« La violence commence « là où cède le langage ». En corollaire, elle peut donc finir là où il s’installe. Bruno Bettelheim souligne la fonction thérapeutique des contes de fées chez l’enfant angoissé et blessé par ses parents : le Roi et la Reine du récit incarnent leur part bonne, la marâtre, la sorcière et l’ogre, leur part méchante et frustrante. L’enfant est ainsi davantage capable de mettre des mots sur ses maux et faire la part entre le réel et le fantasme. Plusieurs études ont mis en évidence que la violence physique est inversement proportionnelle à la capacité de développer un discours intérieur. « Un jeune de banlieue qui dispose de 500 mots de vocabulaire au lieu des 3000 mots utilisés par un bachelier moyen, compense par du bruit et de la violence », explique un éducateur de jeunes. Paul Claudel avait dit : « Tout ce bruit en train de devenir une parole, c’est peut-être intéressant après tout ».
Les liens entre violence et déficit de langage ont été étudiés par le linguiste franco-algérien Alain Bentolila : la manipulation idéologique des groupes extrémistes qui prêchent la violence fonctionne chez des jeunes que ‘l’impuissance linguistique’ marginalise culturellement et socialement. L’alphabétisation est l’antidote de base incontournable : « Seuls les mots organisés apaisent une pensée sans cela chaotique et tumultueuse, qui se cogne aux parois d’un crâne jusqu’à l’insupportable et qui finit par exploser dans un acte incontrôlé de violence ». L’initiation au langage fait une brèche dans la violence grâce à des mots pour laisser une trace de soi-même sur l’intelligence des autres » (Chomé Étienne, Le nouveau paradigme de non-violence, p. 77).
« La poésie n’est pas que belle, elle est rebelle » (Julos Beaucarne).
« L’homme : Tel un lis des vallées entre les épines, ma grande amie entre les filles. La femme : Tel un pommier entre les arbres d’une forêt, mon bien-aimé entre les hommes. J’ai désiré son ombre et m’y suis assise. Et son fruit a été doux à mon palais. Il m’a menée dans la salle du festin. Et la bannière qu’il déploie sur moi, c’est l’AMOUR. Soutenez-moi par des gâteaux de raisins. Fortifiez-moi par un lit de pommes car je suis malade d’amour. Son bras gauche est sous ma tête et sa droite m’embrasse » (Cantique des Cantiques 2,1-6 : le livre biblique dans lequel une voix masculine et surtout une voix féminine s’entrelacent et se célèbrent mutuellement).
« Lorsque nous étions réunis à table et que la soupière fumait, maman disait parfois : – Cessez un instant de boire et de parler. Nous obéissions. – Regardez-vous, disait-elle doucement. Nous nous regardions sans comprendre, amusés. – C’est pour vous faire penser au bonheur, ajoutait-elle. Nous n’avions plus envie de rire. – Une maison chaude, du pain sur la nappe, des coudes qui se touchent, voilà le bonheur, répétait-elle à table. Puis, le repas reprenait tranquillement. Nous pensions au bonheur qui sortait des plats fumants et qui nous attendait dehors au soleil et nous étions heureux. Papa tournait la tête comme nous, pour voir le bonheur jusque dans le fond du corridor. En riant, parce qu’il se sentait visé, il disait à ma mère : – Pourquoi est-ce que tu nous y fais penser à c’ bonheur ? Elle répondait : – Pour qu’il reste avec nous le plus longtemps possible »
Elle s’est enfin éveillée pour prendre son élan. Elle en a eu assez de vivre sa vie à travers les yeux des autres. Elle a fait tomber tous les masques, et a commencé, doucement, à retirer les couches de ce qu’elle croyait être. Et elle a abandonné toute résistance.
Elle s’est alors relevée, nue, face au monde et a crié : “C’est ma vie ! et je suis maintenant libre d’être la femme que j’aurais toujours dû être !”.
Elle a commencé à voir sa vraie beauté à travers ses propres yeux. Elle n’était pas parfaite aux yeux des autres, et elle n’avait pas à l’être.
Elle aimait la femme qu’elle devenait. Elle ne s’est jamais retournée …
Et a continué à avancer avec une telle détermination … que rien ne pouvait l’arrêter.
Elle s’est parée d’Amour, de pardon … Elle a trouvé son courage …
Elle se sentait enfin chez elle … dans son Cœur et dans son Âme …
De mémoire de rose On n’a vu mourir un jardinier Si rien qu’une pause ne peut vous suffire Madame laissez Le temps s’est tiré sans le maudire Patientez Laissez-vous glisser dans le vent léger Patience, patientez…
Si l’amour s’envole ne t’en prends qu’à toi Tu as fui l’école pour le lit d’un roi Si sa voile blanche n’est plus que brouillard Te pends pas à la branche Dès qu’il fera noir Te pends pas à la branche Dès qu’il fera noir
Car… De mémoire de rose On n’a vu mourir un jardinier Si rien qu’une pause ne peut vous suffire Madame laissez Le temps s’est tiré sans le maudire Patientez Laissez-vous glisser dans le vent léger Patience, patientez…
Garde tout au fond tout au fond de toi Un vide un endroit Derrière les fêtes Ou poser la tête Dans le vent du soir Bercer ses vieux rêves Même s’il fait noir Bercer ses vieux rêves Même s’il fait noir
Car… De mémoire de rose On n’a vu mourir un jardinier
Si rien qu’une pause ne peut vous suffire Madame laissez le temps s’est tiré sans le maudire Patientez Laissez-vous glisser dans le vent léger Patience, patientez
Quand vous serez au milieu de la grande vie paysanne Au milieu d’un champ, dans les loin Ou au cœur d’une forêt en automne Vous comprendrez qu’il y a loin de vous au cœur du monde Qu’il y a loin de votre coupe aux lèvres de l’éternel Et vous écouterez bruire l’automne Et vous entendrez les feuilles tomber, de vos arbres intérieurs Vous entendrez la voix de la terre Et le présent vous sautera aux yeux Comme un écureuil qui plonge sur l’arbre de la vie Croyez en l’extase des nuages Qui traversent les grands horizons Au petit vent du soir Au cœur de l’été chaud Croyez à la douceur d’une amitié Ou d’un amour à la main qui serre votre main Car demain, mais n’y pensez pas Demain éclateront peut-être les nuages et l’orage emportera vos amours Tenez-les serrés Ne vous endormez pas sur un reproche non formulé Endormez-vous réconciliés Vivez le peu que vous vivez, dans la clarté.
« Vous m’en bouchez un coin » signifie « vous me rendez muet d’étonnement ». Exemple : « Et elle finit entre haut et bas sur une expression triviale que jamais la baronne n’avait entendue. […] « Ça vous en bouche un coin ». Oui c’est cela qu’elle avait dit » (François Mauriac, Le Sagouin, 1951).
Un sagouin est un ouistiti ou une personne sale, un enfant malpropre. Dans le roman de Mauriac, c’est d’abord un enfant, nommé Guillaume, mal aimé et rejeté par sa mère, qui finira par se suicider avec son père, lequel porte les mêmes blessures et souffrances.
Mauriac : la tragédie humaine à l’état brut, dans un récit bref, d’un rythme ascendant, sans concession à l’accessoire. L’action est intérieure, tout se déduit des sentiments, emmêlés dans le jeu des passions humaines…
Mauriac, romancier à la baguette magique, par « son verbe éblouissant, son style poétique, dont le frémissement laisse deviner l’âme sensible de l’homme, ses émois, ses déchirements et sa curiosité toujours anxieuse » (Sculfort).
« Le sort de nos vies est entrelacé sur plusieurs générations. Les êtres et leurs fragilités, par-delà les années, sont noués les uns aux autres par les chocs que leurs corps ont enregistrés. Sur plusieurs générations, une matière humaine modifiée, brassée par les exils, traverse des deuils et des naissances, des guerres et des crises. Elle s’attache des espoirs de vie meilleure et survit grâce à des secrets, des oublis, des camouflages.
Quand une génération s’est autorisée à n’être que tournée vers l’avenir, alors la nécessité de se retourner incombent à ceux qui suivent. Il y a plusieurs récits bibliques qui interdisent ce retour : lorsque Sodome est détruite, il ne faut pas se retourner, au risque d’être transformé en statue de sel = on est pétrifié, réifié. Parce que se retourner, c’est souvent regarder les morts. Quand on regarde trop la mort, la paralysie vient, on devient soi-même un gisant » (Camille de Toledo, Thésée, sa vie nouvelle, p. 250).
Fils sans père, Sartre revint sans fin à ce père absent et à son procès : « Quand les pères ont des projets, les fils ont des destins », dit-il à propos du père de Flaubert.
« L’amour-désir, qui nous fait brûler d’une joie majuscule et nous conduit à la vie haute, qui crée un halo de beauté et de lumière autour de l’être élu, l’amour-désir généreux, quand l’autre requiert toute notre sensuelle et amoureuse attention et que notre cerveau devient une sorte d’organe érotique, cet amour-désir est adressé. Par d’obscurs mécanismes, il élit un être — celui-ci et nul autre —, et de cet être il perçoit et goûte ce que je ne sais nommer que son « aura » : plus qu’un ensemble de traits de caractère, de goûts et d’opinions, l’aura est cette dimension où se cristallise la totalité d’un corps-esprit. C’est elle, parce qu’elle nous est secrètement connivente, qui peut susciter notre amour. L’amour-désir est reconnaissance et assomption de l’altérité. Il n’enlève rien à l’autre, ne le dépouille ni ne le diminue, et le plaisir réciproque lui confère une beauté supplémentaire : ce désir en acte est création commune, comme une danse partagée, une œuvre à quatre mains, deux voix, deux corps – un accroissement de l’être. En ce sens, il se distingue de la pulsion sexuelle solipsiste : celle-ci, qui émane de moi-même, m’y reconduit instantanément au terme de son déploiement. La pulsion existe : nous portons une disposition à la rencontre sexuelle qui, lorsqu’elle ne trouve pas satisfaction, nous fait éprouver un manque. Mais elle est peu de chose face au désir adressé. D’une nature différente, celui-ci est mouvement transitif, orienté vers un autre, élection et bienveillance – au sens le plus radical : je peux le choisir contre moi-même. Ce grand désir, qui inclut aussi bien l’attirance sensuelle et le jeu charnel que le sentiment d’amour et l’excitation intellectuelle, a donc une valeur altruiste : tourné vers l’autre et par lui commandé » (Belinda Cannone, Le nouveau nom de l’amour).
« L’amour-désir, qui nous fait brûler d’une joie majuscule et nous conduit à la vie haute, qui crée un halo de beauté et de lumière autour de l’être élu, l’amour-désir généreux, quand l’autre requiert toute notre sensuelle et amoureuse attention et que notre cerveau devient une sorte d’organe érotique, cet amour-désir est adressé. Par d’obscurs mécanismes, il élit un être — celui-ci et nul autre —, et de cet être il perçoit et goûte ce que je ne sais nommer que son « aura » : plus qu’un ensemble de traits de caractère, de goûts et d’opinions, l’aura est cette dimension où se cristallise la totalité d’un corps-esprit. C’est elle, parce qu’elle nous est secrètement connivente, qui peut susciter notre amour. L’amour-désir est reconnaissance et assomption de l’altérité. Il n’enlève rien à l’autre, ne le dépouille ni ne le diminue, et le plaisir réciproque lui confère une beauté supplémentaire : ce désir en acte est création commune, comme une danse partagée, une œuvre à quatre mains, deux voix, deux corps – un accroissement de l’être. En ce sens, il se distingue de la pulsion sexuelle solipsiste : celle-ci, qui émane de moi-même, m’y reconduit instantanément au terme de son déploiement. La pulsion existe : nous portons une disposition à la rencontre sexuelle qui, lorsqu’elle ne trouve pas satisfaction, nous fait éprouver un manque. Mais elle est peu de chose face au désir adressé. D’une nature différente, celui-ci est mouvement transitif, orienté vers un autre, élection et bienveillance – au sens le plus radical : je peux le choisir contre moi-même. Ce grand désir, qui inclut aussi bien l’attirance sensuelle et le jeu charnel que le sentiment d’amour et l’excitation intellectuelle, a donc une valeur altruiste : tourné vers l’autre et par lui commandé » (Belinda Cannone, Le nouveau nom de l’amour).
« Le désir est grave, et grâce : non pas anodin ou une chose parmi d’autre, il est surrection de l’être, ce cri jeté à la face delà mort, rencontre et reconnaissance de l’altérité, hommage. Je me contente de prendre mon plaisir avec toi : je te fis objet. Je te désir: je te fais roi » (Belinda Cannone, Petit éloge du désir).
Dans Le coût de la virilité, paru en mars 2021, l’historienne Lucile Peytavin aligne les statistiques françaises : 92 % des élèves sanctionnés pour des actes relevant d’atteinte aux biens et aux personnes au collège sont des garçons. Les hommes sont responsables de 97 % des violences sexuelles et 84 % des accidents de la route mortels. 90% des condamnations de justice concernent le genre masculin… Membre du Laboratoire de l’Égalité, Lucile Peytavin estime les milliards d’euros que coûte à l’État ces comportements asociaux et les gains à quitter l’idéologie culturelle d’une virilité qui s’affirme dans la domination.