En route vers Calcutta, Charles Baudelaire met pied à terre à l’île Maurice, le 9 juin 1841. Après une tempête continue de plus de cent heures au large du cap de Bonne Espérance, il n’ira pas plus loin : son navire compte de nombreuses avaries, dont un mât brisé. Son célèbre poème L’albatros vient de ce long temps de traversée, et bien d’autres vers comme : « Dans les caresses de ta chevelure, je retrouve les langueurs des longues heures passées sur un divan dans la chambre d’un beau navire » (Un hémisphère dans une chevelure).
Il décrit l’île Maurice ainsi : « parfum exotique, terre magnifique, éblouissante. Les musiques de la vie s’en détachent en un vague murmure. De ses côtes, riches en verdure de toutes sortes, s’exhale, jusqu’à plusieurs lieues, une délicieuse odeur de fleurs et de fruits. »
« Je vous donnerai un cœur nouveau, et je mettrai en vous un esprit nouveau. J’ôterai de votre corps le cœur de pierre, et je vous donnerai un cœur de chair » (Ézéchiel 36,26).
Comme il est bon d’inviter chaque part en moi à prendre un bon teatime pour ‘cause-causer’ ensemble. J’ai une attention particulière à mes parts qui semblent dans l’ombre de la force, porteuses de la puissance de l’ombre, comme celle qui se croit forte d’offrir un bouquet de fleurs, en tuant des pâquerettes… Rejoindre et reconnaître leur intention d’amour jusqu’à ce qu’elles se détendent et laissent l’Amour conduire notre temps de qualité…
Voilà Pâques : ça commence par un raid sanglant qui tue un homme, et cela finit par l’amour qui ressuscite le meilleur de nos forces !
« La plus belle chose qui puisse arriver à un être humain, c’est de découvrir ce feu sacré, le feu de son âme. Et de faire en sorte que sa vie entière soit l’expression de ce feu intérieur » (Annie Marquier).
Le livre des Proverbes (31,10-31) offre un poème en acrostiches (l’alphabet hébreu défile par la première lettre de chaque verset) : 10 Aleph — Une femme de valeur est une véritable trouvaille ! Sa valeur est plus grande que celle des perles. 11 Beth — Son mari peut lui faire confiance : il ne manquera pas de ressource. 12 Gimel — Elle fait son bonheur, et non pas sa ruine, tous les jours de sa vie. 13 Daleth — Elle sait choisir la laine et le lin, et ses mains travaillent volontiers. 14 Hé — Pareille aux navires marchands, elle est comme les navires marchands, faisant venir ses vivres de très loin. 15 Waw — Elle se lève avant le jour, prépare le repas de sa famille et distribue à ses servantes leur travail. 16 Zaïn — Après avoir bien réfléchi, elle achète un champ et plante une vigne grâce à l’argent qu’elle a gagné. 17 Heth — Elle rayonne de force et retrousse ses manches ! 18 Teth — Elle s’assure de la bonne marche des affaires, sa lampe ne s’éteint pas de la nuit. 19 Yod — Ses mains s’activent à filer la laine, ses doigts à tisser des vêtements. 20 Kaph — Ses doigts s’ouvrent en faveur du pauvre, elle tend la main au malheureux. 21 Lamed — Elle ne craint pas la neige pour sa maisonnée, car tous les siens ont des vêtements doublés. 22 Mem — Elle s’est fait des couvertures, des vêtements de pourpre et de lin fin. 23 Noun — Aux portes de la ville, on reconnaît son mari siégeant parmi les anciens du pays. 24 Samek — Elle confectionne des vêtements et les vend, elle livre des ceintures au marchand qui passe. 25 Aïn — La force et la dignité sont sa parure, elle sourit en pensant à l’avenir. 26 Pé — Elle s’exprime avec sagesse, elle sait donner des conseils avec bonté. 27 Çadé — Attentive à la marche de sa maison, elle ne mange pas le pain de l’oisiveté. 28 Qoph — Ses enfants viennent la féliciter. Son mari chante ses louanges. 29 Resh — « Bien des femmes se montrent de valeur, disent-ils, mais toi, tu les surpasses toutes ! » 30 Shine — Le charme est trompeur, la beauté est passagère ; seule une femme qui reconnaît l’autorité du Seigneur est digne d’éloges. 31 Taw — Que l’on récompense son travail ! Que l’on chante ses mérites aux portes de la ville !
Ce poème a été lu à si bon escient à l’enterrement de ma chère marraine, Monique Jamar. Ses funérailles ont été de bout en bout des moments de grâce pour moi. J’ai eu comme des flashs d’être bercé par elle. Elle a si bien pris soin de moi, tout-petit, elle et son mari, et ses 5 enfants, tous plus grands que moi, à une période où Maman n’allait pas bien (revenant seule avc moi du Rwanda pour se faire soigner, elle m’a déposé chez eux plus d’1 semaine. Je ne marchais pas encore).
A la fin de la messe, le curé congolais (un de mes anciens étudiants) a lancé : avant que la famille ne rende hommage à Monique, y a-t-il quelqu’un qui souhaite s’exprimer ? J’ai senti que j’avais à dire merci et je me suis levé sans réfléchir, sans rien avoir préparé…
Et j’ai dit, entre les larmes, qq ch comme :
Marraine, tu as été un des plus beaux cadeaux que j’ai reçu. J’étais tout petit et tu as pris soin de moi, en maman douce et délicate. À chacun de mes séjours dans la famille, où chacun.e m’a si bien accueilli, tu as été pour moi une maman qui m’a fait respirer des parfums de douceur que je n’avais jamais respirés ; tu m’as fait vivre des chants / champs d’amour que je n’avais jamais expérimentés. Dans ta manière de me bercer et de me chanter la vie, tu as été une maman si précieuse pour le tout-petit d’homme que j’étais. Tu m’as engendré à la vie, à la manière si simple et si sacrée de tes grâces. Merci, de toujours à toujours, ma reine.
« Ce vieux beau, ce parasite, ce geignard de Georges Girard rêvait d’être un héros de roman. Un Hercule Poirot. Un Sherlock Holmes. En plus jeune, bien sûr, plus attirant. Même un malfrat s’il le fallait. Mais alors un malfrat de classe. Un cambrioleur de génie. Un Arsène Lupin.
— Tu imagines, le titre en couverture : « Le Commissaire Georges mène l’enquête ! » Avoue que ça en jette ! Ça ne manque pas de panache !
Georges Girard prenait la pose devant la haute glace du salon en se caressant la barbiche avec des airs de fin limier… » (Corinne Hoex, Nos princes charmants, roman-nouvelles paru en mai 2023, qui parle de « femmes pour qui il n’est plus l’heure de se laisser faire par nos princes charmants ordinaires, modèles courants de mufles, rouleurs de mécaniques, coqs de basse-cour et goujats patentés », « prince charmant oisif et désœuvré, s’épaississant d’année en année sous ses chemises cintrées (p. 7), poète dans l’âme, surtout quand l’inspirait une jolie femme (p. 12), coiffé d’un panama, vêtu d’un bermuda à rayures et paré d’un vaste polo voué à dissimuler ses rondeurs de sédentaire (p. 18), attablé à poil devant sa langouste au milieu de la chambre, panse débordante, virilité blottie sur le velours du fauteuil, crâne répercuté de dos, de profil, de trois-quarts par le jeu des miroirs (p. 25). Des Marilou, il en a dans toutes les villes où il voyage pour ses affaires, à Zurich, Düsseldorf, Bratislava, Oslo (p. 26), ses manies de vieux garçon (p. 62). Et, de plus, ils les appellent ma poule, poussin, choupinette, mon petit chat… » ).
« Il y a une partie de chaque être vivant qui tend à devenir : le têtard en grenouille, la chrysalide en papillon, un être humain meurtri en un être entier. C’est cela la spiritualité » (Ellen Bass).
« Qu’est-ce que la vitesse sinon une course gagnée dont la solitude est le prix : semer ses semblables… » (Paul Morand, L’homme pressé, 1941).
« Qui va petit à petit arrive au terme de sa course » (Proverbe de la sagesse arabe).
« J’ai toujours vu dans le désert ceux qui avaient le moins de hâte arriver avant les plus pressés. Le cheval le plus rapide succombe souvent au milieu de sa course, et le chameau en marchant pas à pas arrive sûrement à terme de son voyage » (Mocharrafoddin Saadi, Le jardin des roses, XIIIe siècle).
Le Drôme : « action de courir, course » (du grec δρομος).
La Drôme : « courant, cours d’eau » (du latin Druma).
« Un jour, je partirai très loin sur la lagune, n’ayant pour avenir que le bout de la mer. Je marcherai longtemps, du soleil à la lune. Le bleu sera pour moi, couleur de l’Univers.
En laissant à l’esprit le temps et le silence, vers ce lieu où mes pas vont en catimini, l’espace et l’inconnu auront moins d’importance, l’horizon n’ayant plus l’attrait de l’infini. L’empreinte de mes pas, à la marée montante, sera vite effacée d’impossible retour. Ce n’est pas mon souci, n’étant pas en attente d’avoir compensation en retour d’un amour. Le temps n’importe plus dans ma brève existence. Je laisse à l’océan de compter les marées. Je m’abandonne ainsi avec impertinence car je n ‘ai plus envie de compter les années » (Chibani, Voyage vers le silence).
Courir des bordées = 1) en marine, louvoyer bord sur bord ; 2) s’absenter sans permission, et, de là, s’amuser à courir cabarets et mauvais lieux.
« J’ai le sentiment de ne pas vivre vraiment, mais seulement exister. Je porte en moi une sorte de nostalgie que je n’arrive pas à décrire, la nostalgie de quelque chose qui semble perdu. J’ai l’impression de m’être arrêtée quelque part, d’avoir une part de moi inachevée » (Sabine Kuegler, L’enfant de la jungle).
« Les chasseurs gravent sur leurs flèches des signes permettant de les identifier. C’étaient parfois de véritables œuvres d’art. Mais leur beauté ne les empêchait pas de faire beaucoup de mal » (idem).
Quand je réalise que je fais une même erreur à répétition, cela m’aide de penser à l’aiguille du tourne-disque de ma jeunesse : pour sortir du sillon où elle est coincée, elle a besoin d’un coup de main vers le haut, avant de retomber sur ses bons rails…
« Va jusqu’au bout de tes erreurs, au moins de quelques-unes, de façon à en bien pouvoir observer le type. Sinon, t’arrêtant à mi-chemin, tu iras toujours aveuglément reprenant le même genre d’erreurs, de bout en bout de ta vie, ce que certains appelleront ta « destinée ». L’ennemi, qui est ta structure, force-le à se découvrir. Si tu n’as pas pu gauchir ta destinée, tu n’auras été qu’un appartement loué » (Henri Michaux).