Cyclone et âmes marquées par ses côtés sauveurs et ses côtés destructeurs

Les îles de La Réunion et de Maurice sont en alerte cyclonique. Le premier cyclone de la saison qui oblige tout le monde à se calfeutrer a été nommé Belal. Il va probablement passer entre les deux îles (ou sur La Réunion) ce lundi tôt matin.

L’approche lente du cyclone crée une ambiance si spéciale, où se mêlent le meilleur et le pire, ce double creuset de nos récits passionnés. Il y a les intenses peurs des dégâts et un insoutenable suspense : serons-nous cette fois dans les sinistrés ? On se souvient, tous – même les jeunes qui n’ont qu’entendu les récits – des cyclones destructeurs, qui nous sont passés dessus, comme Carol en 1960, avec des vents à 256 km/h., comme Gervaise avec des vents à 280 km/h. en 1979, des vagues de plus de 10 mètres… Avec leurs maisons de tôles qui peuvent être soufflées, les pauvres ont le plus à craindre !

Les cyclones destructeurs nous terrifient. Et pourtant, nous prions pour avoir de bons cyclones : ceux dont les pluies torrentielles vont remplir nos réservoirs, sans nous détruire ! Notre île a vitalement besoin de ces pluies pour que nos réserves d’eau tiennent l’année… Ce besoin d’eau crée une religiosité naturelle dans les esprits et les âmes qui appellent la venue de cette Force de la nature, avec gratitude pour ses côtés bienfaisants, et qui, en même temps, supplient d’être protégés de ses côtés terrifiants et destructeurs…

Pour ma petite famille, qui y a vécu 6 saisons cycloniques, à part la peine des heures fastidieuses à visser des panneaux contre tous les châssis de fenêtres et à part les divers désagréments, du style une coupure d’électricité (au cyclone Dina, elle a duré plusieurs semaines dans la Cité Barkly – non prioritaire – où nous vivions), ce furent des moments extraordinaires que nous n’oublierons jamais : quels bons souvenirs pour nous, calfeutrés dans la maison en famille, tout excités à suivre les infiltrations d’eau et à prendre du temps ensemble, autour de la radio-infos et des jeux de société à la bougie…

Trombes d’eau : recevoir plus d’un mètre d’eau en un jour, ce que reçoit un endroit comme Paris en plus d’un an !

L’épiphanie d’une nouvelle royauté

La « galette des rois » est une tradition bien vivante chez nous :
le premier dimanche de janvier, pour l’Épiphanie, on “tire les rois”
en famille. Cette année, nous avons la joie de vivre cette tradition
avec des Mauriciens qui ne connaissent rien de cette tradition.
Alors, je la raconte ici.

Le clou de la fête est au dessert, autour de la galette à frangipane
(en forme de couronne) qui a été cuite pour l’occasion avec,
en son sein, une fève cachée : aussitôt que la personne
dont la part de gâteau contient la fève la découvre,
elle est reconnue reine/roi et elle choisit qui sera
roi/reine avec elle, pour toute la journée.
Et on leur met une couronne royale dorée sur la tête.
Au moment de la découpe de la galette, comme tous prennent
un malin plaisir à repérer dans quelle part se trouve la fève,
la personne la plus jeune d’entre nous est envoyée sous la table
pour être la voix innocente : la maîtresse de maison pointe une
part de gâteau en lui demandant à qui attribuer cette part…

Cette fête existait avant le christianisme. Après le solstice d’hiver,
les Romains fêtaient le retour de la lumière de cette manière : 
maîtres et esclaves de la même maisonnée partageaient un gâteau,
souvent fourré de miel et de datte, dans lequel était cachée la fève,
sorte de tirage au sort de la personne honorée en roi/reine pour un jour.

Ce que les chrétiens ont apporté à cette fête, c’est un sens neuf
de la royauté, de la couronne (forme qu’ils vont donner
à la galette) et de la lumière.

Il y a les rois, au sens des chercheurs de l’essentiel
qui ont la joie de connecter le Ciel et qui auront la
surprise d’être illuminés de l’intérieur d’une étable :
« Où est le roi des Juifs qui vient de naître ?
Nous avons vu se lever son étoile et nous
sommes venus nous prosterner devant lui. »

Il y a Hérode, le roi-politicien, qui cherche à éliminer le rival :
« Allez vous renseigner avec précision sur l’enfant.
Et quand vous l’aurez trouvé, avertissez-moi pour
que j’aille, moi aussi, me prosterner devant lui. »

« Avertis en songe de ne pas retourner chez Hérode,
les sages d’Orient regagnèrent leur pays
par un autre chemin » (Mt 2, 1-12).

Il y a ce bébé innocent dans la mangeoire,
dont tout l’être irradie d’une lumière nouvelle,
dont la couronne royale deviendra couronne d’épines…
Et la Passion commence déjà dès sa naissance :
à tour de bras, le roi Hérode crucifie de saints
innocents, hier comme aujourd’hui encore !

Je nous souhaite belle réception de cette lumière
autre que celle du soleil extérieur
et bonne royauté alternative !

Merveilleux sur mer / mère veilleuse

En pâtisserie, le merveilleux est un gâteau cylindrique
à plusieurs couches de meringues sèches soudées
ensemble et recouvertes par une ganache,
le tout roulé dans des copeaux de chocolat.
Le merveilleux s’invite le mieux au cœur de l’hiver.

Saviez-vous que le merveilleux a été créé
en référence aux Merveilleuses de l’Ère directoire
(1795-1799) ? Ces femmes avaient un goût prononcé
pour la mode (perruques, plumes, bijoux, décolletés…)
et les plaisirs de la vie. Ce petit gâteau meringué est
originaire de Belgique. C’est aussi un classique dans
le Nord de la France, où on l’appelle – paraît-il –
« boule meringuée au chocolat »,
« boule choco » ou « arlequin » !

Aux personnes qui me lisent de l’hémisphère Nord,
bonnes calories pour faire face au froid de l’hiver…
Aux personnes qui me lisent de l’hémisphère Sud,
je gage que la photo jointe vous fasse un peu sentir
l’ambiance de notre ‘mer du Nord’ en hiver…

Merci, mon âme-mie, Françoise, de m’avoir envoyé
cette photo qui m’inspire ce matin ce merveilleux
sur mer / mère veilleuse…

L’Épiphanie dans tous les sens / l’essence ?

En littérature, « épiphanie d’une réalité » se dit d’une prise de conscience soudaine et lumineuse de la nature profonde de cette réalité : on parle d’une épiphanie de la musique, de l’épiphanie d’une amitié…

Dans son sens philosophique, « épiphanie » convient pour l’expérience d’une personne qui découvre une nouvelle information ou expérience, souvent insignifiante en elle-même, qui illumine de façon fondamentale l’ensemble. C’est voir la chose dans son intégralité, après avoir rassemblé toutes les pièces du puzzle ; genre Archimède s’écriant « Eurêka / J’ai trouvé ».

Fêter l’épiphanie, le 6 janvier, serait-ce donc célébrer la joie que les pièces du puzzle biblique sont désormais toutes assemblées ? Les mages, en quête du sens premier de la vie, partent de chez eux, quatre à quatre. Les voici à côté d’un bœuf et d’un âne, pour reconnaître et honorer le Fond de l’être, que ce bébé incarne si bien et que nous pouvons percevoir, en déployant notre stéthoscope divin, avec ses antennes célestes et capteurs terrestres…

Bonne fête de l’Épiphanie…

Journée mondiale de la paix

« Les développements technologiques qui ne conduisent pas à une amélioration de la qualité de vie de l’ensemble de l’humanité, mais qui au contraire exacerbent les inégalités et les conflits, ne pourront jamais être considérés comme un véritable progrès » (Pape François, Intelligence artificielle et paix, 57ème journée mondiale de la paix célébrée le 1er janvier 2024).

Banané 2024, vou zot tou !
Et-tiennent chauds-mets
pour vous les servir…

« Mari chouette les veillées » : en créole mauricien, « mari » est un adverbe qui signifie « très »   / « tellement ». Exemples : « Mari top ça », « Mari bon ça », « Mari loin ça ».

Au creux de la nuit, au solstice d’hiver

C’est la cure d’hiver.

Le froid invite la sève des arbres à retourner aux racines.
La nuit prie l’attention de descendre des yeux
vers ce qui ne se voit pas d’habitude.
Émerge lentement ce qui EST (l’été,
c’est souvent enfoui, caché sous la surface).
La nature vit un retour à l’essence-Ciel de sa Terre.
Sa vraie nature se révèle dans les profondeurs, à l’intérieur.

Car seul le cœur de mon cœur peut embrasser tout ce que je suis,
avec un amour inconditionnel,
sans rejeter les aspects de moi
que d’autres parts en moi n’aiment pas…

Le sapin de Noël

Tout arbre, par ses racines et ses ailes, nous invite à célébrer l’alliance Ciel-Terre qui nous constitue et qui nous traverse.
Le sapin, lui, apporte sa touche spéciale avec sa forme pyramidale : ne nous invite-t-il pas à nous élancer et à nous affiner dans notre élan vers les cieux ?…
Contenant la pyramide des besoins de Maslow, le sapin représente notre progression humaine, partant de la base vers le sommet : besoins physiologiques > besoins de sécurité > besoins d’appartenance et d’amour > besoins d’estime > besoins d’accomplissement de soi.
Balisent-elles ce chemin de réalisation de soi, les décorations sur le sapin de Noël, illuminé par les boules telles les corps célestes (soleil, lune, étoiles) ? Et, à la pointe de l’arbre, est-ce l’étoile reliée au zénith qui symbolise le retour de la lumière ?

Quand la déco du sapin de Noël
est une œuvre collective,
dit-elle notre unité
dans nos diversités /
dans nos divers Cités
(oh oh oh
Santa Klaus écho
pas clos…) ?

Sur-naturel ?

« Avec son air très naturel,
le surnaturel nous entoure »
(Jules Supervielle).

« La notion de l’infini dans le monde, j’en vois partout l’inévitable expression. Par elle, le surnaturel est au fond de tous les coeurs. L’idée de Dieu est une forme de l’idée de l’infini » (Louis Pasteur, dans son Discours de réception à l’Académie française, 27 avril 1882).

« Le bleu profond attire l’homme vers l’infini, il éveille en lui le désir de pureté et une soif de surnaturel. C’est la couleur du ciel tel qu’il nous apparaît dès que nous entendons le mot ciel » (Wassily Kandinsky).

Bonne fête à tous les
É tienne que pourra…
Hip hip hip hourra !…

Écouter, sentir et admirer

« Écouter ce que dit le vent quand il ne dit plus rien
mais reprend souffle et se souvient
d’avoir été si haletant après sa course
sa course de vent qui court après le vent

Que dit le vent quand il se tait ?
Que dit le silence du vent ?
Écouter ce que dit pluie
quand un instant elle fait halte
et cesse l’espace de trois mesures
de tambouriner ses doigts d’eau
sur le toit et sur les carreaux
Que dit la pluie quand elle se tait ?
Que dit le silence de la pluie ?

Écouter ce que dit la mésange
nonnette quand elle suspend ses roulades
et que son chant dans le matin clair
reste en filigrane dans l’air
Que dit l’oiseau quand il se tait ?
Que dit le silence de la mésange ?

Le silence dit que le silence écoute
couler la source du chant »
(Claude Roy).

Automne alité ? / Haute tonalité !

Haute tonalité !

« Je dirai la couleur du vent
dans les soleils chargés de novembre.
Je dirai l’odeur des nuages.
Je dirai le bruit des étoiles
et les feux changeants du silence.
Et vous direz que je suis fou
et je dirai que je vous aime.
Et vous vous en irez quand même.
Le vent perdra toute couleur
et le ciel n’aura plus d’odeur.
Vos silences feront la nuit,
les étoiles seront sans bruit.
Je serai seul et vous de même
et vous saurez que je vous aime,
que sans amour et sans folie,
on n’a que faire de la vie… »
(Gilles Vigneault, Bois de marée).