« Nous entrons dans une ville comme on pénètre dans une musique : par la vibration, avant la mélodie. Il faut pouvoir explorer ses tissus, ses ourlets, ses laines, ses fibres, avant de prétendre s’en vêtir. On n’habite pas une ville avant d’en être habité, pas avant que l’odeur de ses murs ne vienne sous les ongles, pas avant que ses ombres, la nuit découpée, ne contiennent l’allongement de nos pas, nos instants de fuite, pas avant que son bord de route ou de mer ne soit le jeu de fermer les yeux, imprudemment, pour traverser une avenue, un coin de vague. La ville commence en nous comme une chanson, un peu sourde, l’aigu des coquillages sous les pieds, l’âpreté de l’asphalte. Mais ensuite, même si le couplet manque encore, la mer vient, au large puis plus près, sans aucun bruit de clé et nous submerge par cette vibration. Ainsi, pour dire vrai, sans connaître la langue d’ici sinon sur ma peau, il semblerait bien que déjà, je fredonne Ostende » (le poète belge Carl Norac, qui aime faire des photographies verbales, ici inspiré par la ville côtière d’Ostende, où il a choisi de vivre).
Dans Ceci tuera cela, Annie Le Brun tire la sonnette d’alarme : avec internet, le capital et la technologie ont fait une très puissante alliance, leur offrant une folle croissance exponentielle et réduisant tout ce qui circule à un objet de calculs algorithmiques. C’est ceux-ci qui décident de la plus ou moins bonne fortune des publications des uns et des autres, de la visibilité de chacun et donc de son succès public. Ils modèlent de plus en plus notre vie.
Persuadés d’être de plus en plus libres, nous sommes à vrai dire de plus en plus enfermés dans cette prison du virtuel. Les héros d’autrefois ont réussi à sortir du labyrinthe qui les retenait. À nous d’inventer l’anti-système qui débouche l’horizon et nous sorte de cette prison algorithmique…
Je nous souhaite un Avent curieux de cette Advenue non prévue d’une crèche, qui ouvre l’horizon par excellence, qui fait qu’il y a un Avant 😉 et un Après J-C !
« C’est en penchant l’oreille, tout près des mousses, qu’on entend chantonner les sources » (Marie Angel, Vivre avec les fleurs, 1980).
« Les grands écrivains sont des sourciers qui, à travers le sol infécond des apparences, percent jusqu’aux sources vives du réel » (Jules Payot, La faillite de l’enseignement, 1937).
Alors qu’au nord du Tropique du Cancer, nous nous enfonçons toujours plus dans la nuit froide de l’hiver, je nous souhaite de belles percées et de belles Avent-ures. Bonnes Avent-cées car Avent c’est / car-avan-sé-rails que je vous souhaite bons…
Je me suis tu et vous êtes venue À pas menus, comme toujours Vous faisiez semblant de n’être point là Et pourtant, c’est vous, je vous ai reconnue, Qui habitiez en moi Vous êtes venue comme un agneau Sans cri, sans écart et sans voix Comme ce je-ne-sais-quoi qui fait que c’est vous Ces pas sur le sable, sur le gravier Sur les dalles des salles voûtées Vous êtes venue comme une grande dame Quand je ne songeais plus à vous Quand ma mémoire, comme un aéroplane Planait sur d’autres pays Sur d’autres lits de fleuves asséchés De déserts où les chameaux vont ventre à terre J’avais même désespéré de vous revoir un jour jamais Pourtant, je reconnais ce pas sur le pas de ma porte Et ce je-ne-sais-quoi qui porte l’espérance si forte Et j’ai tiré mon grand chapeau Et dans mon cœur j’ai fait la révérence Et, vous ne l’avez pas vu, j’ai tressailli de bonheur Tout au fond, sans le savoir Sans savoir pour qui ni en quel honneur Vous êtes venue comme la bise qui passe sous la porte Et pénètre dans la maison de l’hiver Près du feu de bois, vous vous êtes réchauffée Et j’ai reconnu cette voix et cet éclair dans vos yeux Et ce je-ne-sais-quoi qui fait que c’est vous Le vent, avec la mer Avec tous les vents d’hiver Tous se sont tus Et vous êtes venue À pas menus, comme toujours Vous faisiez semblant de n’être point là Et pourtant, c’est vous, je vous ai reconnue, Qui habitiez en moi Julos Beaucarne
« Ô de quelle façon, avec quel gémissement nous nous sommes caressés, épaules et paupières. Et la nuit se terrait dans les chambres, comme un animal blessé que nous aurions transpercé de douleur », telle est l’entame de Poèmes à la nuit : 22 poèmes en allemand de Rainer Maria Rilke. Dans la préface de la traduction française, Marguerite Yourcenar est inspirée : « les poèmes traduits ne sont jamais que des colombes auxquelles on a coupé les ailes, des sirènes arrachées à leur élément natal, des exilés sur la rive étrangère qui ne peuvent que gémir qu’ils étaient mieux ailleurs ».
« Le secret de la politique est de donner des espérances à tout le monde » (Victor Cherbuliez, L’Espagne politique, 1874).
« Avec une politique droite, habile, ferme, persévérante, exempte de témérité et de morgue, mais exempte aussi de timidité et d’abaissement, avec une administration simple, vigilante, économe, judicieuse, la France peut encore reprendre en Europe le rang qu’elle n’y aurait jamais dû perdre » (Émile de Girardin, Les pensées et maximes, 1867, 3 ans avant que la France ne déclare la guerre à l’‘Allemagne’ et la perde moins de 2 mois après!).
« Le génie politique fait des institutions qui forment des citoyens et créent à leur tour de nouveaux génies politiques » (Pierre-Jules Stahl, Les pensées et réflexions diverses, 1841) :
Ce 24 novembre 2021 : accord trouvé pour un gouvernement de coalition en Allemagne, avec le SPD, les Verts et les libéraux. La fin de L’ère Merkel est confirmée.
« La paix est un combat courageux à mener avant que n’éclate la violence. Chaque société a intérêt à entrer en conflit pour faire tomber les injustices dont elle souffre. Pour dire adieu à la guerre, il ne suffit pas de dire bonjour à la paix, il s’agit de mener un combat contre les injustices, grâce à une mobilisation générale des moyens et des personnes. La paix véritable se gagne dans les conflits osés et gérés en amont de la violence » (Étienne Chomé, La méthode D-I-A-P-O-S pour faire tomber une injustice, parcours de formation en ce moment donné à Namur, à l’Institut International Lumen Vitae : cf. mon article Réussir une mobilisation collective est un art qui s’apprend, téléchargeable sur http://etiennechome.site/publications-de-fond/sociopolitique/).
« La sensation d’être heureux ou malheureux dépend rarement de notre état dans l’absolu, mais de notre perception de la situation, de notre capacité à nous satisfaire de ce que nous avons » (Dalaï Lama, TenzinGyatso).
« Pour trouver le bonheur, il faut risquer le malheur. Si vous voulez être heureux, il ne faut pas chercher à fuir le malheur à tout prix. Il faut plutôt chercher comment – et grâce à qui- l’on pourra le surmonter » (Boris Cyrulnik, Le bonheur, une nouvelle dictature ?).
« La vertu a un voile, le vice a un masque » (Victor Hugo, Post-Scriptum de ma vie, 1901).
« Va, chante ce qu’on ose écrire. Ris, et qu’on devine, ô chanson, derrière le masque du rire, le visage de la raison » (Victor Hugo, Chansons des rues et des bois, 1865).