose un séminaire très pratique pour dégager ensemble la pointe d’une douzaine de paraboles évangéliques, en s’exerçant à utiliser concrètement trois clés qui ouvrent le langage parabolique.

Dans une parabole, devant un point de divergence et/ou un blocage dans la communication, Jésus fait le détour d’une histoire réaliste qui rejoint l’interlocuteur et le met en route. Puis, sur ce nouveau terrain, la parabole organise une tension, un coup de théâtre, un renversement de situation qui le dé-route, qui le surprend ou le choque. Elle engage ainsi le destinataire à prendre position, pas seulement dans sa tête mais dans tout son être, et à la concrétiser dans un comportement nouveau. Elle n’est pas un enseignement, elle est un langage de changement, d’une redoutable efficacité !

L’art de la parabole, unique en son genre, est d’appeler à une conversion profonde, sans confrontation directe. Interpréter une parabole en ignorant ce genre littéraire propre produit souvent de sévères contresens.

Étienne Chomé a publié un travail exégétique sur les paraboles et a développé une pédagogie très appréciée par les participants d’une telle session pratique, par laquelle ils peuvent par eux-mêmes faire de passionnantes découvertes bibliques.

Livre publié à ce propos : Chomé Étienne, Le jeu parabolique de Jésus, une étonnante stratégie non-violente, Éditions Lumen Vitae, Collection Connaître la Bible, n° 57, 2009. 

Nous attendons vos inscriptions pour cette incursion dans les paraboles, suscitant la découverte ou la redécouverte de la parole vivante.

Au plaisir de vous accueillir !

Mise en scène de la Cène sur la Seine : en faire toute une scène ?

Jésus a mal fini, crucifié sur une croix, car il a choqué et même scandalisé les dépositaires orthodoxes de la Révélation, tandis que les gens réputés de mauvaise vie se pressaient autour de lui, fascinés par sa Bonne Nouvelle : notre Père fait de nous tous de véritables frères et sœurs. Il nous appelle à la conversion pour nous ouvrir à un Royaume où ceux qui veulent être les premiers seront finalement les derniers…

Ce message est tellement habituel dans la bouche d’un prêtre en chair de vérité qu’il passe alors en ronronnant. Mais, hors des églises, par quel procédé diabolique scandalise-t-il quand il sort de la bouche de déjantés qui vivent surtout la nuit, férus de bacchanales de tous types, quand il sort de la bouche d’écorchés par la vie et de méprisés par la société ? Les bien-pensants auraient-ils plus le droit qu’eux d’occuper une place à la Cène du Jeudi Saint ? Ou les Barrabas d’aujourd’hui qui dénoncent violemment les J.O. comme « du pain et des jeux » / opium du peuple assujetti ? Merci aux victimes d’injustice et marginalisés de tous poils quand ils choisissent d’autres armes que le terrorisme pour secouer les bonnes consciences !

Jésus a véritablement créé le scandale, notamment en chassant les marchands du Temple, appelant à une conversion du cœur et de l’intelligence en faveur d’une relation vraie avec notre Père. Voir mon article ici :

Bacchanale grecque ou Sainte Cène ? Quelles étaient les références des artistes qui ont fait ce tableau si polémique de la cérémonie d’ouverture des J.O. à Paris ? Ma question est ailleurs : la Bonne Nouvelle peut-elle retentir ? L’Évangile peut-il être entendu ? Quel est-il vraiment ? Les personnes bigarrées qui ont animé ce tableau m’ont beaucoup dérangé et je les remercie pour ce choc salutaire. Je les remercie d’avoir scandalisé autant de personnes socialement respectables. Quelle magnifique opportunité pour l’Esprit Saint de reposer à chaque personne la question de Jésus : « Pour toi, qui suis-je ?… Convertis-toi et crois en la Bonne Nouvelle de la réconciliation authentique de toutes et tous en Lui… »

Merci à ces passionnés de pop-culture, personnes hors normes, en surpoids, drag-queen, d’avoir offert leur regard sur nos valeurs communes d’inclusion, de générosité, de solidarité et de liberté. « Notre intention était de montrer de la tolérance et de la communion » (Anne Descamps, porte-parole de Paris 2024). Merci d’avoir créé un espace-temps au coeur de ces jeux olympiques dans lequel peut exploser à nouveau frais la bombe de l’Évangile. Son message de communion fraternelle est révolutionnaire (ré-love-Uturn), qui n’a plus rien de ronronnant à nos oreilles quand nous souffrons à cause de notre proche ennemi ; c’est du concret entre extrême gauche et élites économiques et politiques qui défendent leur désordre établi, entre Israéliens et Palestiniens, Russes et Ukrainiens, Rwandais et Congolais, etc. Tout est grâce : appel à la conversion et occasion de salut, non ?

Si ce message fait sens pour toi, n’hésite pas à le partager !

Fruit de la passion

Toute mon enfance a été parfumée par les fruits de la passion / maracuja, qui embaumaient mon jardin de Kigali. Et ce fut une joie de les retrouver en 1999 dans notre jardin communautaire à l’île Maurice. C’est un fruit que les conquistadors ont ramené du Brésil. Maracuja est le nom d’origine, celui utilisé par les autochtones (qualifiés d’ « Indiens » par les conquérants). Le nom « fruit de la passion » vient de missionnaires pédagogues qui ont vu dans ce fruit de nombreuses résonances avec la crucifixion de Jésus. À leurs yeux, les pétales représentent sa couronne d’épines ; les 5 étamines ses plaies ; les 3 éléments mauves du pistil les clous enfoncés dans sa chair / à coup de marteau ; le cœur de la fleur l’éponge qui a servi à étancher sa soif sur la croix… Même le fouet y est vu : les lanières en tire-bouchon tout autour de la fleur. Le nom donné à cette fleur (passiflore) est donc lié à la Passion du Christ.

Les 10 pétales correspondraient aux 10 apôtres (une fois Judas pendu et Pierre englué dans ses reniements ; on arrange comme on peut)… Chaque nombre a un sens symbolique dans la Bible ; 10, comme 10 doigts de la main, c’est d’abord le nombre des Paroles de Vie / Commandements divins ! Et, en écho, dix désigne la réponse de l’homme à l’invitation de Dieu à vivre. Cela concerne la responsabilité (personnelle et communautaire) des êtres humains devant les 10 commandements de Dieu ! Sur l’intérêt de la formulation négative des commandements (« tu ne feras pas ceci et cela… »), cf. https://etiennechome.site/commandements-en-forme-negative-piquets-de-la-cloture-de-la-vie/

Photo de la fleur prise par mon fils, en Angleterre, fin juillet 2024. Bon anniversaire, Christophe ! Et bonne troisième décennie…

Le discours à Ratisbonne de Benoît XVI

« Dans son discours à Ratisbonne, Benoît XVI poursuit
I. une double thèse : 1) La foi va intrinsèquement de pair avec la non-violence,
la liberté et le respect. 2) La foi va intrinsèquement de pair avec l’ample raison.
II. Une double antithèse qui interpelle d’abord l’Islam, ensuite l’Occident :
1) Les actuelles violences religieuses proviennent d’un fidéisme (une foi trop peu nourrie par la raison) qui réduit Dieu à une Volonté Tout Puissante.
2) L’actuelle domination de la raison positiviste provient d’un rationalisme athée qui exclut la démarche religieuse. Ces deux pathologies sont dangereuses et bloquent le dialogue entre les cultures et les religions de notre monde.
III. Une double synthèse qui lance un appel d’abord à l’Islam, ensuite à l’Occident: 1) Un vrai dialogue basé sur la raison et la responsabilité nécessite que toutes les parties  acceptent les règles d’un débat à la fois respectueux et critique. 2) L’Europe laïque doit reconnaître ses racines chrétiennes et accepter un dialogue avec les religions en leur donnant une place, un droit de parole et de pensée » (extrait de l’article d’Étienne Chomé, Non-violence, liberté de la foi et respect de la personne. Comprendre ce qu’a dit Benoît XVI à Ratisbonne, paru dans la revue La Voix de Saint-Paul, éditée à Fribourg, en Suisse, juillet 2007 ).

Voici l’article entier :

L’amour qui vient de Dieu

« … Il y a un amour plus grand, un amour qui vient de Dieu et qui est dirigé vers Dieu, qui nous pousse à aimer Dieu, à devenir ses amis, et qui nous permet d’aimer notre prochain comme Dieu l’aime, avec le désir de partager l’amitié avec Dieu. Cet amour, à cause du Christ, nous pousse là où humainement nous n’irions pas : c’est l’amour pour les pauvres, pour celui qui n’est pas aimable, pour celui qui ne nous aime pas et n’est pas reconnaissant. C’est l’amour pour ce que personne n’aimerait, même pour l’ennemi. Même pour l’ennemi. Cet amour est  » théologal », c’est-à-dire qu’il vient de Dieu, il est l’œuvre de l’Esprit Saint en nous.
[…] L’amour chrétien embrasse ce qui n’est pas aimable, offre le pardon
– comme il est difficile de pardonner ! Que d’amour il faut pour pardonner ! –, l’amour chrétien bénit ceux qui maudissent, alors que nous sommes habitués, face à une insulte ou à une malédiction, à répondre par une autre insulte, par une autre malédiction. C’est un amour si audacieux qu’il semble presque impossible, et pourtant c’est la seule chose qui restera de nous. L’amour est la « porte étroite » par laquelle nous devons passer pour entrer dans le Royaume de Dieu. Parce qu’au soir de la vie, nous ne serons pas jugés sur l’amour générique, mais nous serons jugés précisément sur la charité, sur l’amour que nous avons reçu concrètement » (Pape François, Audience générale du 15 mai sur la vertu théologale de la charité :

https://www.osservatoreromano.va/fr/news/2024-05/fra-020/la-porte-etroite-de-l-amour-qui-embrasse-et-pardonne-meme-les-en.html

).