Fêtant ses cent ans, le MIR (Mouvement International de la Réconciliation) en France organise un colloque à Paris les 9 et 10 juin. Il m’a été demandé d’y prendre la parole à propos de « Jean Goss (1912-1991) et Hildegard Goss-Mayr, au service de la non-violence évangélique active : engagement, impact et influence ».
Extraits de Mgr Jacques Gaillot, Chers amis de Partenia :
« J’ai fait un rêve : celui de pouvoir accompagner les pauvres, les exclus, les pas grand-chose, sans avoir à m’expliquer, me justifier auprès des riches, des nantis.
Relever les gens laissés à terre ne suffit pas. La solidarité ne se limite pas à une soupe, un toit et une paire de souliers. La dignité humaine se nourrit de bien autre chose : ne plus être assisté, pouvoir se prendre en charge, être responsable de soi.
Vaste comme le monde, Partenia ne commence et ne s’arrête nulle part. Bien que ne l’ayant pas recherchée, c’est une destination qui me sied, c’est là ou je vais. »
R.I.P., cher évêque de ce diocèse qui ne commence et ne s’arrête nulle part !
« Jésus ne cherche pas à avoir la paix mais à faire la paix. Il n’est pas mort dans son lit, n’ayant pas démissionné de son témoignage à la Vérité, de cette « parole de vérité, puissance de Dieu, armes offensives et défensives de la justice » (2 Co 6,7). « Celui qui vit en vérité vient à la lumière et provoque l’hostilité de ceux qui sont dans les ténèbres » (Jn 3,19-21).
Jésus se bat pour la justice du Royaume qui vient, il regarde les enjeux au-delà des urgences immédiates. C’est par une stratégie de long terme qu’il a opéré une révolution sociale. Il a sapé les fondements même de la domination des uns sur les autres, de l’esclavage, de l’oppression politique et économique. Le ferment de l’évangile a mis quelques générations pour subvertir l’Empire romain mais il le fit ! Et il n’a pas fini d’enfanter un nouveau monde » (Chomé Étienne, Jésus est doux ET ferme ET pugnace. Qu’est-ce à dire ?, dans Paraboles, n° 80, septembre 2014, p. 9).
Pour lire l’article complet, qui montre qu’il n’est pas que pugnace, en même temps doux et ferme :
Robespierre fait guillotiner le poète André Chénier le 7 thermidor de l’an II (25 juillet 1794), juste avant que sa terreur / sad erreur soit arrêtée : Robespierre est guillotiné 3 jours après le poète, dont la vie est passée à un cheveu de la liberté (il avait un crâne très dégarni). Voici ce qu’il écrit, dans les heures avant de mourir, déplorant de faire partie des milliers de moutons qui bêlent :
Comme un dernier rayon, comme un dernier zéphyre Anime la fin d’un beau jour, Au pied de l’échafaud, j’essaye encor ma lyre. Peut-être est-ce bientôt mon tour. Peut-être avant que l’heure en cercle promenée Ait posé sur l’émail brillant, Dans les soixante pas où sa route est bornée, Son pied sonore et vigilant, Le sommeil du tombeau pressera ma paupière ! Avant que de ses deux moitiés, Ce vers que je commence ait atteint la dernière, Peut-être, en ces murs effrayés, Le messager de mort, noir recruteur des ombres, Escorté d’infâmes soldats, Remplira de mon nom ces longs corridors sombres.
Quand au mouton bêlant, la sombre boucherie Ouvre ses cavernes de mort, Pâtre, chiens et moutons, toute la bergerie Ne s’informe plus de son sort. Les enfants qui suivaient ses ébats dans la plaine, Les vierges aux belles couleurs Qui le baisaient en foule et, sur sa blanche laine, Entrelaçaient rubans et fleurs, Sans plus penser à lui, le mangent s’il est tendre. Dans cet abîme enseveli, J’ai le même destin. Je m’y devais attendre. Accoutumons-nous à l’oubli. Oubliés comme moi dans cet affreux repaire, Mille autres moutons, comme moi, Pendus aux crocs sanglants du charnier populaire, Seront servis au peuple-roi. Que pouvaient mes amis ? Oui, de leur main chérie Un mot, à travers les barreaux, Eût versé quelque baume en mon âme flétrie ; De l’or peut-être à mes bourreaux… Mais tout est précipice. Ils ont eu droit de vivre. Vivez, amis ; vivez contents. En dépit de Bavus, soyez lents à me suivre ; Peut-être en de plus heureux temps J’ai moi-même, à l’aspect des pleurs de l’infortune, Détourné mes regards distraits ; A mon tour aujourd’hui mon malheur importune. Vivez, amis ; vivez en paix.
Que promet l’avenir ? Quelle franchise auguste, De mâle constance et d’honneur Quels exemples sacrés, doux à l’âme du juste, Pour lui quelle ombre de bonheur, Quelle Thémis terrible aux têtes criminelles, Quels pleurs d’une noble pitié, Des antiques bienfaits quels souvenirs fidèles, Quels beaux échanges d’amitié Font digne de regrets l’habitacle des hommes ? La Peur blême et louche est leur dieu. Le désespoir !… le fer. Ah ! lâches que nous sommes, Tous, oui, tous. Adieu, terre, adieu. Vienne, vienne la mort ! Que la mort me délivre ! Ainsi donc mon coeur abattu Cède au poids de ses maux ? Non, non, puissé-je vivre ! Ma vie importe à la vertu ; Car l’honnête homme enfin, victime de l’outrage, Dans les cachots, près du cercueil, Relève plus altiers son front et son langage, Brillants d’un généreux orgueil. S’il est écrit aux cieux que jamais une épée N’étincellera dans mes mains, Dans l’encre et l’amertume une autre arme trempée Peut encor servir les humains. Justice, vérité, si ma bouche sincère, Si mes pensers les plus secrets Ne froncèrent jamais votre sourcil sévère, Et si les infâmes progrès, Si la risée atroce ou (plus atroce injure !) L’encens de hideux scélérats Ont pénétré vos coeurs d’une longue blessure, Sauvez-moi ; conservez un bras Qui lance votre foudre, un amant qui vous venge. Mourir sans vider mon carquois ! Sans percer, sans fouler, sans pétrir dans leur fange Ces bourreaux barbouilleurs de lois, Ces tyrans effrontés de la France asservie, Égorgée !… Ô mon cher trésor, Ô ma plume ! Fiel, bile, horreur, dieux de ma vie ! Par vous seuls je respire encor.
Quoi ! nul ne restera pour attendrir l’histoire Sur tant de justes massacrés ; Pour consoler leurs fils, leurs veuves, leur mémoire ; Pour que des brigands abhorrés Frémissent aux portraits noirs de leur ressemblance ; Pour descendre jusqu’aux enfers Chercher le triple fouet, le fouet de la vengeance, Déjà levé sur ces pervers ; Pour cracher sur leurs noms, pour chanter leur supplice ! Allons, étouffe tes clameurs ; Souffre, ô cœur gros de haine, affamé de justice. Toi, Vertu, pleure si je meurs.
Depuis le ive siècle, l’Évangile de la joue tendue a été unanimement reçu comme un appel à ne pas résister, à renoncer à ses droits propres, à supporter patiemment l’injustice. Depuis 70 ans, des groupes de chrétiens utilisant la non-violence en politique proposent une autre interprétation. « On vous a dit : Œil anti œil et dent anti dent. Moi, je dis : Ne vous anti-posez pas » (Mt 5, 38-39a) ; ἀντιστῆναι / antistènai est un terme militaire : se placer en face pour lutter, se dresser contre, s’opposer à, comme deux fronts d’armées se faisant face. Moi, je vous dis de ne pas jouer le jeu du méchant, de ne pas le laisser vous enfermer dans ce face-à-face. Moi, je vous dis de résister mais sans riposter, sans rendre coup pour coup, sans utiliser les mêmes armes que celui qui vous fait du mal. Suivent en Mt 5, 39b-41 trois exemples incisifs qui mélangent subtilement bon droit et abus de pouvoir. À chaque fois, Jésus propose une initiative déroutante qui retourne le système injuste contre lui-même, ce qui a pour effet de le subvertir de l’intérieur. En bref, tendre la joue signifie pour le subalterne non pas laisser faire mais au contraire empêcher une deuxième gifle du même ordre (le revers de la main droite sur une joue droite désigne au temps de Jésus le soufflet qui rabaisse l’esclave à son rang). Devant un visage qui se tourne à droite, le supérieur est contraint pour gifler à nouveau, d’employer l’intérieur de sa main et non plus son revers ; sur le plan social, l’effet est de reconnaître l’inférieur comme son égal ; sur le plan religieux, l’effet – rédhibitoire – est de se rendre soi-même impur. Giflé pendant son procès devant Pilate, Jésus montre comment tendre l’autre joue (le mot employé est alloset noneteros) : il établit une altérité qui touche la conscience du soldat.
Laisser mon manteau, quand je suis un pauvre endetté poursuivi par l’huissier de justice me prenant tout jusqu’aux sous-vêtements, cela revient à me déposséder de la seule chose matérielle que l’on n’a pas le droit de me prendre et aussi à me retrouver nu : retournement de la honte, par lequel se retrouve soudain sur la sellette le riche sans scrupules, qui profite de son bon droit économique de créance.
Faire mille pas de plus au service d’un agent d’occupation qui profite de son bon droit politique de réquisition, c’est une manière originale de contester avec amour ce droit que s’arroge le colon, en opérant un retournement de situation : il peut être mis en tort d’avoir dépassé la borne (plantée tous les mille pas sur les ViaeRomanae) !
Cette interprétation honore le mouvement d’ensemble des « Vous avez entendu qu’il a été dit (aux Anciens)… . Or moi, je vous dis… » ; ce refrain rythme Mt 5, 21-48, avec six couplets, qui disent crescendo : la loi dit non à toutes les formes de violence, du plus proche au plus lointain, de celles que nous faisons subir aux autres (meurtre, mensonge, concupiscence) à celles que nous subissons des autres (5e et 6e antithèses). Jésus accomplit la loi, il la fait tenir debout à partir de sa racine, il l’établit définitivement selon son intention propre : « Il a été dit…, moi je donne le sens fondamental », à partir de la justice du Royaume du Père (ce sont les 3 mots récurrents et centraux de ce Sermon sur la montagne, en Mt 5, 6 et 7). Que nous soyons tous ses filles et fils, donc frères et sœurs, change radicalement nos relations… Les six antithèses / racines fonctionnent toutes selon le même mouvement : pas seulement le meurtre mais déjà les jugements diabolisant l’autre et les paroles de haine qui y conduisent. Pas seulement la finalité de la justice mais encore l’importance de choisir d’autres moyens que la violence. Non seulement un combat juste mais déjà les moyens d’une paix juste.
Au début de sa thèse sur la doctrine de la guerre juste (publiée en 1962), René Coste consacre quelques lignes à l’Évangile, juste le temps nécessaire à justifier qu’un tel amour oblatif nous parle du Royaume et qu’il n’est pas compétent pour cette problématique terre-à-terre. Il explique qu’en cette matière, seules les lumières du droit naturel éclairent. À l’opposé, à la même époque, Martin Luther King et d’autres pasteurs redonnent à l’Évangile un rôle central, en comprenant la non-violence évangélique comme un acte de résistance politique : la vie et la prédication de Jésus sont la source même de leur lutte non-violente pour faire tomber une injustice. Il est au fondement d’un cadre de pensée qui va bientôt engendrer une nouvelle théologie de la paix juste. Jésus n’a pas été un politicien et il refuse tout messianisme politico-religieux. Mais il ne fuit pas le conflit ; il crée même la confrontation. Il est assertif, franc et combatif. Le ferment de l’Évangile a mis quelques générations pour subvertir l’Empire romain mais il l’a révolutionné ! Car Jésus a sapé les fondements mêmes de la domination des uns sur les autres, de l’esclavage, de l’oppression politique et économique. En ce sens, Jésus résolument déterminé est plus révolutionnaire que les révolutionnaires » (Étienne Chomé, Vers une théologie de la paix juste, grâce aux nouvelles pratiques en gestion des conflits, dans Actes du colloque Paix des Églises : paix du monde ?, ISEO, Paris, 2023, p. 205-214).
Extraits du discours du Pape au Palais de la Nation congolais, ce 31 janvier 2023 :
« Chères femmes et chers hommes Congolais, votre pays est vraiment un diamant de la création; mais vous, vous tous, êtes infiniment plus précieux que toutes les choses bonnes qui sortent de ce sol fertile ! Déversez-y vos dons d’intelligence, de sagacité et d’assiduité. Courage, frère et sœur congolais, relève-toi, reprends dans tes mains, comme un diamant très pur, ce que tu es, ta dignité, ta vocation å garder en harmonie et en paix la maison que tu habites. Revis l’esprit de ton hymne national, en rêvant et en mettant en pratique ses paroles: Par le dur labeur, nous bâtirons un pays plus beau qu’avant, dans la paix.
Chers amis, les diamants, généralement rares, abondent ici. Si cela vaut pour les richesses matérielles cachées sous la terre, cela vaut à plus forte raison pour les richesses spirituelles enfermées dans vos cœurs. Et c’est précisément à partir des cœurs que la paix et le développement sont possibles car, avec l’aide de Dieu, les êtres humains sont capables de justice et de pardon, de concorde et de réconciliation, d’engagement et de persévérance pour mettre à profit les talents reçus.
Après le colonialisme politique, un « colonialisme économique » tout aussi asservissant s’est déchainé. Ce pays, largement pillé, ne parvient donc pas à profiter suffisamment de ses immenses ressources: on en est arrivé au paradoxe que les fruits de sa terre le rendent « étranger » à ses habitants. Le poison de la cupidité a ensanglanté ses diamants. C’est un drame devant lequel le monde économiquement plus avancé ferme souvent les yeux, les oreilles et la bouche. Retirez vos mains de la République Démocratique du Congo, retirez vos mains de l’Afrique ! Cessez d’étouffer l’Afrique : elle n’est pas une mine à exploiter ni une terre à dévaliser.
Une diplomatie de l’homme pour l’homme, des peuples pour les peuples, doit se déployer, selon laquelle les opportunités de croissance des personnes soient au centre, et non le contrôle des zones et des ressources, les visées d’expansion et l’augmentation des profits.
Une fois travaillé, la beauté du diamant. provient également de sa forme, de ses nombreuses facettes harmonieusement disposées. Ce pays, riche de son pluralisme typique, a lui aussi un caractère polyédrique. C’est une richesse qui doit être conservée, en évitant de glisser dans le tribalisme et la confrontation, en ne bloquant pas la nécessaire « chimie de l’ensemble ». À propos de chimie, il est intéressant de noter que les diamants sont constitués des seuls atomes de carbone, lesquels, s’ils étaient reliés différemment, formeraient du graphite. La différence entre la luminosité d’un diamant et l’obscurité du graphite provient de la manière dont les atomes individuels sont disposés dans le réseau cristallin. Cette métaphore exprime le fait que le problème n’est pas la nature des hommes ou des groupes ethniques et sociaux, mais la manière dont on décide d’être ensemble. La volonté ou non de se rencontrer, de se réconcilier et de recommencer fait la différence entre l’obscurité du conflit et un avenir lumineux de paix et de prospérité.
Chers amis, le Père céleste veut que nous sachions nous accueillir comme les frères et sœurs d’une même famille, et travailler à un avenir qui soit avec les autres et non contre les autres. « Bintu bantu »: c’est ainsi que l’un de vos proverbes rappelle très bien que, la vraie richesse, ce sont les personnes et les bonnes relations entre elles.
Le diamant, dans sa transparence, réfracte admirablement la lumière qu’il reçoit. Beaucoup d’entre vous brillent par le rôle qu’ils jouent. Celui qui détient des responsabilités civiles et gouvernementales est appelé à agir avec une clarté cristalline, en vivant la fonction reçue comme un moyen de servir la société. Le pouvoir n’a de sens en effet que s’il devient service. Combien il est important d’agir dans cet esprit, en fuyant l’autoritarisme, la recherche de gains faciles et la soif d’argent que l’apôtre Paul désigne comme la racine de tous les maux (1 Tm 6,10). Et en même temps, favoriser des élections libres, transparentes et crédibles; étendre davantage aux femmes, aux jeunes et aux groupes marginalisés, la participation aux processus de paix; rechercher le bien commun et la sécurité des personnes plutôt que les intérêts personnels ou de groupes; renforcer la présence de l’État partout sur le territoire. Que l’on ne se laisse pas manipuler, et moins encore acheter, par ceux qui veulent maintenir le pays dans la violence afin de l’exploiter et de faire des affaires honteuses: cela n’apporte que discrédit et honte, avec la mort et la misère. Au contraire, il est bon de se rapprocher des personnes pour se rendre compte de la manière dont ils vivent. Elles font confiance lorsqu’elles sentent que les gouvernants sont réellement proches, non pas par calcul ou par exhibition, mais par service.
Dans la société, ce sont souvent les ténèbres de l’injustice et de la corruption qui obscurcissent la lumière du bien. Il y a des siècles, saint Augustin, né sur ce continent, se demandait déjà: « Si la justice n’est pas respectée, que sont les États, sinon des bandes de voleurs ?. (De civ. Dei, IV, 4). Dieu est du côté de ceux qui ont faim et soif de justice (cf. Mt 5, 6). Il ne faut pas se lasser de promouvoir dans tous les domaines le droit et l’équité, en luttant contre l’impunité et la manipulation des lois et de l’information.
Un diamant sort de la terre authentique mais brut, nécessitant un travail. De même, les diamants les plus précieux de la terre congolaise que sont les enfants de cette nation doivent pouvoir bénéficier de véritables opportunités éducatives qui leur permettent de mettre pleinement à profit leurs brillants talents. L’éducation est fondamentale: elle est la voie de l’avenir, la route à emprunter pour atteindre la pleine liberté de ce pays comme du continent africain.
Le diamant, don de la terre, appelle à la sauvegarde de la création, à la protection de l’environnement.
Enfin, le diamant est le minéral d’origine naturelle qui présente la plus grande dureté. Sa résistance aux produits chimiques est très grande. La répétition continuelle des attaques violentes ainsi que les nombreuses situations de détresse pourraient affaiblir la résistance des Congolais, miner leur force d’âme, les conduire à se décourager et à s’enfermer dans la résignation. Mais, au nom du Christ qui est le Dieu de l’espérance, le Dieu de toute possibilité qui donne toujours la force de recommencer, au nom de la dignité et de la valeur des diamants les plus précieux de cette terre splendide que sont ses habitants, je voudrais inviter chacun à un nouveau départ social courageux et inclusif. »
Aujourd’hui, c’est jour férié à l’île Maurice, pour célébrer ensemble l’abolition de l’esclavage.
Les Mauriciens ont un rythme de fêtes familiales et sociales nul autre pareil (je le dis sur base de la cinquantaine de pays où je me suis déchainé ; merci à chaque peuple de m’avoir fait avancer sur ma conscience de mes propres chaînes, en fer / enfers qui commencent par des préjugés).
Leur grand danger : l’alcool… Bon jour férié, vou zot tou… Bonnes libérations !
« Si, comme le disent les colons, on ne peut cultiver les Antilles qu’avec des esclaves, il faut renoncer aux Antilles. La raison d’utilité de la servitude pour la conservation des colonies est de la politique de brigands. Une chose criminelle ne doit pas être nécessaire. Périssent les colonies, plutôt qu’un principe » (Victor Schoelcher en 1842).
La semaine dernière, sur base de prévisions météo annonçant des pluies torrentielles, le gouvernement de l’île Maurice avait donné congé aux élèves et fermé les écoles. Mieux vaut prévenir que guérir ! Comme les pluies n’étaient pas venues, les Autorités furent la risée de tous. À peine elles avaient ordonné la réouverture que l’île fut noyée sous des trombes d’eau (plusieurs mètres à absorber en peu de jours). Ayooo pas facile !
Voici l’histoire que font circuler entre eux les confinés inondés.
Il était une fois un roi qui voulait aller à la pêche. Il appelle son météorologue et lui demande l’évolution pour les heures suivantes. Celui-ci le rassure : pas de pluie prévue. Sur le chemin, il rencontre un paysan monté sur son âne qui, en voyant le roi, dit : « Seigneur mieux vaut que vous rebroussiez chemin car il va beaucoup pleuvoir dans peu de temps ! » Bien sûr, le roi continue en pensant : « Comment ce gueux peut-il mieux prévoir le temps que mon spécialiste diplômé, grassement payé, qui m’a indiqué le contraire ? Poursuivons… » Et c’est ce qu’il fait. Mais il se met bientôt à pleuvoir à torrents. Le roi rentre trempé, la reine se moque de le voir dans un si piteux état. Furieux, le roi congédie son météorologue, puis convoque le paysan en lui offrant le poste vacant… Mais le paysan refuse en ces termes : « Seigneur, je ne suis pas celui qui comprend quelque chose dans ces affaires de météo, mais je sais que si les oreilles de mon âne sont baissées, cela signifie qu’il va pleuvoir…! » Et le roi embauche l’âne… C’est ainsi que commença la coutume de recruter des ânes pour les postes de conseillers les mieux payés.
Ci-dessous le comique Vincent Duvergé. J’en ris depuis 2 jours sans m’arrêter, tant il montre bien le mood mauricien…
« La sortie de crise est très, très lointaine. Elle nécessiterait une stabilité militaire sur le terrain afin de permettre aux Ukrainiens d’être en position de force pour envisager de s’asseoir à la table des négociations » (Simon Schlegel, International Crisis Group).
« Nous voulons la paix et pas seulement un armistice qui ne sert qu’à réarmer. Une paix véritable est le fruit d’un dialogue, elle ne s’obtient pas par les armes, lesquelles ne vainquent pas la haine et la volonté de domination, qui réapparaîtront, peut-être d’une autre manière, mais elles réapparaîtront. Chacun doit travailler à démilitariser les cœurs, à commencer par le sien, et ensuite à désamorcer la violence, à désarmer. Nous devons tous être pacifistes. […] Le Saint-Siège essaie de construire un réseau de relations qui favorise un rapprochement entre les parties pour trouver des solutions. En outre, nous faisons tout ce que nous pouvons faire pour aider les prisonniers » (Pape François, interrogé sur la Russie et l’Ukraine dans une interview accordée au quotidien italien La Stampa mi-novembre 22).
Démilitariser l’écœure… Démilitariser les cœurs… Oser sortir des corps-à-corps pour en venir à des accords ! Aller des désaccords au chœur en passant par des cœur à cœur !
Voci des extraits de mon livre Le nouveau paradigme de non-violence, p 241-242 et p. 304-35 :
Le caractère inacceptable des horreurs de la guerre fait consensus. Ceci dit, pour ne pas les revivre, il ne suffit pas de « dessiner des pigeons et signer des appels », comme dit Gaston Bouthoul, dans sa Lettre ouverte aux pacifistes. Le défi est de mettre en place des alternatives crédibles de défense efficace nous permettant effectivement de désamorcer les violences. « Supprimer les guerres, c’est résoudre les conflits autrement que par l’usage des armes. Il s’agit donc bien d’imaginer d’autres moyens que les armes de la violence pour résoudre humainement les inévitables conflits humains » (Jean-Marie Muller, Vous avez dit : « Pacifisme ? »).
Traditionnellement, la défense se résumait à des dispositifs militaires. Avec l’essor de la résolution des conflits, une défense globale donne beaucoup plus de place à la défense civile citoyenne. La composante armée est insérée dans une mobilisation de toutes les forces économiques, sociales et culturelles. Traditionnellement, la doctrine de la guerre/paix juste stipule que « le dernier recours » de la violence n’est moralement autorisé qu’en cas d’échec durable des stratégies non-violentes. Mais quelle chance un pays donne-t-il à celles-ci lorsque plus de 99 % de son budget de défense est alloué à l’armée, largement dépendant du lobby militaro-industriel ? Dans divers pays, des citoyens osent faire objection de conscience précise : ils paient leurs impôts sauf +/- 2 % (l’équivalent de leur participation au budget militaire national), en expliquant à leur gouvernement leur refus de coopérer à sa politique militariste et en affectant ces +/- 2 % au financement d’expériences novatrices de défense civile citoyenne et des programmes de paix constructive. L’union fait la force : si une masse critique de citoyens bouge, toute la Nation bougera.
Les acteurs engagés dans des interventions civiles de paix revendiquent un statut d’acteurs à part entière dans les conflits de ce monde et dans la construction de la paix véritable, au moyen d’une politique multidimensionnelle, active et crédible, de promotion de la paix. Des statuts juridiques ont encore à être pensés pour ceux qui ne réclament pas un droit d’objection de conscience absolue mais qui contestent aussi l’obligation d’enrôlement militaire automatique sous les drapeaux. En 1994, les évêques américains disaient : « Le besoin se fait sentir de mieux définir les relations justes entre l’autorité de l’État et la conscience de l’individu sur les questions de la guerre et de la paix », invitant à réfléchir à « l’objection de conscience sélective » (Conférence épiscopale des États-Unis, Le fruit de la justice est semé dans la paix).
Bienheureux les leaders comme Gandhi montrant au plus grand nombre de leurs concitoyens comment prendre toute leur place dans la construction d’une paix juste.