Le bon négociateur fait mieux que de poser une offre forte, puis de concéder du terrain (le moins possible) jusqu’à accord. Le bon négociateur favorise l’émergence d’une énergie créatrice à travers laquelle, ensemble, nous optimisons l’accord, dans l’intention explicite d’augmenter les gains de chaque partie. Ce processus Win-Win est facilité par une intelligence collective qui oriente toutes les forces présentes vers cet objectif d’invention de solutions nouvelles, qui créent de la plus-value, qui augmentent le gâteau, au lieu de se battre dans son partage.
Dans ces perspectives, le propos suivant de Matthieu Ricard dans son livre Plaidoyer pour l’altruisme me semble manquer de pertinence à plus d’un titre : « Ayant remarqué que les deux délégations étaient composées exclusivement d’hommes, Hunt demanda : « pourquoi n’y a-t-il aucune femme dans votre groupe ? » On lui répondit : « parce qu’elles feraient des concessions. » Swanee Hunt se souvient d’avoir pensé à ce moment-là : « Eurêka ! Voilà pourquoi cette négociation, comme tant d’autres, n’aboutit pas ! » En effet, comment trouver une solution acceptable par les divers protagonistes sans faire des concessions mutuelles ? »
J’apprécie la finesse du commentaire d’Anne Francard (animatrice diffusant la méthode C-R-I-T-E-R-E) sur ce passage de Matthieu Ricard : « « Concessions mutuelles » ? Oui mais alors dans le sens étymologique du mot « concéder » : céder ensemble une part de notre espace afin qu’une solution qui ne sera ni la mienne, ni la tienne puisse y émerger dans une intelligence collective, berceau des idées novatrices ».
Pour plus de précisions sur les négociations menées sur des intérêts optimisés plutôt que sur des positions concédées, cf. mon livre La méthode C-R-I-T-E-R-E pour mieux gérer nos conflits, Presses universitaires de Louvain PUL, p. 260 à 296.
Schéma ci-dessous : le défi d’être à la fois 1) doux & empathique envers les personnes et sur le plan relationnel ET 2) battant et efficace quant au défi créatif de la négociation. Ne pas sacrifier la relation au bénéfice du gain ou l’inverse. Soigneusement distinguer les registres pour harmonieusement les articuler.