Passion

En ce Vendredi Saint :

Quel que soit le souci que ta jeunesse endure,
laisse-la s’élargir, cette sainte blessure,
que les séraphins noirs t’ont faite au fond du cœur.
Rien ne nous rend si grands qu’une grande douleur
mais, pour en être atteint, ne crois pas, ô poète,
que ta voix ici-bas doive rester muette.

Les plus désespérés sont les chants les plus beaux
et j’en sais d’immortels qui sont de purs sanglots.

Lorsque le pélican, lassé d’un long voyage,
dans les brouillards du soir, retourne à ses roseaux,
ses petits affamés courent sur le rivage,
en le voyant au loin s’abattre sur les eaux.

Déjà, croyant saisir et partager leur proie,
ils courent à leur père avec des cris de joie
en secouant leurs becs sur leurs goitres hideux.
Lui, gagnant à pas lent une roche élevée,
de son aile pendante abritant sa couvée,
pêcheur mélancolique, il regarde les cieux.

Le sang coule à longs flots de sa poitrine ouverte.
En vain, il a des mers fouillé la profondeur. 
L’océan était vide et la plage déserte.
Pour toute nourriture, il apporte son cœur.
Sombre et silencieux, étendu sur la pierre,
partageant à ses fils ses entrailles de père,
dans son amour sublime, il berce sa douleur.
Et, regardant couler sa sanglante mamelle,
sur son festin de mort, il s’affaisse et chancelle,
ivre de volupté, de tendresse et d’horreur.
Mais parfois, au milieu du divin sacrifice,
fatigué de mourir dans un trop long supplice,
il craint que ses enfants ne le laissent vivant.
Alors, il se soulève, ouvre son aile au vent,
et, se frappant le cœur avec un cri sauvage,
il pousse dans la nuit un si funèbre adieu,
que les oiseaux des mers désertent le rivage,
et que le voyageur attardé sur la plage,
sentant passer la mort, se recommande à Dieu.

Poète, c’est ainsi que font les grands poètes.
Ils laissent d’égayer ceux qui vivent un temps.
Mais les festins humains qu’ils servent à leurs fêtes
ressemblent la plupart à ceux des pélicans.
Quand ils parlent ainsi d’espérances trompées,
de tristesse et d’oubli, d’amour et de malheur,
ce n’est pas un concert à dilater le cœur.
Leurs déclamations sont comme des épées :
elles tracent dans l’air un cercle éblouissant.
Mais il y pend toujours quelque goutte de sang.

Alfred de Musset, Le Pélican, dans le recueil La Nuit de Mai, 1835).

Racine carrée

« Laisse les racines de l’amour pousser en toi, car de
ces racines ne peuvent fleurir que de bonnes choses »
(Augustin, Les Confessions).

« Les racines des mots sont-elles carrées ? »
(Eugène Ionesco, La leçon).

Pourquoi dit-on « racine carrée » ? L’aire d’un carré est la multiplication d’un côté par lui-même. Si nous connaissons l´aire, nous trouvons le côté par la racine carrée de l’aire, ça m’a tout l’air ! La racine carrée, c’est la racine / base du carré !

Un petit enfant peut le visualiser avec des cartons carrés. Il en met un sur la table : c’est le carré de 1. S’il en met 16, cela donne 4 cartons x 4 : les 4 cartons du côté de 16 montre la racine carrée de 16 !

Voici les sages près des fous

Quelques fleurs d’Omar Khayyam :

Quiconque arrose dans son coeur la plante de l’Amour
n’a pas un seul jour de sa vie qui soit inutile.

Rapide passe la mystérieuse caravane de la vie.
Que pas une respiration de tes jours ne soit sans joie. 

Personne ne peut passer derrière le rideau qui cache l’énigme.
Nul esprit ne sait ce qui vit sous les apparences.
Sauf au cœur de la terre, nous sommes sans asile…
Bois du vin ! Ignores-tu qu’à de tels discours il n’y a pas de fin ?

Cette poussière, cette ordure
Ces os épars étaient jadis
La forme lumineuse et pure
D’une femme aux blancheurs de lys.
Jetant des rayons de tendresse […]
Ce que vous êtes, nous l’étions ;
Vous serez ce que nous sommes.
Voici les sages près des fous ;
Plus de brunes ici, ni de blondes.
Vous qui passez, regardez-nous,
C’est le dénouement de ce monde.

Subjonc’Tiff

Voici un poème qui use et abuse
de l’imparfait du subjonctif :

« Oui, dès l’instant que je vous vis,
Beauté féroce, vous me plûtes ;
De l’amour qu’en vos yeux je pris,
Sur-le-champ vous vous aperçûtes ;
Mais de quel air froid vous reçûtes
Tous les soins que pour vous je pris !
Combien de soupirs je rendis !
De quelle cruauté vous fûtes !
Et quel profond dédain vous eûtes
Pour les vœux que je vous offris !
En vain je priai, je gémis :
Dans votre dureté vous sûtes
Mépriser tout ce que je fis.
Même un jour je vous écrivis
Un billet tendre que vous lûtes,
Et je ne sais comment vous pûtes
De sang-froid voir ce que j’y mis.
Ah ! fallait-il que je vous visse,
Fallait-il que vous me plussiez,
Qu’ingénument je vous le disse,
Qu’avec orgueil vous vous tussiez !
Fallait-il que je vous aimasse,
Que vous me désespérassiez,
Et qu’en vain je m’opiniâtrasse,
Et que je vous idolâtrasse
Pour que vous m’assassinassiez ! »
(Alphonse Allais, Complainte amoureuse).

NB : Alphonse Allais est l’expert des vers holorimes :

https://etiennechome.site/alphonse-allais-et-ses-vers-holorimes/ et

Le véritable amour ne possède pas, il se donne

« Une personne amoureuse devient généreuse, aime faire des cadeaux, écrit des lettres et des poèmes. Elle cesse de ne penser qu’à elle-même pour se projeter entièrement vers l’autre, que c’est beau ! Et si vous demandez à une personne amoureuse : « pour quel motif tu aimes ? », elle ne trouvera pas de réponse : à bien des égards, son amour est inconditionnel, sans aucune raison. Patience si cet amour si puissant, est aussi un peu « naïf » : l’amoureux ne connaît pas « vraiment » le visage de l’autre, il a tendance à l’idéaliser, il est prêt à faire des promesses dont il ne saisit pas immédiatement le poids… Ce « jardin » où se multiplient ces merveilles n’est pourtant pas à l’abri du Mal : il est souillé par le démon de la luxure, et ce vice est particulièrement odieux, pour au moins deux raisons. 1) Il dévaste les relations entre les personnes. Combien de relations qui avaient commencé dans les meilleures conditions se sont transformées en relations toxiques, de possession de l’autre, de manque de respect et du sens de limite ? Ce sont des amours où ‘la chasteté’ a fait défaut : une vertu qu’il ne faut pas confondre avec ‘l’abstinence sexuelle’ – la chasteté est « plus » que l’abstinence sexuelle –, elle doit plutôt être reliée avec la volonté de ne jamais « posséder » l’autre. Aimer, c’est respecter l’autre, rechercher son bonheur, cultiver l’empathie pour ses sentiments, se disposer à la connaissance d’un corps, d’une psychologie et d’une âme qui ne sont pas les nôtres et qui doivent être contemplés pour la beauté qu’ils portent. Aimer c’est cela, et c’est beau l’amour. 2) De tous les plaisirs humains, la sexualité a une voix puissante. Elle met en jeu tous les sens, elle habite à la fois le corps et la psyché, et c’est très beau, mais si elle n’est pas disciplinée avec patience, si elle n’est pas inscrite dans une relation et dans une histoire où deux individus la transforment en danse amoureuse, elle se transforme en une chaîne qui prive l’homme de sa liberté. Nous devons défendre l’amour, l’amour du cœur, de l’esprit, du corps, l’amour pur dans le don de soi, l’un à l’autre. Et c’est cela la beauté de la relation sexuelle. Gagner la bataille contre la luxure, contre la « chosification » de l’autre, peut être l’affaire de toute une vie. Mais le prix de cette bataille est absolument le plus important de tous, car il s’agit de préserver cette beauté que Dieu a inscrite dans sa création lorsqu’il a imaginé l’amour entre l’homme et la femme, qui n’est pas pour s’utiliser l’un, l’autre, mais pour s’aimer. Cette beauté qui nous fait croire que construire une histoire ensemble vaut mieux que partir à l’aventure – il y a tant de Don Juan ! –, cultiver la tendresse vaut mieux que céder au démon de la possession – le véritable amour ne possède pas, il se donne –, servir vaut mieux que conquérir. Car s’il n’y a pas d’amour, la vie est une triste solitude. Merci » (Pape François, extraits de l’Audience Générale du 17 janvier 2024, sur Th 4, 3-5).

ma lettre mal-être

Je t’écris un message, convaincu que tu as à l’entendre.
Une part de moi y crie ‘help, au secours, à moi’.
À vrai dire, c’est faute de trouver en moi
un Self leader, capable d’entendre ce cri.

Finalement, je ne t’enverrai pas ce message à toi ;
je prends un temps pour lui donner le droit d’être en moi,
et me laisser inspirer la petite initiative
qui me remet dans le flow de la Vie…
Et merci à Ouistiti (ma part jeu de mot), qui y contribue par ses acrobaties de branche en branche (qui me rebranchent à la vie).

L’amour avec mûres et sans mur

« Mais pourquoi fallait-il que le merle noir chante plus tôt que les autres ? Qu’il choisisse la lucarne de sa chambre pour perchoir ? À quatre heures du matin, Jean avait ouvert les yeux, expulsé du sommeil par le chant de l’oiseau – un instrument de torture pour l’homme épuisé. […] Jean avait tenté de se représenter le visage de sa cadette, Albane, d’en faire resurgir chaque détail, depuis le grand épi du front jusqu’au sillon des veines sur la tempe droite en passant par les yeux très grands, très noirs. L’image avait flotté un moment. Il s’était demandé s’il reconnaîtrait sa fille aujourd’hui et son cœur s’était emballé ; il avait compté les années, ça ferait bientôt quinze ans qu’elle était partie, ne laissant comme trace de son existence qu’une carte postale chaque année – quinze cartes rangées dans une boîte à cigares posée sur son bureau, entre un microscope et une encyclopédie entomologique. Quinze cartes de vœux envoyées des quatre coins du monde. Comme si la vie d’Albane s’était résumée à un conte de Noël. Il avait lâché le livre et l’image s’était dissoute. La nuit tremblait derrière la vitre. L’espace entre les rideaux laissait deviner la dérive de nuages floconneux qu’argentait la lune. Par les fentes du châssis, le vent sifflait et déposait sur la tête de Jean un coulis froid. Allongé sur le dos, il était resté immobile, à l’affût des sensations changeantes, tour à tour douces et cuisantes, qui sinuaient dans son corps. Quand elles étaient douces elles réveillaient une ardeur enfouie, comme une eau sourde remonterait en plein désert ; quand elles drainaient la douleur, c’était la peur qui suintait, attisée par le courant d’air nocturne et le souvenir du visage hâve, des yeux immenses de sa fille.
Albane, on l’avait interviewée la veille sur les ondes, il avait entendu sa voix. C’était une bourrasque, cette voix qui revenait du passé et surgissait à l’improviste sans s’annoncer. Il se souvenait de ses accents d’adoration lorsqu’elle était enfant, puis de son timbre rauque le jour où elle avait dit, bien plus tard, Quand vous serez morts, j’irai danser sur vos tombes. Il se demandait à quel moment la fêlure était apparue et l’anxiété oubliée revenait, glacée, une camisole d’inquiétude le figeait sur son lit. Albane était grande pourtant, désormais elle se débrouillait sûrement mieux que lui.
Le journaliste avait fouillé dans nos vies, quelques minutes seulement mais avec acharnement, pour satisfaire les auditeurs, qu’ils sachent comment on réussit, quel milieu et quel concours de circonstances engendrent le génie ou la chance ou les deux, comme si le travail et la ténacité n’y étaient pour rien – les recalés veulent croire qu’une fée se penche sur certains berceaux plutôt que sur d’autres. Jean s’était demandé si, avant de répondre, Albane avait jeté à l’homme le trait assassin de ses yeux noirs, comme avant, lorsque son regard disait à Jean : « Retire ta question, ta question est un mirage, je l’effacerai, je ne veux rien entendre et tu ne peux rien savoir ». Elle gardait les yeux levés vers lui, elle le défiait jusqu’à ce qu’il se détourne puis elle s’en allait et lui, rageur, la laissait s’éloigner en serrant les poings » (Emmanuelle Dourson, Si les dieux incendiaient le monde, 2021).

Se perdre dans trop de souple & ‘in’

« “Une existence sans conflit est une existence d’avare” (René Spitz, psychiatre). L’absence de conflits n’est pas un signe de bonne santé. Un couple qui ne se dispute jamais est souvent malade de ne plus rien avoir à se dire. Le dicton populaire le dit : “Un couple sans histoires est un couple qui n’a pas d’histoire”. Et l’absence de mauvaises herbes ne veut pas nécessairement dire la présence d’un froment à la tige droite, à l’épi lourd de grains. Un groupe est d’autant plus solide qu’il a appris à gérer ses divergences, pas à les éviter, ni à avancer comme des rails de chemin de fer : en parallèle, chacun sur son propre rail.

Le Père Léon (l’Abbé Pierre belge), fondateur de La Poudrière, une communauté de vie à Bruxelles proche d’Emmaüs, faisait remarquer : “Les relations humaines, ce ne sera pas facile. Il y aura des ennuis. Mais par ailleurs, combien de gens pour ne pas avoir d’ennuis, s’ennuient à mort !”. Une relation superficielle ou ennuyeuse est le prix que nous payons de notre manque de vérité. Il ne faut pas confondre désaccord et désamour.

“Si tu veux grandir, use-toi contre tes litiges, ils conduisent vers Dieu. C’est la seule route qui soit au monde” (Antoine de Saint-Exupéry, Citadelle).

La règle d’or de la communication est qu’au sein de notre groupe, chacun puisse dire ce qu’il vit mal à la bonne personne, 2) au bon endroit et 3) au bon moment. Pour autant que soit posé et garanti en son sein un cadre régulier et privilégié de dialogue, tout groupe dispose des ressources pour s’auto-réguler et régler ses problèmes » (Chomé Étienne, La méthode C-R-I-T-E-R-E pour mieux gérer nos conflits, Presses universitaires de Louvain, p. 31-33).

Éveil de la conscience & effusion de l’Amour

L’enregistrement de la conférence est disponible sur le lien suivant :

https://www.facebook.com/ICJMPageOfficielle/videos/1053206355709834

Chaque personne présente a été invitée à accueillir et à recueillir ses expériences spirituelles les plus lumineuses, en entendant celles que je présenterai, à partir de mes pratiques d’émergence du Self dans l’IFS (Internal Family System, Dick Schwarz) et d' »Intensif Qui suis-je ? » (Enlightenment Intensive process, Charles Berner).

Un chemin passionné et passionnant de reconnaissance de notre être véritable.
Bienvenue à cette conférence hors de l’ordinaire, ouverte à tous, quelles que soient notre religion et notre philosophie de vie…

Merci si vous avez l’élan de diffuser cette invitation !