La joue tendue mal comprise

Comprenant que la joue tendue (Mt 5,38-42) est un appel à ne pas résister, à renoncer à ses droits propres, à supporter patiemment l’injustice, les coryphées de la Tradition ont été obligés de limiter la non-violence évangélique du mieux qu’ils pouvaient :

1) Oui à l’esprit évangélique mais en assurant une défense efficace, pense Augustin. Alors que l’Église devient religion officielle de l’Empire, il organise la solution intériorisante qui distingue les actes des intentions : les commandements de Mt 5,38-42 adressés à tous ne nous enseignent pas le comportement à avoir mais seulement « l’esprit » dans lequel nous devons nous défendre. Ces textes ne disent pas : « laissez les méchants faire » mais bien « corrigez les méchants, tout en les aimant pleinement, dans l’intention droite de votre cœur ».

2) Oui à la joue tendue mais pas pour tous, se dit Thomas d’Aquin, en reflétant bien l’esprit de son temps. À l’époque médiévale qui marque nettement les différences entre les clercs et les laïcs, Mt 5,38-42 s’applique différemment aux uns et aux autres : commandement pour ceux qui ont tout quitté pour témoigner anticipativement du Royaume, conseil de perfection subordonné au devoir de défendre son prochain pour ceux qui ont la charge de protéger leur famille, leur entreprise, leur pays. Les religieux peuvent témoigner de cet amour radical qui va jusqu’à donner sa vie pour son ennemi, tandis que c’est en défendant leurs proches que les laïcs exercent leur vocation d’amour. C’est la solution de la vocation personnelle et libre.

3) Oui à ce précepte impossible mais par grâce et seulement pour les chrétiens dans leurs relations interpersonnelles, affirme Luther. La Réforme protestante se centre sur le Sauveur, seul apte à donner la grâce d’accomplir ce qu’il demande en Mt 5,38-42. C’est la solution christologique. Mt 5,38-42 énonce des commandements pour tout chrétien, qu’il soit clerc ou laïc. Mais ils valent seulement dans le rapport de chrétien à chrétien, honorant le Royaume de Dieu qui vient en Christ. Ils ne valent pas, comme tels, pour les gouverneurs, les juges, les dirigeants économiques dans l’organisation de la Cité.

Ces trois théologies qui expriment l’idéal de la société dans laquelle elles sont produites, s’accordent sur le schéma : oui autant que possible aux préceptes évangéliques de non-violence en Mt 5,38-42 mais il faut en limiter les destinataires et/ou le caractère obligatoire et/ou la portée du champ d’application, vu la nécessité de protéger les innocents contre la violence et de résister à l’injustice. D’où le dilemme qui s’est posé à toute pensée chrétienne au cours de ces deux millénaires, entre d’une part le devoir d’assistance et de protection de son prochain et d’autre part la fidélité à la non-violence prônée par Jésus dans ses paroles comme dans ses actes. Ambroise de Milan parle déjà au IVe siècle de ce conflit de devoirs pour tout chrétien, que le jésuite Joseph Joblin reprend : ou bien il observera le précepte selon lequel il doit s’abstenir de toute violence mais il manquera à l’obligation qui est la sienne de venir en aide à la victime de l’agression injuste (cela sous peine de devenir complice de l’injuste agresseur) ; ou bien il mettra sa force à la disposition de la victime de l’injustice et il manquera au précepte de non-violence contenu dans l’Évangile.

De nos jours, les ressources en gestion des conflits révèlent que ce dilemme est très mal posé. Voir le schéma ci-dessous : quitter le dilemme traditionnel car la meilleure défense possible n’est pas dans la contre-agression ni dans la passivité, elle est dans une mobilisation de nos meilleures forces vives et une optimisation des ingrédients dénouant effectivement la crise. Et, côté Évangile, si on comprend que la joue tendue est un appel à résister, à se battre contre l’injustice en prenant une initiative déroutante qui ne tombe pas dans le piège de la contre-violence, mais qui enraye effectivement la domination, alors devient possible une théologie de la paix juste intégrant tant les trésors de l’Évangile que les savoir-faire en gestion constructive des conflits. Voir mon livre La non-violence évangélique et le défi de la sortie de la violence.

« On vous a dit… Moi, je vous dis… »

« Vous avez entendu qu’il a été dit aux anciens… . Or moi, je vous dis… » est le refrain qui rythme Mt 5, 21-48, avec six couplets, qui disent crescendo : la loi dit non à toutes les formes de violence, du plus proche au plus lointain, de celles que nous faisons subir aux autres (meurtre, mensonge, concupiscence) à celles que nous subissons des autres (5ème et 6ème antithèses). Jésus accomplit la loi, il la fait tenir debout à partir de sa racine, il l’établit définitivement selon son intention propre : « Il a été dit…, moi je donne le sens fondamental », à partir de la justice du Royaume du Père (ce sont les 3 mots qui reviennent le plus dans ce ‘Sermon sur la montagne’, en Mt 5, 6 et 7). Que nous soyons tous ses filles et fils, donc frères et sœurs change radicalement les relations entre humains…

Les six antithèses, les six racines fonctionnent toutes selon le même mouvement : « Pas seulement le meurtre mais déjà les jugements diabolisant l’autre et les paroles de haine qui y conduisent. Pas seulement la finalité de la justice, juste œil contre œil, mais encore l’importance de choisir d’autres moyens que la violence. Non seulement un combat juste mais déjà les moyens d’une paix juste. Non seulement la vérité sur l’idéologie guerrière du voisin qui nous agresse mais déjà un regard d’amour de l’ennemi.

Hélas, les théologiens jusqu’au 20ème siècle ont compris que la joue tendue était un appel à ne pas résister, à renoncer à ses droits propres, à supporter patiemment l’injustice. Comme cette non-violence-là est socialement et politiquement impraticable, il est logique et sage de limiter sa portée et d’en dénier le caractère obligatoire et collectif. Cette constante interprétation a ainsi mis en place le schéma : « oui à la non-violence évangélique mais pas dans certains cas », mouvement très différent du « non seulement… mais déjà et encore… ». D’où les apories dans la conciliation entre un tel amour oblatif qui se sacrifie et une politique de la Cité réaliste.

Tout change si l’Évangile de la joue tendue invite à résister avec réalisme, lucidité et amour ! Alors, il peut inspirer une politique responsable. Ce fut l’objet de mon doctorat en théologie. Assurément, non seulement le laisser-faire est toxique, la passivité fait le lit des abus de pouvoir des ‘méchants’, sans scrupules, mais encore la résistance à l’oppression a intérêt à inventer des alternatives à la violence…

Jésus non-violent plus révolutionnaire que les révolutionnaires

Jésus ne s’est pas attaqué frontalement à l’oppression politique de l’envahisseur romain ni à l’esclavage socioéconomique. Mais il en a sapé les fondements, il a été à la racine des dominations des uns sur les autres, pour toucher nos consciences et nous faire lâcher, à partir de nos cœurs, nos abus de pouvoir et nos violences structurelles. Le ferment de sa bonne nouvelle a mis quelques générations pour subvertir l’Empire romain mais il l’a subverti… En ce sens, Jésus radicalement non-violent est plus révolutionnaire que les révolutionnaires !

Le fin mot de l’histoire, c’est que son Père est juste ET miséri-cor-Dieu : Dieu penché avec son cœur sur nos misères. Et il nous invite à la
conversion : choisir de Lui faire confiance, croire en son infinie
patience et miséricorde, à la radicale bienveillance de  son dessein.

Notre conversion, au cours de ce carême, ne porte pas d’abord sur ce que nous faisons mais sur ce que nous pensons, comment nous nous représentons Dieu. Il nous dit que, malgré les apparences d’une efficacité de surface et à court terme, le radical retournement des cœurs humains a le pouvoir de changer la face du monde. Le croyons-nous ?

Le printemps n’est pas seulement le bon moment pour les stratèges de lancer une opération militaire contre le peuple voisin, c’est aussi chaque année, notre montée résolue vers Pâques, mort et résurrection. Bon carême, bon car-aime, dans la paix et la détermination d’une paix juste !

Pendu perdu retrouvé

« Je suis très touché par un chapiteau médiéval qui se trouve dans la Basilique Sainte Marie-Madeleine à Vézelay, en France, où commence le Chemin de Saint-Jacques de Compostelle. Sur ce chapiteau, d’un côté il y a Judas pendu, les yeux ouverts, la langue dehors, et de l’autre il y a le Bon Pasteur qui l’emmène avec lui. Et si nous regardons bien, attentivement, le visage du Bon Pasteur, les lèvres d’un côté sont tristes, mais de l’autre côté elles arborent un sourire » (Pape François).

Tends l’autre joue, ne rends pas coup pour coup

Dans mon livre Tends l’autre joue, ne rends pas coup pour coup. Mt 5, 38-42, non-violence active et Tradition, Éd. Lumen Vitae & Sortir de la violence, 2008, 259 pages, j’ai mené une solide exégèse (académiquement reconnue) de la péricope Mt 5,38-42, notamment une longue Auslegungsgeschichte (étude historique de son interprétation), au terme de laquelle je conclus que l’interprétation classique selon laquelle ce serait un appel à ne pas résister trahit le mouvement des 6 antithèses (On vous a dit… Moi, je vous dis…; non seulement… mais encore…). Bref, sans développer ici, dans cette antithèse, Jésus appelle non seulement à résister pour la justice mais encore d’une manière spécifique : par d’autres moyens que la violence. En trois exemples incisifs, il propose des initiatives déroutantes retournant le système injuste contre lui-même, ce qui a pour effet de le subvertir de l’intérieur. En très résumé, tendre la joue signifie pour le subalterne non pas laisser faire et fermer les yeux mais au contraire empêcher une deuxième gifle du même ordre et amener le maître qui profite de son bon droit à ouvrir les yeux sur son abus de pouvoir social. Laisser son manteau quand l’huissier de justice vous prend tout jusqu’aux sous-vêtements, c’est se retrouver nu : de quoi toucher la conscience du riche sans scrupules, qui profite de son bon droit économique de créance. Faire mille pas de plus aux côtés d’un agent d’occupation qui profite de son bon droit de réquisition interpelle cet agent qui peut être convoqué par son supérieur pour rendre compte d’avoir dépassé la borne (plantée tous les mille pas sur les Viae Romanae) ; c’est donc une manière originale de contester avec amour ce droit que s’offre la puissance coloniale.

Dans les trois cas, Jésus enjoint ses disciples à inventer une initiative déroutante qui ne tombe pas dans le piège de la contre-violence, mais qui enraye effectivement le jeu de pouvoir logé dans la pratique admise mais injuste.

Jésus n’a pas été un politicien et il refuse tout messianisme politico-religieux. Mais il ne fuit pas le conflit ; il crée même la confrontation. Il est assertif, franc et combatif. Le ferment de l’évangile a mis quelques générations pour subvertir l’Empire romain mais il l’a révolutionné ! Car Jésus a sapé les fondements même de la domination des uns sur les autres, de l’esclavage, de l’oppression politique et économique. En ce sens, dans sa redoutable force non-violente, Jésus est plus révolutionnaire que les révolutionnaires.

Comprendre l’Évangile comme un appel à ne pas résister est à l’origine des nombreuses apories dans l’articulation de l’Évangile au réalisme politique (oui à l’Évangile mais pas…).

« Renoncer à l’usage de la force » est une formule inadéquate qui crée le dilemme entre force (sous-entendue violente) ou non-force (sous-entendue non-violente ; à vrai dire, passivité). Le défi est d’optimiser le déploiement des forces sociales, économiques, culturelles, politiques, etc., qui font effectivement reculer le seuil des violences légitimées en « dernier recours ». Voir là mon livre La non-violence évangélique et le défi de la sortie de la violence.

Le nouveau paradigme de non-violence

La non-violence adoptée par tout un peuple mobilise un ensemble de forces (cadre de droit juste, communication vraie, négociation efficace…) à même de réguler la violence des individus. C’est la problématique que je développe du point de vue des sciences humaines dans « Le nouveau paradigme de non-violence » et d’un point de vue théologique dans « La non-violence évangélique et le défi de la sortie de la violence ». Voici une brève présentation de ce 2ème ouvrage. D’une part, la gestion constructive des conflits, en plein essor en sciences humaines, offre de nouvelles ressources pour sortir de la violence. D’autre part, des groupes utilisant la non-violence comme méthode politique trouvent dans la vie et la prédication de Jésus une combativité assertive qui affronte sans peur les conflits. C’est sur cette nouvelle lecture de l’Évangile qu’ils fondent leurs combats pour la justice et pour une véritable paix sociale et politique. J’étudie les retombées en théologie de ces deux dynamiques contemporaines, en examinant comment elles renouvellent la problématique théologique articulant la non-violence évangélique et une attitude responsable face à la violence.

Les trois principales manières de les concilier sont mises en dialogue. La solution pacifiste et la position traditionnelle catholique comprennent « Tends l’autre joue » (Mt 5,39) comme un appel à ne pas résister, ce qui crée un dilemme entre obéir à l’Évangile ou se défendre efficacement. Les pacifistes renoncent à la légitime défense au nom de la fidélité à Jésus-Christ. Inversement, la tradition majoritaire, multiséculaire, reconnaît la nécessité d’une politique réaliste, par une argumentation de légitime défense entièrement basée sur le droit naturel, sans lien avec les pages non-violentes de l’Évangile. Une troisième voie comprend la péricope de Mt 5,38-42 comme un appel à résister mais par d’autres moyens que la violence. En trois exemples incisifs, Jésus propose des initiatives déroutantes retournant le système injuste contre lui-même, ce qui a pour effet de le subvertir de l’intérieur. Pour les porteurs de cette nouvelle interprétation, « renoncer à l’usage de la force » est une formule inadéquate qui crée le dilemme entre force (sous-entendue violente) ou non-force (sous-entendue non-violente ; à vrai dire, passivité). Le défi est d’optimiser le déploiement des forces sociales, économiques, culturelles, politiques, etc., qui font effectivement reculer le seuil des violences légitimées en « dernier recours ».

Pendant 1600 ans, a prévalu le raisonnement suivant : 1) Jésus a dit dans l’Évangile et a pratiqué à l’heure de sa mort un amour oblatif qui renonce à ses droits personnels, qui s’offre plus qu’il ne défend la justice lésée. 2) Or, cette non-violence-là est socialement et politiquement impraticable. 3) Donc, il est logique et sage de dénier le caractère collectif et obligatoire de ces paroles évangéliques et d’en limiter la portée sociopolitique. S’appuyant sur cet arrière-fond, de nombreux évêques, théologiens et pasteurs ont parlé au XXème siècle de la non-violence évangélique en termes de non-résistance, et donc comme un choix intime à la conscience, une option personnelle laissée à la discrétion de chaque croyant. Les discours évoluent depuis que la non-violence évangélique est regardée comme un certain type de résistance, politiquement actif. Il devient alors pertinent de la reconnaître comme une invitation réaliste et responsable, aussi vraie à l’échelle personnelle que collective, avec une réelle pertinence sociopolitique. Elle pourrait même devenir alors une exigence fondamentale du christianisme, inscrite au cœur de l’Évangile, requérant, pour être efficace, d’être un choix collectif. Elle concrétise l’appel à la conversion, à la transformation en profondeur de l’organisation de notre vie en Église et en société.

Le défi est d’intégrer ces éléments ainsi que les nouveaux savoir-faire des sciences de la paix dans l’actuel aggiornamento du corpus doctrinae de l’Église relatif à la guerre/paix juste, en articulant mieux l’Évangile de l’amour et la Realpolitik.

Lire la thèse : http://etiennechome.site/theologie/.

Vigne émondée pour prendre soin de l’essentiel

« Dans les vieilles vignes, on voit le parcours très sinueux de pieds qui se sont tordus dans tous les sens et qui ont fini par trouver leur voie vers la lumière.  On peut être tordu et quand même trouver petit à petit le chemin du ciel, de la lumière, de la joie de Dieu !

Le vigneron attache sa vigne pour la faire monter et lui donner la capacité de recevoir le plus de lumière possible. Jésus s’est présenté comme une vigne dont son père est le vigneron et nous les sarments. Pour que nous portions du bon fruit et beaucoup de fruit, notre Père du Ciel émonde tout ce qui dépasse pour nous faire aller à l’essentiel » (un moine témoignant de sa vie monastique dans le documentaire La Règle bénédictine & l’art de gouverner).

Sa gloire, Son rayonnement

Prendre un temps de retraite, se retirer en silence (au moins une heure par jour, un jour par semaine, une semaine par an), contempler Son rayonnement, Sa gloire (kabôd dans la bible : sa densité, son pesant d’or, sa manifeste présence) autour de moi et en moi, comment elle pénètre et éclaire tout : mes ombres et mes lumières… Descendre peu à peu dans cet ample espace où monte ma musique sacrée et s’activent mes pas de danse autour de mon axe de lumière… Respirer la joie d’‘être simplement’.

« Le Seigneur lui-même marchait à leur tête : le jour dans une colonne de nuée pour leur ouvrir la route, la nuit dans une colonne de feu pour les éclairer ; ainsi pouvaient-ils marcher jour et nuit » (Exode 13,21).

« La nuée couvrit la tente de la Rencontre, et la gloire du Seigneur remplit la Demeure. À chaque étape, lorsque la nuée s’élevait et quittait la Demeure, les fils d’Israël levaient le camp. Si la nuée ne s’élevait pas, ils campaient jusqu’au jour où elle s’élevait. Dans la journée, la nuée du Seigneur reposait sur la Demeure, et la nuit, un feu brillait dans la nuée aux yeux de tout Israël. Et il en fut ainsi à toutes leurs étapes » (Exode 40,34‑38).

« Le Seigneur est mon berger, je ne manque de rien.
Sur des prés d’herbe fraîche, il me fait reposer » (psaume 22).

Source, Souffle, Lumière

En tous temps, en tous lieux, tous les vivants célèbrent leur source, leur souffle, leur lumière.

La Bible honore ces fondamentaux du Vivant :
« En toi, est la source de vie ;
c’est par ta lumière que nous
‘soufflons’ la lumière » (Ps 35,10).

« La prière est le souffle de l’âme, l’oasis de paix où nous pouvons puiser l’eau qui irrigue notre vie spirituelle et illumine notre existence » (Benoit XVI, L’âme de la prière, p. 297).

Dans les bras de la mère qui engendre la vie, porteuse du souffle vital, fils et père, réunis, se réjouissent. Cette dynamique du Vivant court sur toute la terre, à l’image et à la ressemblance du Créateur, qui partage sa plénitude de communion. Bienheureux qui se laisse combler de sa joie légère à chaque inspire et qui, à chaque expire, y prend part de tout son être…

Silence d’or

Dans L’âme de la prière, Benoit XVI présente un Jésus constamment relié à son Père. C’est de cette Vie-là que jaillit de l’intérieur de Lui cet élan vers les autres, cet accueil des autres dans l’amour.

« La force qui a guéri le sourd-muet est provoquée par la compassion de Jésus pour lui ET provient du recours au Père. Ces deux relations (fraternelle et filiale) se rencontrent pour guérir » (p. 171).

« Sa relation permanente et intense avec le Père » (p. 172).

« Avant que le don ne soit donné, adhérer à celui qui donne. Le donateur est plus précieux que le don » (p. 174).

« Redécouvrir le caractère central de la parole de Dieu dans la vie de l’Église veut découvrir le sens du recueillement et de la paix intérieure. La grande tradition patristique nous enseigne que les mystères du Christ sont liés au silence ; par lui seul, la Parole peut faire en nous sa demeure, comme chez Marie, qui est inséparablement la femme de la Parole et du silence» (n° 66).

Ce principe – que sans le silence, on n’entend pas, on n’écoute pas, on ne reçoit pas une parole – vaut surtout pour la prière personnelle, mais aussi pour nos liturgies : pour faciliter une écoute authentique, elles doivent être aussi riches de moments de silence et d’accueil sans parole. La remarque de saint Augustin est toujours valable « Verbo crescente, verba deficiunt » (Sermons 288,5) :
quand le Verbe de Dieu augmente, les paroles de l’homme manquent » (p. 221). Les paroles de l’homme sont d’autant plus pauvres et inutiles que le Verbe de Dieu augmente…

Dans l’image, « Élie s’envole… Hélice en vol ! », dixit mon cher professeur d’exégèse, Jean Radermakers, jésuite belge décédé le 12 juin 2021, à l’âge de 96 ans. Pour les non-Belges, photo de notre roi Philippe, qui est pilote d’hélicoptère ! CQFD (pour avoir des vers holorimes).