« Quelque explorateur de l’invisible arrive à capter la phrase de la sonate, à l’amener, du monde divin où il a accès, briller quelques instants au-dessus du nôtre. […] Il y avait là d’admirables idées que Swann n’avait pas distinguées à la première audition et qu’il percevait maintenant, comme si elles se fussent, dans le vestiaire de sa mémoire, débarrassées du déguisement uniforme de la nouveauté. Swann écoutait tous les thèmes épars qui entreraient dans la composition de la phrase, comme les prémisses dans la conclusion nécessaire, il assistait à sa genèse. « Ô audace aussi géniale peut-être, se disait-il, que celle d’un Lavoisier, d’un Ampère, l’audace d’un Vinteuil expérimentant, découvrant les lois secrètes d’une force inconnue, menant à travers l’inexploré, vers le seul but possible, l’attelage invisible auquel il se fie et qu’il n’apercevra jamais ! » Le beau dialogue que Swann entendit entre le piano et le violon au commencement du dernier morceau ! La suppression des mots humains, loin d’y laisser régner la fantaisie, comme on aurait pu croire, l’en avait éliminée ; jamais le langage parlé ne fut si inflexiblement nécessité, ne connut à ce point la pertinence des questions, l’évidence des réponses. D’abord le piano solitaire se plaignit, comme un oiseau abandonné de sa compagne ; le violon l’entendit, lui répondit comme d’un arbre voisin. C’était comme au commencement du monde, comme s’il n’y avait encore eu qu’eux deux sur la terre, ou plutôt dans ce monde fermé à tout le reste, construit par la logique d’un créateur et où ils ne seraient jamais que tous les deux : cette sonate. Est-ce un oiseau, est-ce l’âme incomplète encore de la petite phrase, est-ce une fée, invisible et gémissant, dont le piano ensuite redisait tendrement la plainte ? Ses cris étaient si soudains que le violoniste devait se précipiter sur son archet pour les recueillir. Merveilleux oiseau ! le violoniste semblait vouloir le charmer, l’apprivoiser, le capter. Déjà il avait passé dans son âme, déjà la petite phrase évoquée agitait comme celui d’un médium le corps vraiment possédé du violoniste. Swann savait qu’elle allait parler une fois encore. Et il s’était si bien dédoublé que l’attente de l’instant imminent où il allait se retrouver en face d’elle le secoua d’un de ces sanglots qu’un beau vers ou une triste nouvelle provoquent en nous, non pas quand nous sommes seuls, mais si nous les apprenons à des amis en qui nous nous apercevons comme un autre dont l’émotion probable les attendrit » (Marcel Proust, À la recherche du temps perdu. Du côté de chez Swann, p. 180).
Catégorie : Nourriture pour l’âme
Radis pas radin
« C’est une vérité subtile :
tout ce que tu aimes, tu l’es » (Rûmi).
Le radis est un bol d’énergie,
riche en vitamines B et C, en
zinc, phosphore et sodium,
particulièrement bon pour
l’organisme des séniors,
à portée de toutes
les bourses.
Qu’on se le dise !
Au paradis, on n’aura pas un radis
mais les amis de nos amis seront admis.
Au paradis, on n’aura que son bonheur.
Auparavant, on aura tout mis dans son coeur.
(Merci, l’amie Fanny)
Alliées plus qu’ennemies
Je viens de lire « À la mémoire de Thérèse qui a perdu son combat contre le cancer, à 85 ans ». « Perdre son combat contre… » ? Cette mise en mots ne correspond pas à la sagesse que la vie m’enseigne par rapport à la maladie et à la mort.
Voici ce qui sonne juste en moi, du point de vue biologique, puis psychique.
Dans la toute grande majorité des cas, les bactéries, virus et microbes (qui sont plus nombreux sur notre peau que les cellules humaines) cohabitent en symbiose et en collaboration avec notre organisme.
Plutôt que de lutter contre la maladie, la sagesse m’invite à l’écouter avec soin comme un utile signal d’alerte, en ce sens qu’à travers elle, s’expriment les membres de mon corps et de mon équipe intérieure, m’indiquant ce dont j’ai à prendre soin prioritairement, ici et maintenant. Pour aller plus loin, cf. mon post https://etiennechome.site/le-processus-naturel-de-guerison-devant-une-attaque-externe/
Et plutôt que de lutter contre la mort, la sagesse me prie d’accueillir le sens profond de ma vie et les étapes de mon pèlerinage sur le chemin de la Vie véritable.
J’ajoute, en outre, un point de vue biblique.
a) En Matthieu 5,38-39, le mot « contre » (ἀντί) est répété trois fois coup sur coup pour nous avertir du piège de « se battre contre ». À tous les niveaux, Jésus nous prie de sortir du piège mimétique de la violence. Et la violence commence déjà en ‘nous’-même, contre ce que ‘nous’ n’aimons pas en ‘nous’-même (il est intéressant d’accueillir ces 3 ‘nous’ différents…).
b) L’Apocalypse nous révèle qu’à la fin des temps, la bataille finale entre les Forces du Bien et du Mal sera aussi simple qu’un lever de soleil, dissipant les ténèbres, dans une totale asymétrie : la clarté du jour vient dissiper l’obscurité de la nuit. Il n’y aura aucune lutte contre mais bien l’avènement de la Vérité authentique. Pour en savoir plus à ce propos, cf. https://etiennechome.site/5387-2/.
Bonne fête d’Hanoucca, la fête juive des lumières (durant huit jours, chaque soir, chaque chaumière allume les lumières de Hanoucca).
Vivre un retour à soi, sentir à l’intérieur
Un pèlerin en chemin vers Compostelle, une petite corne tenue en bandoulière, s’arrête à chaque croisement pour prendre une large inspiration et faire alors résonner la corme devant lui. C’est sa manière originale de prendre la mesure des différents chemins qui s’offrent à lui et de vivre un retour à soi, pour sentir à l’intérieur, avant d’assumer le choix à prendre à l’extérieur : telle voie et non telle autre…
Deutéronome 30,15.19 : « Vois, je mets aujourd’hui devant toi ou bien la vie et le bonheur, ou bien la mort et le malheur. Je mets devant toi la vie ou la mort, la bénédiction ou la malédiction. Choisis donc la vie, pour que vous viviez, toi et ta descendance ».
Écouter, sentir et admirer
« Écouter ce que dit le vent quand il ne dit plus rien
mais reprend souffle et se souvient
d’avoir été si haletant après sa course
sa course de vent qui court après le vent
Que dit le vent quand il se tait ?
Que dit le silence du vent ?
Écouter ce que dit pluie
quand un instant elle fait halte
et cesse l’espace de trois mesures
de tambouriner ses doigts d’eau
sur le toit et sur les carreaux
Que dit la pluie quand elle se tait ?
Que dit le silence de la pluie ?
Écouter ce que dit la mésange
nonnette quand elle suspend ses roulades
et que son chant dans le matin clair
reste en filigrane dans l’air
Que dit l’oiseau quand il se tait ?
Que dit le silence de la mésange ?
Le silence dit que le silence écoute
couler la source du chant »
(Claude Roy).
ma lettre mal-être
Je t’écris un message, convaincu que tu as à l’entendre.
Une part de moi y crie ‘help, au secours, à moi’.
À vrai dire, c’est faute de trouver en moi
un Self leader, capable d’entendre ce cri.
Finalement, je ne t’enverrai pas ce message à toi ;
je prends un temps pour lui donner le droit d’être en moi,
et me laisser inspirer la petite initiative
qui me remet dans le flow de la Vie…
Et merci à Ouistiti (ma part jeu de mot), qui y contribue par ses acrobaties de branche en branche (qui me rebranchent à la vie).
Cou ci cou là
« Nous essayons de nous entourer d’un maximum de certitudes, mais vivre, c’est naviguer dans une mer d’incertitudes, à travers des îlots et des archipels de certitudes sur lesquels on se ravitaille… » (Edgar Morin).
« Avoir la foi, c’est monter la première marche, même quand on ne voit pas tout l’escalier » (Martin Luther King).
En Avent, en avant…
Solitude n’est pas isolement
« La solitude nous amène vers la plus simple Lumière : nous ne connaîtrons jamais d’autre perfection que celle du manque. Nous n’éprouverons jamais d’autre plénitude que celle du vide, et l’Amour qui nous dépouille de Tout est celui qui nous prodigue le plus » (Christian Bobin).
Guérir mes coupures d’avec les autres + l’isolement qui m’a été imposé. Par ailleurs, choyer la solitude que je choisis et que j’assume pour goûter à la sagesse qui se révèle et se découvre à l’intérieur de moi.
Révolution ecclésiologique requise pour une gouvernance davantage partagée
Dans l’image, devinez ce que c’est ? Ma réponse : voir tout en bas…
Indice : manger avec des baguettes et se soigner avec l’acuponcture !
Sous la houlette d’un pape qui cherche à décléricaliser l’Église, le synode sur la synodalité s’est ouvert à un nombre croissant de laïcs (dont 40 femmes), à la recherche ensemble de modes de gouvernance davantage partagée. Les Églises protestantes ont des expériences intéressantes à partager en la matière…
Cf. Ludovic Lado sj, Du synode des évêques au synode de l’Église : une révolution ecclésiologique ? (https://www.la-croix.com/debat/synode-eveques-synode-lEglise-revolution-ecclesiologique-2023-11-01-1201289031 ) & mon collègue Stijn Van den Bossche, La soutane, Satan du synode (https://www.cathobel.be/2023/11/la-soutane-satan-du-synode/).
Image : C’est une cathédrale en Chine !
Automne alité ? / Haute tonalité !
Haute tonalité !
« Je dirai la couleur du vent
dans les soleils chargés de novembre.
Je dirai l’odeur des nuages.
Je dirai le bruit des étoiles
et les feux changeants du silence.
Et vous direz que je suis fou
et je dirai que je vous aime.
Et vous vous en irez quand même.
Le vent perdra toute couleur
et le ciel n’aura plus d’odeur.
Vos silences feront la nuit,
les étoiles seront sans bruit.
Je serai seul et vous de même
et vous saurez que je vous aime,
que sans amour et sans folie,
on n’a que faire de la vie… »
(Gilles Vigneault, Bois de marée).