Confiance dans ce qui nous a suscités puis ressuscité

« Le christianisme, durant des siècles, a popularisé la foi en la résurrection de la chair. Mais, pour beaucoup aujourd’hui, cette foi résonne comme un déni de la raison. […] Alain Comte-Sponville nous avertit dans son livre L’esprit de l’athéisme : « Il n’y a pas à espérer au-delà de ce qui nous est possible. C’est l’amour, non l’espérance, qui fait vivre ». Et si nous changions de regard ? En fait, ce n’est pas la résurrection qui est incroyable. En réalité, l’étonnant, l’improbable, l’incroyable est déjà arrivé.  Il réside dans notre « surrection » elle-même, celle que nous éprouvons aujourd’hui dans notre existence relationnelle et désirante, plongés que nous sommes dans un univers fantastique que les sciences ne cessent de découvrir avec émerveillement depuis l’infiniment petit jusqu’à l’infiniment grand. Qu’il y ait quelque chose plutôt que rien, que nous soyons ainsi jetés dans l’existence est un mystère qui ne souffre pas d’explication. De ce point de vue, la perspective d’une résurrection n’est pas moins étonnante, n’est pas moins impossible ou incroyable que la vie elle-même qui nous est donnée aujourd’hui. Pourquoi moi, avec le corps qui est le mien, puissance de désir et de relation, serais-je rejeté dans le néant alors que j’en ai été tiré ?  Pourquoi la vie physique, une fois épuisée, ne serait-elle pas « relevée » de la même manière qu’elle a été suscitée. Au nom de quoi, par quel goût de mort, pourrions-nous prétendre, a priori que la vie suscitée en nous ne pourrait être ressuscitée à nouveau dans une nouvelle donation aussi étonnante que la première. L’étonnement d’exister que nous pourrions éprouver alors ne serait pas moindre que celui d’exister aujourd’hui. […]

La résurrection envisagée dans cette perspective n’invite pas à croire en  un autre monde qui doublerait le nôtre, qui serait comme un arrière-pays, inaccessible à nos sens. La question n’est pas de « croyance » en un autre monde caché derrière le nôtre, mais de « confiance » dans ce qui nous a suscités à l’existence, dans l’espérance que nous ne serons pas abandonnés dans le néant dont nous avons été tirés. En d’autres termes, la foi en la résurrection n’est pas autre chose que la confiance en la puissance qui nous tient en vie aujourd’hui. […]

Selon le témoignage des Évangiles, Jésus était un homme de désir animé, de part en part, par une confiance radicale en la puissance bienveillante qui engendre à la vie.  Il osait l’appeler et la prier familièrement en disant « Notre Père ». C’est d’ailleurs cette foi qui l’a conduit à adopter une manière d’être et à tenir des propos d’une nouveauté si radicale qu’elle réveillait la vie en chaque rencontre. Condamné injustement par les religieux de son temps, crucifié dans la plus extrême violence, fallait-il qu’il en restât là ? Fallait-il donc que les choses s’arrêtent là pour sceller définitivement la victoire du mal et de la mort ? À moins que la puissance de qui nous tenons la vie lui ait rendu justice et témoignage en le ressuscitant. C’est en tout cas le témoignage qui court à son propos. Pas de preuve. Juste une faille, une trouée, une trace, un tracé… Incroyable la résurrection ? En tout cas, il serait déraisonnable de n’en point garder l’espérance » (André Fossion).

Vieillir = renaître

« Janvier » vient de Janus, le dieu romain des  commencements et des fins, des choix, du passage et des portes. Comme une porte ouvre sur deux possibilités, Janus a deux visages : l’un tourné vers l’avant, l’autre vers l’arrière !

« Un homme âgé n’est qu’une chose misérable, à moins que son âme chante » (Frère Luc, moine trappiste de Tibhirine, chanté par Michael Lonsdale).

« Si un homme ne naît de nouveau,

il ne peut voir le Royaume de Dieu » (Jean 3,3).

« Tomorrow, from time’s belly, a new year will arise / Demain, du ventre du temps, surgira une année nouvelle » (Njabulo Ndebele).

Deuil

« Tu es parti et tu resteras toujours présent dans ma vie avec ce que tu m’as donné.

Rien, non rien ne peut altérer ce que nous avons vécu de beau ensemble.

Les relations sont comme des rêves : elles meurent seulement le jour où on les abandonne.

Tu es parti et tu habites pourtant ce que je suis devenue…

Et je garde au fond de mon cœur l’espérance de tes bras dans notre ultime rencontre » (auteure anonyme).

The lovers together for ever

« Ceux qui s‘aiment par l’Esprit ne cesseront jamais de s’aimer. […] Ainsi, le sentiment de l‘amour, au lieu de s’arrêter en eux et de s’y endormir, ne fait que s’accroître et embraser leur cœur d’une flamme nouvelle. Ils s’élèvent toujours en s‘aimant jusqu’à Dieu » (Antoine Blanc de Saint-Bonnet, De l’unité spirituelle, 1845).

L’heure de la mort = un crible qui retient l’essentiel

L’heure de la mort  tamise ce que tu as vécu.

 Ne traverse le portail que l’amour échangé.

C’est le temps de lâcher ce que tu as bloqué,

c’est le temps d’emporter ce que tu as donné.

surtout de découvrir ce que tu as reçu,

bien au-delà de ce que tu avais perçu.

« La mort est le plus grand de tous les maîtres.
Plus grand que toutes les philosophies.
Plus vrai que toutes les religions.
La mort nous dépouille des mensonges, des faux-semblants.
La mort se moque de notre ressentiment. Elle consume notre avidité, notre rancune et nos griefs. La mort nous invite à être complètement présents, à lâcher prise, à pardonner, à nous rejoindre, sans histoire.
La mort nous fait comprendre que seul l’amour compte, que seul l’amour fait que la vie vaut la peine d’être vécue, et que tout le reste est poussière.
La mort est un portail impitoyable. Les richesses du monde ne peuvent rien contre elle. La haine ne peut lui survivre. Seul l’amour peut le franchir. Nous retournons à notre Vraie Nature.  Le cycle est terminé » (Jeff Foster).

L’amor trompe la mort

« Quand vient la mort,
tel l’ours affamé en automne,
Quand vient la mort

et qu’elle puise dans sa bourse
toutes ses pièces étincelantes pour m’acheter
puis referme cette bourse d’un coup sec…

Je veux passer cette porte,
emplie de curiosité en me demandant :
à quoi donc va ressembler cette demeure d’obscurité ?

C’est pourquoi je regarde toutes choses
comme une fraternité et une communauté…
Je pense à chaque vie comme à une fleur aussi commune
qu’un champ de marguerites et aussi remarquable.
Chaque corps est un lion de courage,
quelque chose de précieux pour la Terre.

Quand ce sera la fin, je veux pouvoir dire :
toute ma vie j’ai été l’épouse mariée à la stupeur ;
j’étais le marié prenant le monde dans mes bras »

(Mary Oliver).

L’amour, au creuset de mille morts, devient or

« Celui pour qui le temps est comme l’éternité et l’éternité est comme le temps, celui-là est libéré de toute lutte » (Jacob Boehme, L’Aurore Naissante, 1612).

« Le temps, tout le consume. Et l’amour seul l’emploie » (Paul Claudel).

J’aime le positionnement spontané de ma maman (85 ans)
fin mars dernier, en plein confinement :
« Si mon heure est venue, je suis prête.
Et si mon heure n’est pas venue, t’inquiète ;
je préfère que tu viennes me rendre visite… ».
Nous avons respecté les gestes-barrières, sans pour autant laisser l’ambiance anxiogène de crise généralisée nous affecter et nous mettre elle-même en danger.
Veiller à éviter l’infection, oui, sans pour autant sacrifier notre affection
car elle aussi est importante pour notre santé !

La confiance ne nous donne pas d’échapper à la mort, elle nous donne de la recevoir, quand notre heure est venue, comme un ange qui nous conduit encore plus à l’intérieur de la maison…

La mort passe par le feu qui nous consume comme une bûche : montez, flammes + descendre des cendres

« La plupart des gens se protègent du feu. Ils finissent pourtant en lui » (Rumi, 1207-1273).

« Les querelles d’Amour : des copeaux pour faire repartir le Feu » (Anne Barratin, De vous à moi, 1892).

« Il arrive toujours un moment où l’autre chute de son piédestal et où la relation nous déplaît. Est-ce grave ? Pas nécessairement ! Nous pouvons profiter de cette étape pour quitter nos illusions et commencer à voir l’autre dans toute sa réalité et lui dévoiler aussi la nôtre. Cela peut transformer le lien et le rendre plus dense, plus profond. Mais, bien sûr, tout dépend de notre capacité à voir les choses en face, à faire preuve de lucidité. C’est souvent là que les échanges s’enveniment et que les rancœurs apparaissent. Pour certaines personnes, il n’est pas possible de passer le cap et la relation ne tient pas « l’épreuve du Feu ». Elle se désagrège parce que nous refusons d’y intégrer des éléments plus ambivalents, désagréables ou « négatifs ». […]

On pourrait souvent avoir la tentation de réduire l’Amour à une notion très pure, très lumineuse, uniquement synonyme de bienveillance, de joie et de sérénité. Ce serait lui enlever toute sa profondeur, sa puissance de Feu, sa dynamique évolutive. Ce serait tenter de soumettre un sujet explosif et volatile à une lecture rassurante, certes, mais incomplète. Ce serait risquer de perdre la véritable finalité de ce qui se joue pour chacun de nous lorsqu’il vient à notre rencontre. Car l’Amour est initiatique. À chaque fois, il nous met face à l’essentiel : ce à quoi nous aspirons au plus profond de notre âme et comment nous pouvons progresser, de plus en plus, vers la Lumière » (Juliette Allais).

L’indécence de la souffrance < > l’un des sens de l’amour

L’indécence de la souffrance qui conduit à la mort et

l’un des sens de l’amour qui sauve notre humanité.

Par son amour qui demeure au cœur de l’épreuve, qui traverse la souffrance de part en part, qui transfigure la mort et la colore d’un sens nouveau , le Christ a ouvert une porte que personne, jamais, ne pourra refermer.

C’est par cette petite porte qu’il nous attire encore,

pour vivre nos petites morts, et la grande aussi.

Ce noyau infracassable, divin, qui, au cœur de notre coeur, exhale l’Un

« Quelque chose en moi sait que rien ne peut m’arriver, que rien ne peut me détruire. C’est ce noyau infracassable en nous, ce noyau infracassable du divin en nous. Alors la peur cesse, et quand la peur cesse, il y a un drôle de morceau de moins d’horreur sur la terre !
Parce que la peur est la plus grande créatrice de réalités qui existe. Ce dont nous avons peur, nous le créons presque irrémédiablement. C’est quelque chose d’effarant. Vous avez dû le remarquer dans votre vie. La peur a le pouvoir d’engendrer images et réalités. Dans l’univers d’épouvante dans lequel nous vivons, tout tient par la peur.  Il faut y répondre en congédiant en nous la peur, en reprenant contact avec ce noyau infracassable qui nous habite » (Christiane Singer).