Merci, pardon, s’il te plaît

De la manière de transformer nos grains de blé et de riz en paillettes d’or…
Les trésors les plus précieux sont d’une simplicité déconcertante, dont le rituel de coucher suivant. Vécu fidèlement, seul ou en couple ou en famille, pendant quelques minutes, il marque la nuit et colore toute la vie.
Nommer et exprimer de la manière la plus concrète et précise possible
a) 1 à 3 MERCI recueillant un bien bon de la journée,
b) PARDON pour un geste / une parole qui n’a pas fait du bien,
c) S’IL TE PLAÎT s’ouvrant avec attention et intention à l’advenue demain d’un bien bon…
Et le soir suivant, repartir de c).
Cette prière d’alliance honore simplement le précieux en nous…

« Le chariot s’arrêta là où je me tenais. Ton regard tomba sur moi et tu descendis avec un sourire. Je sentis que la chance de ma vie était enfin venue. Soudain, alors, tu tendis ta main droite et dis :
« Qu’as-tu à me donner ? »
Ah ! quel jeu royal était-ce là de tendre la main au mendiant pour mendier ! J’étais confus et demeurai perplexe ; enfin; de ma besace, je tirai lentement un tout petit grain de riz et te le donnai.
Mais combien fut grande ma surprise lorsque, à la fin du jour, vidant à terre mon sac, je trouvai un tout petit grain d’or parmi le tas des pauvres grains. Je pleurai amèrement alors et pensai : « Que n’ai-je eu le cœur de te donner mon tout ! » » (Rabindranath Tagore, L’Offrande lyrique).

Oser la vie

« Rire, c’est risquer de paraître idiot.

Pleurer, c’est risquer de paraître sentimental.

Aller vers quelqu’un, c’est risquer de s’engager.

Exposer ses sentiments, c’est risquer d’exposer son moi profond.

Présenter ses idées, ses rêves à la foule, c’est risquer de les perdre.

Aimer, c’est risquer de ne pas être aimé en retour.

Vivre, c’est risquer de mourir.

Espérer, c’est risquer de désespérer.

Essayer, c’est risquer d’échouer.

Mais il faut prendre des risques

car le plus grand danger de la vie,

c’est de ne rien risquer du tout.

Celui qui ne risque rien ne fait rien, n’a rien, n’est rien.

Il peut éviter la souffrance et la tristesse

mais il n’apprend rien, ne ressent rien,

ne peut ni changer ni se développer,

ne peut ni aimer ni vivre.

Enchaîné par sa certitude, il abandonne sa liberté »

(Soeur Emmanuelle).

Seul l’amour lève les incompréhensions…

« Les miracles ne sont pas en contradiction avec les lois de la nature, mais avec ce que nous savons de ces lois » (Saint Augustin).

« Il n’y a que l’amour qui nous rende à nous-mêmes » (Albert Camus).

« Ce court précepte t’est donné une fois pour toutes :
Aime et fais ce que tu veux.
Si tu te tais, tais-toi par amour.
Si tu parles, parle par amour.
Si tu corriges, corrige par amour.
Si tu pardonnes, pardonne par amour.
Aie au fond du cœur la racine de l’amour. 
De cette racine, rien ne peut sortir de mauvais »
(Saint Augustin).

Quand tu trottes dans ma tête nuit et jour, je ressasse et te voilà de retour !

« Ruminer, c’est réfléchir sans fin, sans efficacité. C’est réfléchir en rond. Et d’ailleurs, ce n’est même pas réfléchir, mais ressasser. C’est quitter le réel des difficultés pour le virtuel des inquiétudes et des regrets » (Christophe André).

« Tant que nous ne sommes pas en amour avec nous mêmes, nous sommes un danger pour les autres » (Christiane Singer).

La couleur de la vie… quand on en est bleu…

« Merci pour les roses, merci pour les épines » (Jean d’Ormesson).

« C’est quand la nuit est profonde que les étoiles brillent » (Winston Churchill).

« Nul ne peut atteindre l’aube sans passer par le chemin de la nuit » (Khalil Gibran).

Magnifique mise en images de la parabole des vases réparés par l’or :

Du bon usage des crises (2)

Extrait d’une conférence de Christiane Singer DU BON USAGE DES CRISES (suite et fin) : 

« Comment se joue la crise ? On pourrait utiliser ce mot de retournement, de renversement. Qu’est-ce qui se passe dans la crise ? Il se passe à peu près ceci qu’une voix s’adresse à vous, et vous dit : « Tu as construit une vie, oui bravo, eh bien détruis-la ; tu as construit une personnalité, formidable, bravo, détruis-la ; tu t’es battu, tu as été courageux, un courage extraordinaire, mais l’heure de la reddition est venue, à genoux ! ». Ou encore, comme pour Abraham : « Tu as mis un fils au monde, bravo, rends-le moi ! « . Tous ces moments de l’intolérable, de l’inacceptable, qui dans l’ordre des choses vécues, dans l’ordre de l’immédiat sont le scandale absolu ! Rends-moi ce que je t’ai donné ! Pour moi la plus extraordinaire histoire qui les symbolise toutes est celle de Job. J’adore cette histoire de Job, j’y reviens toujours. Job a été vraiment le serviteur de Dieu, l’homme de tous les succès. Une vie accomplie, entourée de richesse, de troupeaux de bœufs, ses femmes, ses fils, ses serviteurs, une richesse que Dieu bénie. Ce même homme, Job maudit, Job sur son tas d’immondices qui gratte ses ulcères, Job qui ne lâche pas prise, qui dit : « Je m’adresserai à Toi mon Dieu, jusqu’à ce que Tu m’expliques la raison qui me ferait accepter l’inacceptable, j’attends de Toi une réponse qui me convainque ». Et cette interrogation qui le pousse pendant des jours et des semaines et des mois, à ne pas lâcher prise et cette phrase qui est pour moi une des phrases les plus poignantes : « Pourquoi ne peux-Tu pas donner raison à l’homme contre Toi-même ? ».

Aussi longtemps que Job demande à Dieu de paraître devant lui, et de lui expliquer l’inexplicable, de lui dire la raison de toute cette horreur, de tout ce désespoir, de tout ce désastre d’une existence : « Viens ! Viens, je n’ai plus que la peau sur les os lui dit-il, viens, parle-moi ». Dieu ne vient pas, Dieu ne parle pas. Arrivent tous les amis, tous les copains, les thérapeutes, qui lui expliquent : « Écoute, je suis persuadé que tu as fait une erreur, écoute, réfléchis, souviens-toi ! » Mais Job ne les écoute pas, le brouhaha des voix dehors.

« Réponds-moi, réponds-moi ! » Et quand l’ami Elihu lui a dit : « Mais non, tu vas voir, Dieu ne répond pas ». À ce moment-là, Dieu répond, contre toute attente Dieu répond. Mais Dieu répond à côté de la question. Dieu n’évoque pas un seul instant toute la vie de Job détruite, tous ses espoirs anéantis, sa famille, tous ceux qu’il a aimés, Dieu parle du ciel et de la terre, des oiseaux et des arbres, Dieu parle de la mer, de l’océan et des plages. Dieu répond à côté. Et voilà que se passe l’inattendu. Job, loin d’être scandalisé par cette réponse, qui n’en est pas une dans l’ordre de la logique, voit subitement tout d’un autre lieu. L’entière création, d’un autre lieu, d’un lieu où tout le drame d’une être ne fait même pas un remous à la surface du créé. Un lieu de l’univers agrandi, et Job dit : « Mon Dieu, je ne te connaissais que par ouï-dire mais, maintenant, je t’ai vu ». Et Job est un autre homme. Et à partir de ce moment-là, par une ironie divine, tout lui est rendu, puisqu’il n’a plus besoin de rien. C’est au niveau de cette histoire de Job, que j’ai pour ma part rencontré le travail de Dürckheim. Dans une crise vraiment très profonde. Après avoir traversé une existence très préservée, très occupée à éviter les naufrages, toute cette adresse à passer entre les catastrophes, entre les blessures, et subitement, après quinze ans de mariage, l’arrivée d’une autre femme, l’arrivée dans une existence préservée d’un autre être qui, du jour au lendemain, détruit l’univers que vous vous étiez construit. Et la traversée, pendant deux ans, trois ans, de la solitude de l’abandon, dans un pays étranger, dans un village au bout du monde, et la rencontre du travail de Dürckheim et d’une remarquable femme, son élève, qui travaillait avec la voix. Alors que j’attendais d’elle qu’elle me donne la force de faire mes bagages, et de partir avec mes fils, elle m’a dit : « Tu restes là, assise au milieu du désastre, là. Tout le travail que j’ai fait par la suite avec le corps, avec la présence au monde, aux choses, cette leçon, non seulement d’accepter l’inacceptable, mais d’y entrer, d’y établir ses pénates, entrer dans le désastre, à l’intérieur, et y rester, y rester ! Non pas fuir, mais oser rester, à l’endroit où je suis interpellée, à cet endroit où tombent tous les masques, où tout ce que je n’aurais jamais pu croire s’avère être en moi, tous les démons, toute l’ombre. Les paroles éclatent et tous les démons déferlent dans la vie, la jalousie, l’envie de meurtre, l’autodestruction. Et je reste là et je regarde. Cette troisième voie est probablement le salut pour notre époque si torturée. Je m’explique : nous connaissons dans notre Occident deux voies quand nous sommes dans un état d’étouffement, d’étranglement ; l’une c’est le défoulement, c’est crier, c’est exprimer ce qui était jusqu’alors rentré. Il y a de nombreuses formes de thérapies sur ce modèle et c’est probablement, en son lieu et place, quelque chose de très précieux, pour faire déborder le trop plein. Mais au fond, toute l’industrie audiovisuelle, cinématographique, est fondée sur ce défoulement, cette espèce d’éclatement de toute l’horreur, de tout le désespoir rentré, qui en fait le prolonge et le multiplie à l’infini. L’autre réponse, c’est le refoulement : avaler des couleuvres, et devenir lentement ce nid de serpents sur deux pattes, avec tout ce que ces vipères et couleuvres avalées ont d’effet destructif sur le corps et l’âme. Et le troisième modèle qui nous vient d’Extrême-Orient et qu’incarnait Dürckheim : s’asseoir au milieu du désastre, et devenir témoin, réveiller en soi cet allié qui n’est autre que le noyau divin en nous. J’ai rencontré voilà quatre jours, en faisant une conférence à Vienne, une femme ; et c’est une belle histoire qu’elle m’a racontée qui exprime cela à la perfection. Elle me disait à la perte de son unique enfant, avoir été ravagée de larmes et de désespoir, et un jour, elle s’est placée devant un miroir et a regardé ce visage brûlé de larmes, et elle a dit : « Voilà le visage ravagé d’une femme qui a perdu son enfant unique », et à cet instant, dans cette fissure, cette seconde de non identification, où un être sort d’un millimètre de son désastre et le regarde, s’est engouffrée la grâce. Dans un instant, dans une espèce de joie indescriptible, elle a su : « Mais nous ne sommes pas séparés », et avec cette certitude, le déferlement d’une joie indescriptible qu’exprimait encore son visage. C’était une femme rayonnante de cette plénitude et de cette présence qu’engendre la traversée du désastre. Il existe, paraît-il, dans un maelström, un point où rien ne bouge. Se tenir là ! Ou encore, pour prendre une autre image : dans la roue d’un chariot emballé, il y a un point du moyeu qui ne bouge pas. Ce point, trouver ce point. Et si un seul instant, j’ai trouvé ce point, ma vie bascule, parce que la perspective est subitement celle de Job, cette perspective agrandie, de la grande vie derrière la petite vie, l’écroulement des paravents, l’écroulement des représentations, un instant, voir cette perspective agrandie. »

Merci, chère Christiane…

La lumière à l’intérieur

« Le soleil est parti, mais j’ai la lumière » (Kurt Cobain).

« Être heureux n’est pas un destin, mais une conquête pour ceux qui savent voyager dans leur propre être. Être heureux, c’est cesser d’être victime de problèmes et devenir acteur de ma propre histoire. C’est traverser des déserts hors de moi, mais pouvoir trouver une oasis au plus profond de mon âme. C’est remercier Dieu chaque matin pour le miracle de la vie. […] Puissiez-vous être un amoureux de la joie dans vos sources. Puissiez-vous être un ami de sagesse et de paix pendant vos hivers » (Pape François).

Un cadre strict : apparente prison, en fait porte d’entrée vers la libération

Le cadre-porteur libère ma liberté par ses limites contenantes :

« Les rives sont la chance du fleuve puisque, l’enserrant, elles l’empêchent de devenir marécage » (Comte de Bourbon-Busset).

« La rivière n’atteindrait jamais la mer si les berges ne la contraignaient » (Rabindranàth Tagore).

« Devant une toile immense dont il ne verrait pas les bords, tout peintre aussi génial fût-il baisserait les bras. C’est la restriction de la toile, sa limitation même qui exaltent ses pinceaux. La liberté vit de la puissance des limites. Elle est ce jeu ardent, cette immense respiration à l’intérieur des limites » (Christiane Singer). 

Dans la grâce de ce moment et de ce lieu, les éléments en putréfaction rejoignent doucement le flux de la vie, pour un bon nettoyage d’été

« Nous avons tendance à penser spontanément que ma liberté s’arrête là où commence celle des autres. Une telle vision banale des choses fait de chacun de nous des êtres dont la liberté serait fermée par celle d’autrui. Chacun poursuivrait dans un univers fermé des désirs, des rêves. Mais mes désirs rencontrent ceux d’autrui ; si deux êtres désirent le même terrain, la même place, la même femme…, il y a conflit. Le conflit que je peux avoir avec l’autre ne peut alors être résolu que grâce à l’intervention d’un tiers : un tiers impartial […]. Renversons le propos : ma liberté commence là où commence celle de l’autre. L’altérité est la porte de la liberté. L’accueil, l’acceptation de l’autre dans sa différence accroissent ma liberté plus qu’elles ne la diminuent. Mais ces termes d’accueil, d’acceptation, sont un peu éculés. Le terme qui convient est celui de reconnaissance » (Bernard Piettre, Altérité, 2015).

Je deviens libre de ce que je peux exprimer
et prisonnier de ce que je refoule.
Je deviens libre de ce que je peux accepter
et prisonnier de ce que je refuse.
Je deviens libre de ce que je peux donner
et prisonnier de ce que je possède.

« Ne te livre pas comme un paquet ficelé.
Ris avec tes cris; crie avec tes rires » (Henri Michaux).

L’indécence de la souffrance < > l’un des sens de l’amour

L’indécence de la souffrance qui conduit à la mort et

l’un des sens de l’amour qui sauve notre humanité.

Par son amour qui demeure au cœur de l’épreuve, qui traverse la souffrance de part en part, qui transfigure la mort et la colore d’un sens nouveau , le Christ a ouvert une porte que personne, jamais, ne pourra refermer.

C’est par cette petite porte qu’il nous attire encore,

pour vivre nos petites morts, et la grande aussi.