Surmonter le paradoxe de Popper : ne pas tolérer l’acte intolérant, à ne pas confondre avec l’individu intolérant

Dans The Open Society and Its Enemies, publié en 1945, Karl Popper pense que « la tolérance illimitée mène à la disparition de la tolérance. Si nous étendons la tolérance illimitée même à ceux qui sont intolérants, si nous ne sommes pas disposés à défendre une société tolérante contre l’impact de l’intolérant, alors le tolérant sera détruit, et la tolérance avec lui. » D’où son paradoxe : au nom de la tolérance, nous devons revendiquer le droit de ne pas tolérer l’intolérant !

Ce dernier mot « l’intolérant » désigne-t-il l’acte intolérant ou l’individu intolérant ? C’est là une dangereuse ambiguïté à lever : nous avons le double devoir de 1) ne pas tolérer l’acte intolérant et 2) comprendre en profondeur la personne intolérante. C’est par cette distinction  que le modèle que j’ai mis au point clarifie comment une société en bonne santé surmonte le paradoxe de Popper.

Voici le commentaire de ce schéma.

On est enfermé dans ce paradoxe tant que le débat porte sur un seul axe (mettre plus ou moins de limite à la tolérance, avec une confusion entre acte et individu intolérant ; à l’extrême gauche du schéma : tolérance zéro ; à l’extrême droite du schéma : tolérance illimitée).

On quitte ce paradoxe en distinguant nettement le registre des personnes et des actes : profonde compréhension des personnes intolérantes dans leurs fondements (motivations, intentions positives, besoins frustrés…) articulée à un cadre de droit réussissant toujours mieux à faire reculer les comportements intolérants par de performantes législation et sanction des actes délictueux. 

Les policiers gardiens de la paix

À propos de la création d’une « École de guerre » destinée à la formation continue des policiers en France, les membres du réseau francophone de Church and Peace ont rédigé une lettre destinée aux Églises de France. Extrait :

« Pour nous, les policiers sont des gardiens de la paix, qui ne peuvent pas être formés dans une école de guerre, et nous jugeons très dangereux le développement d’une telle rhétorique guerrière qui installe l’idée de la possibilité ou de l’existence d’une guerre à l’intérieur de notre pays.

Nous avons conscience que les policiers sont régulièrement confrontés à diverses formes de violence dans l’exercice de leur fonction, qui exige du sang-froid et un grand professionnalisme, et nous considérons qu’il est par conséquent souhaitable qu’ils puissent recevoir une formation initiale et continue de grande qualité qui leur permette de pouvoir agir en toutes circonstances dans le respect des quatre principes de légitimité, de nécessité, de précaution et de proportionnalité. La multiplication ces derniers mois de violences policières avérées montre la nécessité de renforcer et d’améliorer cette formation des policiers afin qu’ils ne recourent pas à un usage excessif et illégal de la force mais qu’ils puissent apprendre et mettre en œuvre des techniques de désescalade et de désamorçage de situations de violence.

Il nous semble qu’une des priorités des pouvoirs politiques devrait être de garantir cette formation de qualité, pour renforcer les liens de confiance entre la police et la population, et non de développer une rhétorique guerrière à ce propos.

Nous souhaitons résister à une telle rhétorique de la peur qui conduit trop souvent à une escalade de la violence et qui peut fonctionner comme une prophétie auto-réalisatrice. Pour cela, nous voulons d’abord désarmer nos esprits et notre vocabulaire. Nous voulons également soutenir une éducation et une formation à la culture de paix et de non-violence tout au long de la vie. »

Pour lire l’ensemble de la lettre :

Le conflit est à prendre au sérieux dès les premières alertes

Sagesse d’investir dans les ressources existantes en temps de paix.
Inconscience de reporter cet investissement à plus tard.
Car un conflit se dénoue d’autant plus facilement
que le nœud ne s’est pas encore serré,
pire qu’il ne s’est pas encore transformé en boule pleine de nœuds. 

Cf. http://etiennechome.site/publications-de-fond/sociopolitique/

La violence stade dégénéré d’un conflit qui tourne mal

La violence est le stade dégénéré d’un conflit qui tourne mal. Avant de basculer dans la violence, la confrontation a connu plusieurs phases, avec des signaux d’alerte croissants, comme un cyclone tropical qui a d’abord été onde, perturbation puis dépression, avant de devenir tempête.

Dans les contrées cycloniques, les hommes se sont dotés de mécanismes d’alerte (de la classe 1 à la 4, alertes jaune, orange, rouge, puis violette) invitant la population à prendre les  bonnes dispositions, à mesure que le cyclone prend de l’ampleur. À chaque stade, correspond une liste des consignes à respecter, d’autant plus  vigilantes que le niveau d’alerte est élevé. N’attendons pas que notre conflit soit passé en alerte de classe 4 pour nous donner les moyens de bien le gérer. Faisons le nécessaire dès le bulletin météo « alerte de classe 1 » !

Les ressources existent, l’investissement en vaut la peine, le temps et l’argent.

Texte et illustration extraits de Chomé Étienne, La méthode C-R-I-T-E-R-E pour mieux gérer nos conflits, Presses universitaires de Louvain, 2009, p. 39.

Les policiers gardiens de la paix dans une « École de guerre » ?

Emmanuel Macron qui avait martelé « nous sommes en guerre » il y a un an, a récemment annoncé la création d’une « École de guerre » à Montpellier pour la formation continue des policiers. Il fut suivi par le Ministre de l’Intérieur français, ce 10 mai 2021 : « La lutte contre le trafic de stupéfiants partout sur le territoire national s’apparente à une guerre, cette guerre nous la menons grâce à des soldats et ces soldats sont les policiers et les gendarmes de France ». Cette rhétorique guerrière cherche-t-elle à renforcer la force de frappe de la Force publique ?

Ma thèse de doctorat portait sur le défi de sortir de la violence. En voici un point crucial : les initiatives les plus à même de sortir de la violence sont d’un autre ordre que la violence, tant par leur point de départ que par leur finalité, tant par leur consistance que par leur esprit, tant par leur énergie que par leur intention. Ces initiatives vont éteindre les feux de la violence précisément parce qu’elles ne contiennent pas en elles-mêmes de produits inflammables violents.

Une déclaration d’état de guerre en temps de paix est source de confusions : les normes éthiques ne sont pas les mêmes en temps de paix et en temps de guerre. Cette déclaration est pire encore si elle sert à excuser plus de violences répressives : elle nourrit alors une escalade va-t-en-guerre, elle est alors du côté du problème et non de la solution. Les policiers n’ont pas vocation de va-t-en-guerre mais de gardien de la paix.

Ci-dessous : l’illustration de ‘se tirer une balle dans le pied’ à l’envers.

Le bruit des bottes après le silence des pantoufles

« La paix se gagne pas à pas, bien avant que ne retentissent les tambours de mobilisation. Il y a pire que le bruit des bottes : le silence des pantoufles car c’est celui-ci qui rend celui-là un jour irrémédiable. Les chrétiens sont régulièrement invités à « tout donner comme le Christ  ». Qu’est-ce que cela signifie en matière de guerre et paix ? Sommes-nous capables de nous sacrifier pour la paix comme nos arrières grands-parents se sont sacrifiés pour la guerre  ? Sommes-nous prêts à mettre le prix ?

Le Pape François souligne que l’indifférence de l’humanité à l’égard des problèmes de notre temps est l’une des menaces principales contre la paix dans le monde : « Gagne sur l’indifférence et remporte la paix » (Journée mondiale de la paix, 1er janvier 2016). L’indifférence ne peut être vaincue qu’en faisant face ensemble à ce défi. La paix est une conquête, nous dit le Pape François. Un tel bien ne s’obtient pas sans plusieurs choix lucides et courageux aujourd’hui. L’essentiel d’une bonne gestion des conflits se joue en amont de la violence : c’est aujourd’hui que nous sommes en train de perdre ou de gagner la paix de demain. Résister à la violence, c’est travailler à ne pas lui laisser le champ libre, alors même que nous disposons de nombreuses marges de manœuvre » (Chomé Étienne, La non-violence évangélique et le défi de la sortie de la violence, p. 300).

Tapoter sur nos oeillères idéologiques qui font voir la violence politique comme incontournable

« Napoléon, dans ses conquêtes, ne s’est jamais véritablement
préoccupé des pertes humaines. […] Nous avons ensuite, et
depuis lors, placé la valeur de la vie humaine plus haut que tout.
De l’Empire, nous avons renoncé au pire.
De l’empereur, nous avons embelli le meilleur » (Emmanuel Macron « commémorant » Napoléon Bonaparte, à l’Institut de France, 5/5/21).

Le discours écrit de l’Élysée prévoyait la formule : « De l’empereur, nous avons embelli nos meilleurs », ce qui est très différent du prononcé de Macron, parlant d’embellir le meilleur de l’empereur (hélas, le prononcé a, seul, autorité ; point l’écrit). Embellir nos meilleurs à nous, n’est-ce pas être lucide sur l’impasse de la logique de domination et de gloire à la racine même de la politique de Bonaparte ?

Comme tout civilisateur armé, Napoléon justifie ses propres violences de conquérant par ses projets de bâtisseur, qui répand les idées de la Révolution et débarrasse les peuples européens des tyrans qui les oppressent… En octobre 1813, il a refusé les bons services de Metternich, venu négocier une paix européenne raisonnable et durable, en lui rétorquant : « Votre Empereur et moi-même n’avons pas les mêmes contraintes. Il est l’héritier de ces familles qui se partagent l’Europe depuis des siècles. Vos maîtres peuvent se faire battre vingt fois et poursuivre tranquillement leur règne. Moi, je suis le fils de la fortune. Je ne suis que le Corse venu s’asseoir sur un de leurs trônes. Je ne puis m’y maintenir que par la force. Mon Empire est détruit si je cesse d’être redoutable » (Napoléon, Metternich, le commencement de la fin). Une course en avant, dont on connaît la fin avant même de commencer : implacable logique, chez bien des espèces animales, du mâle dominant qui s’impose par la force et qui est éliminé, aussitôt qu’il sera devenu âgé et moins fort qu’un autre…

Pour tapoter sur nos œillères idéologiques qui limitent nos regards et nous amènent à voir trop vite certaines violences comme incontournables voire même glorieuses, je cite Jean-Marie Muller qui poursuit le projet philosophique d’une délégitimation radicale de la violence, jusque dans les mots porteurs de l’idéologie de la violence nécessaire, légitime et honorable. Il s’attache à « déconstruire les mots justifiant la violence et, dans le même mouvement, inventer et créer les mots qui honorent la non-violence. Trouver les mots justes pour dénommer la violence, c’est déjà nous déprendre de son emprise. De même, trouver les mots justes pour dénommer la non-violence, c’est déjà lui ouvrir un espace où elle puisse exister. […] En réalité, l’opposé de la vérité, c’est l’erreur de la violence et déjà l’erreur de toute doctrine qui prétend justifier la violence, c’est-à-dire faire de la violence un droit de l’homme. Car la violence est déjà victorieuse, elle a déjà imposé son ordre dès lors qu’elle a obtenu la complicité intellectuelle de l’homme. […] Il ne suffit pas de juger la violence, il s’agit de la penser. Penser la violence, c’est dé-couvrir son inhumanité. Penser la violence, c’est la dis-qualifier, la dé-légitimer, la dis-créditer, la dé-considérer, la dés-honorer. Penser la violence, c’est comprendre qu’elle nie et renie les vertus qui fondent et structurent l’humanité de l’homme. Penser la violence, c’est la voir ir-respectueuse, ir-réfléchie, in-juste, in-digne, in-civile, im-morale, im-polie, in-intelligente, im-prudente, in-délicate, in-clémente, in-élégante, in-considérée, in-souciante, in-décente, in-correcte, in-conséquente, in-capable, in-apte, im-propre, in-convenable, in-opportune, in-congrue, in-cohérente, in-continente, in-disciplinée, in-docile, in-tempérante, in-contrôlable, in-gérable,   im-puissante, in-opérante, in-fructueuse, in-compétente, in-habile, in-salubre, in-efficace. ir-réaliste, in-tolérable, in-fréquentable, in-soutenable, in-supportable, in-tenable, in-vivable, in-acceptable, in-désirable, ir-recevable, in-admissible, in-défendable, in-justifiable, Penser la violence, pour chacune de ces raisons et pour beaucoup d’autres encore, c’est lui opposer un non catégorique. Connaître la vérité, c’est, face au scandale de la violence qui dé-figure le visage de l’homme, re-connaître l’évidence de la non-violence » (Muller Jean-Marie, Penser la violence, 2006).

Souplesse adaptative pas contre, plutôt avec

« La pratique du surf m’a appris à glisser sur la vague avec le plus de légèreté possible, en m’accommodant des événements plutôt qu’en essayant de les tordre. J’ai expérimenté que la résistance génère de la résistance et qu’il faut accepter la vague pour ne pas couler » (Priscille Déborah, la première Française bionique, surmontant l’amputation des 2 jambes et du bras droit en 2006, dans Une vie à inventer, p. 92, paru le 21/4/21).

Membre de la grande famille, citoyen de la grande patrie

Dans l’accouchement de la démocratie, on commença par couper le cordon ombilical avec la tribu-Matrie (liens sacrés). Les humains devinrent alors les enfants de la cité-Patrie (Nation séculière). Puis, ils passèrent par l’acné juvénile du patriotisme nationaliste va-t’en-guerre. Puis, ils se mirent à étendre la patrie à l’ensemble du genre humain. Ce sont les Grecs qui ont coupé le cordon ombilical, avec leur idée que la démocratie passe par un dépassement de liens claniques et tribaux, lesquels nous enchaînent et nous empêchent de réussir la paix (Aristote, La Politique, Paris, Hermann Éditeur des Arts et des Lettres, Livre I, 1996, p. 1-27). Dans l’article La saine famille (Études, n° 418, février 2013, p. 161-172), Michel Serres montre comment, notamment par son option de célibat des clercs, l’Église catholique a bouleversé les fondements de la société traditionnelle, fondée sur les liens du sang, les tribus, les castes et les clans. Puis vinrent les pensées cosmopolites du XVIIIe siècle. « Chacun doit infiniment plus au genre humain, qui est la grande patrie, qu’à la patrie particulière dans laquelle il est né. […] La terre entière n’est qu’une seule patrie commune, où tous les hommes des divers peuples devraient vivre comme une seule famille. […] Toutes les guerres sont civiles, car c’est toujours l’homme qui répand son propre sang » (Fénelon, Dialogues des Morts). « Qu’est-ce que l’amour de la patrie ? Un composé d’amour-propre et de préjugés dont le bien de la société fait la plus grande des vertus.  Il est triste que souvent, pour être bon patriote, on soit l’ennemi du reste des hommes. […] Telle est donc la condition humaine, que souhaiter la grandeur de son pays, c’est souhaiter du mal à ses voisins. Celui qui voudrait que sa patrie ne fût jamais ni plus grande, ni plus petite, ni plus riche, ni plus pauvre, serait le citoyen de l’univers » (Voltaire). « Cette vertu supérieure à l’amour de la patrie, c’est l’amour de l’humanité » (Gabriel de Mably, toujours au XVIIIe siècle).  « Le patriotisme le plus parfait est celui qu’on possède quand on est si bien rempli des droits du genre humain qu’on les respecte vis-à-vis de tous les peuples du monde ».

La Deuxième Guerre mondiale provoqua une profonde bascule dans les esprits, rejetant le vers de Corneille, dans Horace : « Mourir pour le pays est un si digne sort, qu’on briguerait en foule une si belle mort. » « L’idée de patrie est liée à l’idée de guerre. Étant donné ce qu’est devenue la guerre dans le monde actuel, elle fait de la Patrie la force la plus immédiatement dangereuse qui circule au milieu de nous » (Andreu Pierre, Drieu témoin et visionnaire, Grasset, 1952, p. 160). Sur fond d’un antimilitarisme radical, les peuples européens rejetèrent alors des expressions comme le « peuple en armes » ou « la défense de la patrie ». 

Extrait de Chomé Étienne, Le nouveau paradigme de non-violence, p. 103.

Le bourbier militaire, une paix civile en l’air

Près de 20 ans d’intervention américaine en Afghanistan : plus de 160.000 Afghans tués, plus de 2.300 soldats US tués, plus de 1.000 milliards de dollars déboursés par l’État américain… Cf. Gilles Dorronsoro, Le gouvernement transnational de l’Afghanistan: Une si prévisible défaite.

Voici des prises de parole autorisées (que j’avais consignées dans Le nouveau paradigme de non-violence, p. 237) : Le 7 octobre 2001, en représailles aux attentats du 11 septembre 2001, « en attaquant l’Afghanistan pour en chasser les talibans, les experts du Pentagone estimaient que le conflit se terminerait au printemps 2002. On sait ce qu’il en est advenu » (Lemoine Maurice, Empire, stratèges et conflits, dans Le Monde diplomatique,  juin 2007, p. 28).

« En Afghanistan, deux ans après la « victoire », le pays est toujours aux mains des seigneurs de la guerre, inclus les Talibans ; la culture du pavot est florissante et les enrichit ; aucune région du pays n’est sécurisée; et le « terrorisme international » est toujours bien vivant. On ne l’éradiquera donc jamais en faisant la « guerre » » (Général d’armée Briquemont Francis, Irak – Afghanistan. La guerre asymétrique totale, dans La Libre Belgique, 5 septembre 2003).

Le 14 février 2003, un mois avant l’attaque américaine sur l’Irak, Dominique de Villepin prononce un discours à l’ONU pour dire l’opposition de la France : « L’option de la guerre peut apparaître a priori la plus rapide. Mais n’oublions pas qu’après avoir gagné la guerre, il faut construire la paix. » La France affirme alors que pour préserver l’unité de l’Irak, rétablir de manière durable la stabilité dans ce pays et cette région durement affectés par l’intrusion de la force, la stratégie la plus efficace est de concentrer toutes les pressions sur le désarmement efficace de l’Irak. « Au bout du compte, ce choix-là n’est-il pas le plus sûr et le plus rapide ? » Et dix ans plus tard, le 10 février 2013, alors que la France intervient militairement au Mali, de Villepin solda les échecs de la politique va-t-en-guerre des Américains et des Britanniques mais aussi des Français en Libye : « Tirons les leçons de la décennie des guerres perdues, en Afghanistan, en Irak, en Libye. Jamais ces guerres n’ont bâti un État  solide et démocratique. Au contraire, elles favorisent les séparatismes, les États faillis, la loi d’airain des milices armées. Jamais ces guerres n’ont permis de venir à bout de terroristes essaimant dans la région. Au contraire, elles légitiment les plus radicaux. Jamais ces guerres n’ont permis la paix régionale. Au contraire, l’intervention occidentale permet à chacun de se défausser de ses responsabilités. Pire encore, ces guerres sont un engrenage. Chacune crée les conditions de la suivante. Elles sont les batailles d’une seule et même guerre qui fait tache d’huile, de l’Irak vers la Libye et la Syrie, de la Libye vers le Mali en inondant le Sahara d’armes de contrebande » (de Villepin Dominique, Discours prononcé à l’ONU, 14 février 2003).

Voici le constat d’échec tiré par un autre général, Jean-René Bachelet : « La doctrine américaine d’intervention militaire est l’emploi préalable, massif et écrasant d’une puissance de feu destructrice, notamment aérienne. Mais les réponses des États-Unis d’Amérique, en situation de monopole hégémonique – au-delà de leur efficacité militaire de premier degré grâce à une écrasante supériorité, en particulier technologique –, sont tout aussi incapables de restaurer véritablement la paix, quand elles n’ajoutent pas au malheur des gens. L’Irak apparaît ainsi comme un cas d’école. On ne fait pas mieux en Afghanistan. À une moindre échelle, il en est de même du conflit israélo-palestinien » (Maîtriser la violence guerrière dans un monde globalisé, op. cit., p. 12).