Jean-Marie Muller et la doctrine sur la légitime défense

« Se regarder dans les yeux, se reconnaitre frères en humanité, transformer nos épées en socs de charrue pour creuser de larges sillons où semer avec enthousiasme des graines d’amour et d’espérance », s’exclama Armelle Bothorel, la fille du Général Jacques de Bollardière, aux obsèques de Jean-Marie Muller. Ils se sont ensemble engagés en faveur d’une défense civile non-violente réaliste. Par une large mobilisation concertée de résistance et de non-coopération au mal et à l’injustice, les ‘bataillons de la paix’ cherchent à offrir une alternative collective à l’armée traditionnelle. Leur efficacité nous apparaît d’autant plus que nous descendons loin sous l’écume des jours vers les couches profondes qui font tenir durablement nos sociétés en paix, là même où se jouent leurs l’âmes de fond, et que nous dé-couvrons les illusions de l’efficacité à court terme. Nous croyons que notre violence va être la dernière, qu’elle sera en mesure de mettre un point final à la violence, qu’elle réussira à faire taire la violence. À vrai dire, chercher à vaincre une violence par une autre violence, c’est offrir une victoire de plus à la violence. À vrai dire, la vraie puissance empêche tout conflit de déraper en conflit armé. Et il y a une infinité d’initiatives à prendre avant d’en venir à « la guerre qui se justifie en dernier recours » !

Jean-Marie Muller a été bien des fois vers le Magistère ecclésial pour que la doctrine traditionnelle sur la légitime défense intègre les expériences fécondes sur le terrain des luttes non-violentes et les enseignements à en tirer. Jean-Marie Muller a contribué à la préparation de « La non-violence, style d’une politique pour la paix », que le pape François a prononcé le 1er janvier 2017, lors de la journée internationale pour la paix…

Repose en paix, Jean-Marie. 

Vigne émondée pour prendre soin de l’essentiel

« Dans les vieilles vignes, on voit le parcours très sinueux de pieds qui se sont tordus dans tous les sens et qui ont fini par trouver leur voie vers la lumière.  On peut être tordu et quand même trouver petit à petit le chemin du ciel, de la lumière, de la joie de Dieu !

Le vigneron attache sa vigne pour la faire monter et lui donner la capacité de recevoir le plus de lumière possible. Jésus s’est présenté comme une vigne dont son père est le vigneron et nous les sarments. Pour que nous portions du bon fruit et beaucoup de fruit, notre Père du Ciel émonde tout ce qui dépasse pour nous faire aller à l’essentiel » (un moine témoignant de sa vie monastique dans le documentaire La Règle bénédictine & l’art de gouverner).

Le silence d’or et le silence de mort

« Et c’est parfois dans un regard, dans un sourire que sont cachés les mots qu’on n’a jamais su dire » (Yves Duteil).

« Dans le silence, il y a une oreille qui s’ouvre toute seule et puis qui ressent, c’est comme la musique. Il y a une telle paix, un tel bien-être physique de tous nos membres, de notre cœur, de notre tête. C’est délicieux » (Michael Lonsdale).

La cinquantaine

La cinquantaine ?

Période de vie descendante : on sent qu’on vieillit, on prend soin de ses vieux parents (ascendants qui descendent aussi) et les deuils se multiplient, des proches nous quittant les uns après les autres, avec un rythme d’enterrements croissant. 

ET en même temps période de vie ascendante : on prend soin de ses enfants qui deviennent des adultes (descendants qui montent en force) et qui virent leur cuti, on cherche comment se faire pardonner pour leurs blessures d’enfance, on fait le deuil des modes de fonctionnement parent-enfant surannés pour créer une relation nouvelle d’adulte à adulte, avant de devenir grands-parents ! 

Merci, cher Desmond Tutu, pour cette clé essentielle :
« Nous sommes capables d’aimer autrui – avec ses faiblesses –
lorsque nous cessons de nous détester – pour nos faiblesses ».

Le couple, laboratoire de croissance

« Le couple est notre laboratoire de croissance le plus intense, le plus complet, le plus complexe, potentiellement le plus dangereux comme le plus fertile. Il y a des moments aveugles. On a besoin d’outils, on a besoin de guides. Je trouve extraordinaire que notre pulsion de vie, notre instinct, notre intuition, notre désir nous poussent à essayer cette paire de vie, à la chercher, à la faire durer, à travailler pour la construire. Après, il nous reste à devenir compétents » (Florentine d’Aulnois-Wang).

Ramenée à son essentiel, la vie de couple est somme toute très simple :
1) Avant le mariage, éprouver l’unité, secouer le cocotier, en vérifiant bien qu’il n’y a pas erreur de casting.
2) Une fois mariés, nourrir l’accord des cœurs (l’accorité est un des plus beaux mots que j’apprécie dans le vocabulaire du créole mauricien), prendre soin de nos cœur-à-cœur et âme-à-âme, accueillir nos parts dans tous leurs manques et étroitesses, jusqu’à ce qu’elles se laissent combler par l’Amour et qu’elles s’ordonnent à la vie et à l’avis de nos âmes…

C’est dans la relation que nous sommes blessés et guéris

« C’est dans la relation que nous naissons. C’est dans la relation que nous sommes blessés. Et c’est dans la relation que nous pouvons être guéris » (Harville Hendrix, fondateur d’Imago).

Ne laisse pas tes ombres me réduire à mes ombres,
laisse la compassion nous ouvrir à moins sombre.
Appelle-moi par mon vrai nom qui est tien É-tienne,
marié à Christ-in pour que l’Amour advienne
dans nos vases d’argile, dans notre foyer fragile.
Laisse l’Amour ouvrir les portes peu agiles
de nos cœurs endurcis, obscurcis par Pénombre.
Que Christ, troisième Larron, balaie ce qui encombre.

S’épouser, le travail de toute une vie

Le 6 mai 1988, assis adossé au mur extérieur de la chapelle de l’abbaye de Chimay, j’ai entendu en moi, après des mois de prière intense : « Ne crains pas de prendre Christine pour épouse, elle va t’apprendre à aimer, vraiment et jusqu’au bout » et j’ai quitté le Séminaire qui me préparait à devenir prêtre. Douze jours plus tard, pour la première fois, de nos cœurs embrasés, nos lèvres se sont embrassées. Derrière nos corps enlacés, nos inconscients se sont électriquement choisis, avec la vocation de nous libérer de nos réflexes archaïques limitants, ceux que chacun.e a adopté, tout petit.e, pour être ajusté.e à l’amour imparfait de ses parents.

Pour cette mission de redevenir pleinement nous-même, Christine, je ne pouvais pas trouver meilleure partenaire et tu ne pouvais pas trouver meilleur partenaire. Ces vieilles casseroles enfilées à nos pattes, quel mémorable chemin déjà parcouru pour les lâcher… S’épouser, ce n’est pas moins qu’une longue nouvelle naissance, le travail de toute une vie… Vive l’amour !