« Chaque jour je prends la route, n’importe quelle route, comme on ouvre un cahier neuf. J’écris un mot, je fais un pas. Au pas suivant j’attrape un autre mot, puis un autre. C’est sans fin une route, comme les mots qui laissent une trace de pas dans la clarté de la page. Si vous écrivez un premier mot, les pas vous emmènent dans un monde où les songes n’ont pas de fin » (René Frégni, Je me souviens de tous vos rêves).
« Je n’ai pas eu le temps d’écrire les premiers mots d’une lettre que je me récitais depuis des jours. Ces mots, on ne les cherche pas, ils éclatent en nous comme des orages » (René Frégni, L’été, p. 65).
Ici, dans la Région des Grands Lacs, comme ailleurs, il y a de tout dans les prédications haranguant les foules : du bon vin et du mauvais, des vieilles outres et des nouvelles…
« Un même oracle peut être trompeur ou divinement inspiré. Et, donc, le prophète qui le prononce peut être faux ou vrai, selon qu’il résonne dans tel ou tel contexte. […] La parole humaine est le lieu du mensonge ; c’est à cette condition qu’elle peut être aussi le lieu de la vérité. Un regard exercé au discernement y verra sans doute plus clair. Mais il ne dispensera pas de devoir prendre, ou non, le risque de faire sienne la parole entendue. Et, si oui, de vérifier en sa chair quels fruits elle porte. […] Dans le premier Testament, le vrai prophète est souvent un homme isolé dont la parole dérange au point que beaucoup préféreraient le voir réduit au silence » (André Wénin, Méfiez-vous des faux prophètes, dans Études, 2000/3, p. 351 à 360), qui s’appuie sur Pietro Bovati : le fait qu’il « voie » se profiler la menace de la mort avant qu’elle ne soit réellement visible aux yeux de la chair est dû à sa pénétration dans l’appréciation de la situation présente ; il est comme une sentinelle qui, de l’emplacement où elle se trouve, aperçoit un danger qui est encore loin, mais qui frappera sûrement si le cri d’alarme n’est pas entendu.
« Ne faites pas attention aux paroles des prophètes qui prophétisent pour vous, ils vous leurrent : vision de leur imagination, ce qu’ils disent ; cela ne vient pas de la bouche du Seigneur » (Jr 23,16). Premier critère : les révélations des faux prophètes n’ont d’autre source qu’eux-mêmes. Ils prétendent avoir eu des visions (Ez 13,6-7), ils ont des songes qu’ils prennent pour la réalité (Jr 14,14 ; 23,25-28), ils se croient et se disent inspirés (Ez 13,3 ; I R 22,19-23). Mais ce n’est pas par des visions, des songes ou des bouffées d’inspiration que le Seigneur communique sa parole à ses envoyés, disent les vrais prophètes. Et pourtant, Amos, Jérémie ou Zacharie ont eux-mêmes des visions (Am 7-8 ; Jr 1,11-14 ; Na 1,1 ; Za 1-6), tandis que Michée ou le Deutéro-Isaïe prétendent parler et agir sous l’emprise de l’Esprit de Dieu (Mi 3,8 ; Is 61,1).
« Ces prophètes ont égaré mon peuple en disant “Paix !”, alors qu’il n’y a point de paix » (Ez 13,10). Les faux prophètes préféreraient donc annoncer la paix et le bonheur (Jr 6,13-14 ; 14,13-15 ; Mi 3,11). Ils caressent ainsi le peuple et ses chefs dans le sens du poil, en leur adressant des paroles rassurantes qui leur évitent de devoir se mettre en question (Jr 28,15 ; Lm 2,14). Mais, ici aussi, le critère n’est pas dirimant. Bien des prophètes reconnus comme authentiques proclament également des messages de paix de la part de Dieu (Is 4,9-11 ; 43,14-21 ; Jr 31 ; Os 11,8-11 ; Am 9,11-15).
Je suis au Nord-Kivu, à l’est du Congo, dans cette forêt équatoriale féérique, luxuriante, géante, sans amiante, envoûtante, fascinante, pleine de plantes qui vous hantent, cher Dante !
J’anime une session sur D-I-A-P-O-S (méthode pour faire tomber une injustice sociétale) qui a super bien démarré avec 40 personnes : le groupe est très solide dont un député provincial et des responsables de la région, comme le président de la société civile. Les situations sont déchirantes puisqu’ici, à Béni & Butembo, n’importe qui peut être égorgé à tout moment, que ce soit dans son propre champ, dans sa maison en fin de nuit ou sur la route : le véhicule est pris en embuscade puis incendié, après que les passagers aient été tous égorgés et dépouillés. Le carnage se passe chaque jour, avec une grande multiplicité d’acteurs impliqués. Les pires des violences ne sont pas les plus criantes. Nous cherchons à aller au-delà des violences directes, visibles (les branches de l’arbre), en creusant sous le sol pour atteindre les racines cachées des injustices. Chacun de nos téléphones mobiles a été fabriqué avec un morceau de la richesse exceptionnelle du sous-sol d’ici et avec du sang humain. Nous sommes tous impliqués, tous responsables d’agir de manière responsable. Le combat contre une injustice se gagne grâce à une mobilisation générale des moyens et des personnes. L’union de la grande majorité qui se délivre de sa terreur / torpeur fait la force du groupe dans sa capacité à neutraliser la poignée de prédateurs. L’union fait la force. 21 juillet 2022 !
Alors que je passe la frontière vers l’Est-Congo aujourd’hui, j’apprends qu’il fait très chaud en Europe. Dans vos châles-heures d’été, je vous souhaite bon fleuve tranquille et belles danses, chères hip hop hautes âmes, jusqu’à plus soif !
Bons baisers du Rwanda, mon pays natal, au printemps éternel, au bon air et à la température idéale : ici, il fait ni trop chaud ni trop froid… Dans l’Akagera, en famille, nous y avons vu des dizaines et des dizaines d’hippopotames, jusqu’à plus soif.
Ci-dessous, des vers holorimes, quelques verres pour la soif !
« Je vais être comme un enfant qui vient de naître, qui ne connaît rien et qui découvre tout, celui-là je vais le protéger à l’intérieur de moi-même, il va peut-être m’amener vers un autre monde dans lequel je suis incapable d’aller parce que je connais trop de choses » (Luis Ansa).
« Pour rencontrer l’espérance, il faut être allé au-delà du désespoir. Quand on va jusqu’au bout de la nuit, on rencontre une autre aurore » (Georges Bernanos).
« Si vous voulez la lune, ne vous cachez pas la nuit venue. Si vous voulez une rose, ne vous écartez pas des épines. Si vous voulez l’amour, ne vous cachez pas de vous-même » (Rûmi).
« Toute famille tire sa cohérence d’un accord tacite sur la transmission de quelque chose qui n’est pas su » (Jean-Jacques Baranes).
« Le symptôme développé par un enfant peut s’envisager comme le témoin d’une transmission, mais aussi comme le témoin de la façon dont l’enfant, se débat avec l’héritage transmis. Par le symptôme, l’enfant répond aux attentes parentales en même temps qu’il les dénonce » (Albert Ciccone).
« Être, c’est être volé, trompé, abusé, oui, induit en erreur, pris au piège et ensuite bafoué et, malgré toutes ces avanies, regarder tout cela comme rien au fond de vous-mêmes, et sourire… Car vous savez qu’un printemps viendra s’épanouir dans votre jardin, danser dans les feuillages, qu’un automne viendra mûrir vos raisins, et vous savez que si une seule de vos fenêtres s’ouvre à l’est, vous ne serez jamais sans rien. Vous saurez aussi que tous qu’on appelle malfaiteurs, voleurs, escrocs et trompeurs sont vos frères dans le besoin » (Khalil Gibran).
« Si personne, jamais, ne nous avait touché, nous serions infirmes. Si personne, jamais, ne nous avait parlé, nous serions muets. Si personne, jamais, ne nous avait souri et regardé, nous serions aveugles. Si personne, jamais, ne nous avait aimé nous serions… Personne » (Paul Baudiquey).