Les petits actes, d’âme à âme

« Notre tâche n’est pas de réparer le monde entier d’un seul coup, mais de nous efforcer de réparer la partie du monde qui est à notre portée.

Toute petite chose calme qu’une âme peut faire pour aider une autre âme, pour aider une partie de ce pauvre monde souffrant, sera d’une aide immense.

Il ne nous est pas donné de savoir quels actes, ou par qui, feront basculer la masse critique vers un bien durable.

Ce qu’il faut pour un changement spectaculaire, c’est une accumulation d’actes, qui s’ajoutent, s’ajoutent, s’ajoutent encore…

L’une des actions les plus apaisantes et les plus puissantes que vous puissiez faire pour intervenir dans un monde orageux est de vous lever et de montrer votre âme »

(Clarissa Pinkola Estes).

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« L’amour n’est ni un conte de fées ni un livre. L’amour n’est ni une signature sur un papier ni ce qu’un couple se dit. L’amour est un arbre avec des branches allant bien au-delà du temps dans l’éternité, et des racines profondément ancrées dans la vie éternelle » (Rûmi).

« Après une journée de vent,
dans une paix infinie,
le soir se réconcilie
comme un docile amant.

Tout devient calme, clarté…
Mais à l’horizon s’étage,
éclairé et doré,
un beau bas-relief de nuages.

N’était-il pas, ce verger, tout entier,
ta robe claire, autour de tes épaules?
Et n’as-tu pas senti combien console
son doux gazon qui pliait sous ton pied?

Que de fois, au lieu de promenade,
il s’imposait en devenant tout grand.
Et c’était lui et l’heure qui s’évade
qui passaient par ton être hésitant.

Un livre parfois t’accompagnait…
Mais ton regard, hanté de concurrences,
au miroir de l’ombre poursuivait
un jeu changeant de lentes ressemblances »
(Rainer Maria Rilke, Verger).

L’art mûr passe l’armure

« Les œuvres d’art ont quelque chose d’infiniment solitaire, et rien n’est aussi peu capable de les atteindre que la critique. Seul l’amour peut les saisir, les tenir, et peut être équitable envers elles— c’est à vous mêmes, à ce que vous sentez, qu’il est bon de vous fier, contre toutes ces analyses, ces comptes rendus ou introductions. Quand bien même vous auriez tort, c’est la croissance naturelle de votre vie intérieure qui vous amènera lentement, avec le temps, à d’autres conceptions » (Rainer Maria Rilke, Lettres à un jeune poète).

De la vie à la mort à la Vie ?

« Nous devons nous y habituer : aux plus importantes croisées des chemins de notre vie, il n’y a pas de signalisation » (Ernest Hemingway).

« À Barjac, une plaque sur le mur du cimetière : « Passant, arrête-toi et prie, c’est ici la tombe des morts. Aujourd’hui pour moi, demain pour toi ».
[…] Elle résonne comme l’inscription des Romains à l’entrée de leurs cimetières : « Je fus ce que tu es, tu seras ce que je suis ».
[…] Voilà longtemps que je ne m’étais pas trouvé exactement tel que je le désirais : en mouvement. Je jouissais de me tenir debout dans la campagne et d’avancer sur ces chemins choisis. Noirs, lumineux, éclaircis. C’était la noble leçon de Mme Blixen devant le paysage de sa ferme africaine : « Je suis bien là, où je me dois d’être ». C’était la question cruciale de la vie. La plus simple et la plus négligée » (Sylvain Tesson, Sur les chemins noirs).

Bâtis pour divers gazouillis

« Chacun des deux sexes est, avec une égale dignité quoique de façon différente, image de la puissance et de la tendresse de Dieu. L’union de l’homme et de la femme dans le mariage est une manière d’imiter dans la chair la générosité et la fécondité du créateur. […] De cette union procède toutes les générations humaines » (CEC, § 2335).

« L’amour conjugal et l’amour familial comme tout amour, s’éprouvent et se construisent dans le temps. Souvent le meilleur et le pire sont mêlés : don et possession amour et haine, réconciliation et refus. La grâce du sacrement de mariage exerce son action à l’intérieur de l’amour humain et de ses fragilités, pour conformer cet amour à celui qui constitue toute la vie du Christ, et qu’il ne cesse de nous témoigner » (Évêques de France, Catéchisme pour Adultes, § 479).

Se confronter à d’autres façons de vivre vivifie

« Le jour entra dans la nuit comme une goutte de lait dans un café noir. […] La pluie ne s’arrêtait plus de tomber. Et la Seine de monter. Sur les berges, des roseraies de parapluies fleurissaient en accéléré. Ambiance défilé de mode en bottes de pluie. Tout le monde voulait voir le fleuve sortir de son lit. Oubliée, Notre-Dame. La nouvelle star, c’était la Seine ! […] Rien n’est plus sexy que le cerveau d’une fille avec de l’humour dedans. Les seins, les fesses, la bouche sont des amuse-gueules délicieux, mais le partenaire des longues aventures, c’est l’humour » (Mathias Malzieu, Une sirène à Paris).

« L’intolérance en prendrait un sacré coup si tout le monde avait la chance de voir autre chose que son pré bien trop carré. Se confronter à d’autres façons de vivre vivifie » (Mathias Malzieu, Journal d’un vampire en pyjama).

Lune de nos étoiles

« L’éclat de l’insaisissable dans la nuit dément la conception géométrale du monde. L’œil n’est plus le point-source de la vision ; c’est une coupe qui déborde, sous l’effet de la présence qui l’emplit. La lumière ne se propage plus en ligne droite ; elle se multiplie, dépourvue de l’unicité chère aux théoriciens médiévaux » (Baldine Saint Girons, Ach, daß ich Nacht wäre !, dans MÉTAMORPHOSE(S), sous la direction de Jackie Pigeaud, 2010).

« Le mouvement de la propagation de la lumière n’étant pour les médiévaux ni une « mutation » ou une altération de la matière, ni un changement local plus ou moins lent, est qualifié d’un terme spécial : il est une « multiplication ». La lumière est donc douée d’une propriété de diffusion par laquelle elle se multiplie instantanément dans toutes ses directions » (Edgar de Bruyne, Étude d’esthétique médiévale, 1946, p. 18).

« La grammaire, cette logique, n’admet pas de singulier pour les ténèbres. La nuit est une, les ténèbres sont plusieurs » (Victor Hugo, L’Homme qui rit, 1869).

Navet-heure d’été

« J’ai embrassé l’aube d’été. Rien ne bougeait encore au front des palais. L’eau était morte. Les camps d’ombres ne quittaient pas la route du bois. J’ai marché, réveillant les haleines vives et tièdes, et les pierreries regardèrent, et les ailes se levèrent sans bruit.

La première entreprise fut, dans le sentier déjà empli de frais et blêmes éclats, une fleur qui me dit son nom.

Je ris au wasserfall blond qui s’échevela à travers les sapins : à la cime argentée, je reconnus la déesse. Alors je levai un à un les voiles, dans l’allée, en agitant les bras, par la plaine où je l’ai dénoncée au coq.

À la grand’ville, elle fuyait parmi les clochers et les dômes. Et courant comme un mendiant sur les quais de marbre, je la chassais.

En haut de la route, près d’un bois de lauriers, je l’ai entourée avec ses voiles amassés, et j’ai senti un peu son immense corps. L’aube et l’enfant tombèrent au bas du bois.

Au réveil il était midi »

(Arthur Rimbaud, Aube, dans Illuminations). 

Fusils hors-la-loi + hors les coeurs

François Villon écrit la « Ballade des pendus »  en 1462, alors qu’il est condamné à la pendaison pour vols et meurtre :

Frères humains, qui après nous vivez,
n’ayez les cœurs contre nous endurcis.
Car, si pitié de nous pauvres avez,
Dieu en aura plus tôt de vous mercis.

Vous nous voyez ci attachés, cinq, six :
quant à la chair, que trop avons nourrie,
elle est piéça dévorée et pourrie.
Et nous, les os, devenons cendre et poudre.
De notre mal personne ne s’en rie.
Mais priez Dieu que tous nous veuille absoudre !

[…]

Prince Jésus, qui sur tous a maistrie,
garde qu’Enfer n’ait de nous seigneurie.
À lui, n’ayons que faire ne que soudre.
Hommes, ici n’a point de moquerie.
Mais priez Dieu que tous nous veuille absoudre !

Créateur du ciel et de la terre

« Tu fis la lune qui marque les temps
et le soleil qui connaît l’heure de son coucher » (psaume 103,19).

Ce psaume hébreu est inspiré d’un hymne égyptien au dieu soleil. Il en reprend plusieurs formulations, tout en en changeant complètement la portée : le soleil n’est pas Dieu ; il est sa créature, un luminaire qui lui rend gloire.

« En tant qu’enfant de Dieu, je sentis que tout ce que possède le Père céleste est mien. Je sentis que tout ce qui existe, est mien, mais je n’avais de cela aucun désir, car Dieu seul me suffit » (Faustine, Journal).

« L’homme est créé pour louer, honorer et servir Dieu, notre Seigneur, et, par ce moyen, sauver son âme. Et les autres choses qui sont sur la terre sont créées à cause de l’homme et pour l’aider dans la poursuite de la fin que Dieu lui a marquée en le créant. D’où il suit qu’il doit en faire usage autant qu’elles le conduisent vers sa fin, et qu’il doit s’en dégager autant qu’elles l’en détournent. Pour cela, il est nécessaire de nous rendre indifférents à l’égard de tous les objets créés, en tout ce qui est laissé au choix de notre libre arbitre et ne lui est pas défendu; en sorte que, de notre côté, nous ne voulions pas plus la santé que la maladie, les richesses que la pauvreté, l’honneur que le mépris, une longue vie qu’une vie courte, et ainsi de tout le reste ; désirant et choisissant uniquement ce qui nous conduit plus sûrement à la fin pour laquelle nous sommes créés » (Ignace de Loyola, Principe et Fondement, dans Exercices spirituels, n°23).