« John Brown’s body lies mouldering in the grave. But his soul goes marching on » (= le corps de John Brown pourrit dans la tombe mais son âme va toujours de l’avant), Tel est le refrain du chant ‘John Brown’s Body’, qui touche dès ses premières notes le coeur et l’âme des Américains. Il les renvoie à leur lourd passé esclavagiste. John Brown est cet homme qui s’est avancé seul, à pas forcé, pour que soient libérés les esclaves. Résultat : on le pendit juste avant la Guerre de Sécession ! Il eut tort d’avoir raison trop tôt…
105 ans après son exécution expéditive, Martin Luther King le reprit dans son discours du 25 mars 1965, à la fin de la marche de Selma à Montgomery : « Our God is marching on » = « Notre Dieu poursuit sa route et va de l’avant » !
La Banque mondiale sort régulièrement ses statistiques, selon lesquelles la moitié de la population mondiale vit avec moins de 6 dollars par jour. Nous sommes habitués à entendre que près de quatre milliards d’humains peinent à satisfaire leurs besoins élémentaires.
« Que voulez-vous ? Le monde est ainsi ! » « Non, cher officier, le monde est ce que nous en faisons ! » (finale du film « Mission », sorti en 1986).
Bonne année 2024, bons choix de vie, bons engagements !
Impressionnant le haka de Hana-Rawhiti Maipi-Clarke, cette députée maorie de 21 ans, les yeux exorbités et le torse gonflé, pour prêter serment et appuyer son premier discours enflammé au parlement néozélandais. Son haka fut soutenu par des dizaines de Maoris dans les balcons. Ils veulent le maintien des droits des peuples autochtones, alors que le Premier Ministre veut abolir des lois qu’il juge rétrogrades et racistes car « encore fondées sur l’appartenance à un peuple particulier ».
Depuis 1905, les All Blacks néozélandais arrivent sur le terrain de rugby en excitant leur combativité à l’aide du célèbre rituel Haka, cette danse des Maoris – style gorille se frappant la poitrine – pour impressionner un maximum les adversaires.
Le mot ‘haka’ signifie littéralement ‘faire’ ; comme quoi, y a qu’à / yaka haka faire popo… (‘pó pó’ & ‘gōng gōng’ = grand-parents en langue hakka ; c’est en Chine et c’est une autre histoire ! ‘yaka awa’ = ‘viens ici’, en lingala ; encore une autre histoire !).
Quel est notre haka à nous ?
NB : Les Australiens, eux, ont leur « chant de combat des kangourous » : le « Wallee Mullara Choomooroo Tingal ». Et voilà que l’équipe des rugbymen français a adopté comme cri de ralliement le cri des spartiates mis en scène dans le film « 300 » de Z. Snyder.
« Noël c’est le moment où nous embrassons la vulnérabilité de Dieu » (Soeur Mary Leddy).
Voici une phrase pour le moins énigmatique et une injonction insolite : embrasser la vulnérabilité de Dieu ? Le besoin de protection et la vulnérabilité se manifestent le plus souvent dans des situations extrêmement brutales. Les images d’Ukraine, d’Israël/Palestine et de nombreux autres endroits du monde ne cessent de nous en faire prendre conscience. Le message que transportent ces images est que les victimes ont besoin de protection, de sécurité, ce qui se traduit au quotidien par des bombes, des chars, des obus, des murs et des frontières. Mais sommes-nous capables de voir autre chose, quand nous sommes confrontés à ces images ? Sommes-nous capables de percevoir cet autre message : cessez enfin de vouloir nous protéger par les armes qui provoquent tant de souffrance et de destruction et qui suscitent invariablement la riposte, violente elle aussi.
Des parents israéliens qui ont perdu un enfant dans des attentats terroristes du Hamas palestinien et des parents palestiniens dont les enfants ont été tués par des soldats israéliens expriment ensemble leur blessure morale, leur deuil. Ils ont fondé l’organisation Parents Circle. Leur message : mettez fin à la haine ! Elle ne fera pas revivre nos enfants. Notre responsabilité commune est de rompre ce cycle infernal de la violence et de la contre-violence !
Ce message-là, l’enfant dans la crèche nous le fait entendre. Regardez : voici un être humain, un petit enfant qui a besoin des autres. Protégez cet enfant, protégez chaque être humain et tout particulièrement ceux qui sont les plus faibles et les plus vulnérables.
La vulnérabilité de Dieu est l’antithèse des systèmes de sécurité militaires et de la course mondiale aux armements qui engloutit chaque année des sommes colossales et fait grimper toujours plus haut la spirale de la haine, des menaces, des attaques et de la vengeance. « En Jésus-Christ, Dieu s’est désarmé », dit la théologienne évangélique Dorothee Sölle.
C’est le grand défi que nous lance son existence marquée par la vulnérabilité : celui de prendre le risque de notre propre vulnérabilité. Celle-ci nous accompagnera tout au long de notre vie, malgré tous les systèmes de sécurité. Si nous acceptons de reconnaître notre commune vulnérabilité et notre besoin de protection, nous deviendrons de plus en plus responsables, non seulement envers nous-mêmes, mais aussi envers l’autre, l’étranger, et nous nous encouragerons mutuellement à coopérer plutôt qu’à nous affronter, à aller les uns vers les autres plutôt qu’à ériger des murs entre nous.
Je vous adresse toutes mes salutations, en ces temps si sombres, avec les paroles d’un choral de l’Oratorio de Noël de Jean-Sébastien Bach : Apparais, ô lumière du matin, Et laisse poindre le ciel ! Vous, les bergers, n’ayez pas peur, Car l’ange vous dit Que ce faible petit garçon Sera notre réconfort et notre joie, En plus il contraindra Satan Et apportera la paix – enfin ! Au nom du Conseil d’administration, Antje Heider-Rottwilm, présidente de Church and Peace https://www.church-and-peace.org/fr/2023/12/embrasser-la-vulnerabilite-de-dieu-a-noel/
« Stay woke! » : « restez éveillés ! » devant les inégalités sociales structurelles, dont les privilégiés ont si peu conscience, comme le chanta Erykah Badu en 2008 : « I stay woke » (« je reste vigilante, je reste lucide »).
« Le wokisme est cette tendance à interpréter l’ensemble du monde social à la lumière d’une conception communautarisée du monde et d’une division binaire un peu primaire : entre dominants et dominés, victimes et coupables. […] On nous reproche parfois de mettre tout et n’importe quoi sous ce terme, mais c’est parce que tout et n’importe quoi est utilisé par les promoteurs de ce courant. […] On est face à une forme de déréalisation du monde, une forme de dépolitisation — ou plutôt de surpolitisation — sur des enjeux symboliques qui s’accompagne d’une dépolitisation des enjeux réels » (Nathalie Heinich, Le wokisme serait-il un totalitarisme ?).
Wokisme : faire pression pour que Les dix petits nègres d’Agatha Christie soit rebaptisé. La dernière édition a pour titre : Ils étaient dix. Stay woke : oser parler dans le bus avec une personne qui vient de s’en prendre à une personne de couleur, avec mépris de ses origines…
Wokisme : rééditer Tintin au Congo avec une nouvelle couverture déracialisée (a été gommé le petit congolais aux lèvres exagérées). Stay woke : garder l’œuvre d’Hergé en l’état, tout en ajoutant une préface qui donne les bonnes clés de compréhension du contexte colonial et les ressources pour continuer la décolonisation de nos esprits et de nos coeurs…
« 90 % de l’argent que les Américains ont soi-disant donné à l’Ukraine, a été dépensé aux États-Unis, en allant dans les poches de leur propre complexe militaro-industriel. C’est ça, le secret de la guerre » (Alexandre Orlov, ancien ambassadeur russe en France, interviewé sur Europe 1 ce 10 décembre 2023).
« La crise en Ukraine n’a été qu’un prétexte pour imposer des sanctions à la Russie. Même sans la Crimée et l’Ukraine, les États-Unis et leurs alliés auraient inventé autre chose pour freiner les opportunités croissantes de la Russie » (Poutine lors d’un discours devant l’aréopage des chambres réunies du Parlement à Moscou, 3 décembre 2014).
Idéologies va-t’en-guerre respectives, déversées au sein de vos augustes aréopages respectifs, quand vous nous tenez sous votre emprise, comme il est difficile de faire arrêt sur image ?!…
Vrai ou faux ? La France partage une frontière avec les Pays-Bas. Ma réponse à la fin.
« Sérieusement, Monseigneur, le roi devrait un peu songer à faire son pré carré. Prêchez toujours la quadrature non pas du cercle mais du pré. C’est une belle et bonne chose que de pouvoir tenir son fait des deux mains » (Vauban, Lettre à Louvois, 1673). Pour gérer le territoire dans sa totalité depuis Versailles, Vauban va prier le roi de délaisser les forteresses à l’intérieur du royaume pour se concentrer sur la défense aux frontières et y construire une ceinture de fer.
À l’époque coloniale, assurer son pré carré pour la France, cela a été de conquérir des territoires aux quatre coins du globe.
À l’époque postcoloniale, elle a su conserver ses DROM-COM (Départements et Régions d’Outre-Mer et Collectivités d’Outre-Mer), anciennement dénommés DOM-TOM (Départements d’Outre-Mer et Territoires d’Outre-Mer), qui représentent une superficie terrestre de 120.369 km2 (552.528 km2 si on inclut la Terre Adélie en Antarctique) et une population supérieure à 3 millions d’habitants (soit un cinquième du territoire français et 4 % de la population française). Encore aujourd’hui, le pré carré est bien réel, avant même de parler de la diplomatie néocoloniale de la Françafrique : « Jacques Chirac écrit pour défendre notre pré carré africain… Profond malaise » (Libération, 4 février 1993).
« Remets ton épée à sa place ; car tous ceux qui prendront l’épée périront par l’épée » (Matthieu 26,52).
Vrai : c’est dans l’île antillaise de Saint-Martin que la France partage une frontière avec les Pays-Bas !
Dans mon livre Le nouveau paradigme de non-violence, je consacre 80 pages à la stratégie non-violente du faible au fort pour mettre fin à une injustice et à la stratégie non-violente du fort au faible pour mettre fin à une agression.
J’y soutiens que plus le rapport de forces est inégal, plus il est dans l’intérêt du faible de recourir à des moyens non-violents pour obtenir justice, en impliquant l’ensemble de la Communauté internationale. Et plus on regarde à long terme tous les effets de l’option armée, plus apparaît la pertinence d’un tel choix politique, tenant compte de tous les pièges de la violence qui engendre encore davantage de violences… Plus l’injustice est nette et la domination est abjecte, plus la pertinence d’une telle stratégie se comprend facilement à court terme.
Une telle pertinence peut se montrer même dans les cas ukrainiens et palestiniens. Les peuples ukrainien et palestinien ont besoin de leaders formés aux techniques non-violentes et de soutiens de la part d’acteurs aguerris dans ce domaine.
Pour Gandhi, choisir un chemin de non-violence, c’est fermement s’accrocher – s’agripper même – à la force de la Vérité. « La démarche fondamentale de Jean et Hildegard Goss-Mayr est d’aller trouver l’autre et désirer qu’à travers l’échange, la vérité se fasse. Dans une telle rencontre, il n’y a pas que mon interlocuteur et moi. Nous ne sommes pas seuls. Il y a entre nous deux la Vérité qui va faire son œuvre dans les consciences. Mon rôle à moi, c’est de dire la vérité avec courage, quoi que cela me coûte. Je ne la possède pas, elle ne m’appartient pas. Mais tu ne la possèdes pas davantage, elle ne t’appartient pas non plus. La vérité est comme un espace sacré entre nous deux et elle va nous faire faire un chemin ensemble qui part de nos vérités subjectives et qui aboutit à la « vérité de la situation », dépolarisée. L’épée est certes tranchante, le glaive de la vérité a lui aussi son tranchant ! En voici un exemple saisissant : alors que Mgr Romero hésitait à dénoncer les injustices dans son pays, Goss vient à lui en simplifiant tout, c’est-à-dire en allant à l’essentiel. Il dit : « Monseigneur, vous n’avez qu’une seule chose à faire, c’est de dire la vérité, simplement, que tout le monde connaît mais que personne n’ose dire, par peur d’être éliminé. Si vous dites la vérité, certes, vous serez tué, mais seulement après avoir dit la vérité. » Et c’est ce qui s’est passé » (Chomé Étienne, Jean Goss (1912-1991) et Hildegard Goss-Mayr, au service de la non-violence évangélique active : engagement, impact et influence, dans Actes du colloque du M.I.R., juin 2023).