Joyeuse Pâque-rête

En me promenant, je laisse les paysages élargir ce qui me racrapote, absorber ce qui me pèse (chagrins, contrariétés, inquiétudes…). Je plonge dans la rivière qui me lave de toutes mes mondanités… J’aime me laisser réensauvager, au ras des pâquerettes et au large des horizons.

Joyeuses pâque-rettes.

Joyeuse Pâques que rien n’arrête !

Fougueuse chasse aux œufs dans les jardins (je la propose ce matin à 3 enfants pakistanais qui ne l’ont jamais vécue)… Je nous souhaite la joie et la simplicité de l’enfant, panier au poignet, émoustillé par chaque rencontre. 

Je vous embrasse avec des bulles qui ‘pop’ et moussent tout autour…

Quand tout a brûlé, reste le diamant incandescent…

« Ce qui est bouleversant, c’est que quand tout est détruit, il n’y a pas la mort et le vide comme on le croirait. Quand il n’y a plus rien, il n’y a plus que l’Amour. Tous les barrages craquent. C’est la noyade, l’immersion. L’amour n’est pas un sentiment. C’est la substance même de la création… Je croyais jusqu’alors que l’amour était reliance, qu’il nous reliait les uns aux autres. Mais cela va beaucoup plus loin ! Nous n’avons pas même à être reliés : nous sommes à l’intérieur les uns des autres. C’est cela le plus grand vertige… De l’autre côté du pire, t’attend l’Amour. Il n’y a en vérité rien à craindre. Oui, c’est la bonne nouvelle que je vous apporte » (Christiane Singer, Derniers fragments d’un long voyage).

Gagner/perdre la guerre : les apparences sont trompeuses

On peut militairement gagner la guerre, avec des tapis de bombes, en fait perdre la guerre, aller au tapis, tant on a créé de morts, de résistances et de haines.

On peut apparemment perdre la guerre, être cloué au sol, en fait gagner la Vie, tant on a créé d’amour et de conscience, germant tôt ou tard partout, tout autour de soi.

« You have heard it said… but I say to you… »

« You have heard that it was said to the elders… But I say to you… » is the refrain that provides the cadence of the verses in Matthew 5: 21 – 48.  The refrain is repeated six times, ending in the crescendo: the law says no to all forms of violence; from the nearest to the farthest away; to that which we inflict on others (murder, lies, concupiscence) to that which is inflicted on us (5th and 6th antitheses*).  Jesus fulfills the law; he holds it upright from its very root; he establishes it definitively in accordance with his own intention: « It has been said… but I, I give the fundamental meaning » in accordance with the justice of the Kingdom of Heaven (these are the 3 words that come up most in the ‘Sermon on the Mount’ (Matthew 5, 6 and 7). That we are all his daughters and sons, and therefore brothers and sisters, radically changes the relationship between human beings…

These six antitheses, these six roots, all maintain the same dynamic: « Not just murder…  but also the judgments that demonize the other, and the words of hate that lead to the judgments. Not just the finality of justice: an eye for eye – but also the importance of choosing other ways than violence; not only a just struggle, but also the means for a just peace; not only the truth about the warlike ideology of the neighbor who attacks us, but already regarding the enemy with a look filled with love.

Unfortunately, until the 20th century, theologians understood that the outstretched cheek was a call to not resist, to renounce one’s own rights, to bear injustice patiently.  Since this non-violence is socially and politically impracticable, it is logical and wise to limit its scope and to deny its obligatory and collective character. This continuing interpretation has thus set up the proposition: « Yes to evangelical non-violence, but not in certain cases », which is a dynamic very different from « not only… but already, and again… »; hence, the difficulties in reconciling such an altruistic, self-sacrificing love and a realistic political stance in the world.

Everything changes if the Gospel of turning the cheek invites us to resist with realism, lucidity and love! It can then inspire a responsible political response. This was the subject of my doctorate in theology. Laissez-faire is toxic and passivity is the breeding ground for the abuse of power by the unscrupulous, but resistance to oppression has an interest in inventing alternatives to violence…

* Antitheses is a term in biblical scholarship used to characterise the repeated refrain, “You have heard it said… but I say to you…”

Veillez !

« L’autre est là pour m’ouvrir les yeux. C’est son rôle. C’est le but des relations » (Byron Katie).

« Dieu qui est l’être absolument présent est pure présence. Présence infinie au fait d’être, il est ce qu’il est parce qu’il n’est jamais que ce qu’il est. Il est ce qu’il est parce qu’il est ouverture infinie au fait d’être » (Bertrand Vergely, Dieu veut des dieux, la vie divine, 2021).

Pâs que…

« Nous pestons contre les difficultés qui jonchent notre chemin ardu. Nous maudissons chaque pierre tranchante sous nos pieds, jusqu’au moment où enfin, au cours de notre maturation, nous baissons les yeux pour voir qu’il s’agit de diamants » (Charlotte Joko Beck).

L’aïkido

Mettre le jeu de pouvoir hors d’état de nuire par une initiative qui relève d’un autre registre, comme l’aïkido (do signifie voie, méthode en japonais) l’apprend en cas d’agression physique. Cet art martial ne rend pas coup pour coup (ce qui alimente le cycle des coups), il répond au coup de pied par un contre-pied qui fait perdre pied. Quel pied : désarçonner et désamorcer le coup, ça vaut le coup ! Ses techniques de self-défense et non de contre-attaque enseignent comment contrer l’agression, sans se faire piéger par l’agressivité et sans entrer dans la dynamique contagieuse de la violence.

Imaginons un homme qui s’élance, l’épaule en avant, pour enfoncer une porte. Surprise, la porte s’ouvre au moment même de l’impact et on « aide » l’homme déséquilibré à tomber par terre ! L’aïkido opère un renversement de situation : l’attaquant s’attend à rencontrer une résistance, il rencontre le vide et son déséquilibre est immédiatement amplifié jusqu’au tapis. C’est donc l’énergie de l’agresseur qui sert à réaliser le mouvement. Plus on est expérimenté, moins on dépense ses propres forces et plus on exploite intelligemment celles de l’autre, en connaissant les lois de la gravité, de l’inertie et des leviers. Les meilleurs aïkidoka (pratiquants de cet art) ne sont pas les plus forts physiquement : les grands maîtres ont largement dépassé l’âge de la retraite, et il ne fait pas bon s’attaquer à eux, même à plusieurs. C’est tout en rondeur que l’esquive et le déséquilibre conduit l’assaillant au tapis. L’aïkidoka ne se bat pas contre mais avec lui, jusqu’à ce qu’il renonce devant l’inutilité de sa force physique, qui ne rencontre que le vide.

Ce savoir-faire a été mis au point, il y a quelques siècles en Chine, par des moines itinérants qui cherchaient à concilier le double impératif de 1) ne pas ôter la vie humaine, 2) être à même de parer tous les coups possibles d’un agresseur, y compris d’un guerrier armé d’une épée (les moines employaient alors un bâton, le jō). La démarche cherche à concilier éthique et nécessité stratégique de ne pas laisser faire un agresseur. En s’en inspirant, il est possible d’apprendre comment court-circuiter les jeux de pouvoir que l’autre essaie d’exercer sur nous, sans nous-mêmes utiliser les mêmes jeux de pouvoir.

Extrait de mon livre Le nouveau paradigme de non-violence, p. 163.

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« Le plus grand plaisir que je retire de l’écriture ne tient pas au sujet mais à la musique interne des mots » (Truman Capote).

« Certains mots sont des balles de fusil, d’autres des notes de violon, qui ont le pouvoir de nous consoler et de sécher nos larmes. Certains sont capables de faire fondre la glace qui nous enserre le cœur et il est même possible de les dépêcher comme des cohortes de sauveteurs quand les jours sont contraires. Certains  peuvent sauver ou faire périr, quand la frontière est mince entre la vie et la mort » (Jón Kalman Stefánsson, Entre ciel et terre + D’ailleurs, les poissons n’ont pas de pieds).

S’en vient le soir
Qui pose sa capuche
Emplit l’ombre
Sur toute chose
Tombe le silence
Déjà se lovent
La bête sur son lit d’humus
L’oiseau dans son nid
Pour le repos nocturne
                             Milton, poète anglais aveugle

Psy – Spi

Nos jugements, reproches et réflexes de contrôle sur les autres sont d’abord l’amer salaire de notre difficulté à valoriser nos propres besoins, motivations profondes, valeurs et fondements. C’est en respectant ceux-ci, au moyen d’une circulation fluide des énergies entre notre tête, notre cœur et nos tripes, que nous parvenons à les faire respecter par les autres et que nous sommes délivrés de nos regards qui tuent, de nos paroles-poisons, de nos gestes malheureux. Ce chemin d’accès à nos ressources internes passe par la prise au sérieux des messages de nos corps, cœur et entrailles et il peut nous conduire au cœur de notre cœur, ce lieu calme, libre et bienveillant, siège de la sagesse, socle de la sérénité. Puis, en sens inverse, à partir de ce lieu-source duquel coule la source inépuisable et surabondante de l’Amour, nous pouvons apprendre à accueillir chaque part de notre vie qui surgit, en prenant soin de sa colère / fatigue / stress et de son besoin. Ce dialogue intérieur est à accomplir chaque fois qu’une part réactive sonne l’alerte en nous. Cette bienveillance avec nos propres parts nous fait découvrir l’écoute des parts fragiles chez l’autre, en amont de ses paroles-poisons et de ses gestes de mort. Plus nous avons appris comment connecter nos trésors intérieurs, plus nous sommes capables de nous connecter de l’intérieur au meilleur de l’autre, même lorsqu’il est dans la violence. 

« Seul l’homme qui a pénétré en ses propres profondeurs est capable de découvrir et de rencontrer la profondeur de l’autre » (P. Henri Le Saux, cité par Coste René, Théologie  de la paix, Cerf, 1997, p.  42).

Ce parfum qui vient de l’intérieur, trouvé à rosées

« Tard je T’ai aimée, Beauté ancienne et si nouvelle ; tard je T’ai aimée. Tu étais au-dedans de moi et moi j’étais dehors, et c’est là que je T’ai cherché.
Tu as répandu ton Parfum, je T’ai humé, et je soupire après Toi. Je T’ai goûté, j’ai faim et soif de Toi. Tu m’as touché, et je brûle du désir de ta Paix. Amen ! » (Augustin, Les Confessions, 10, 27).