Mobutu paya en monnaie de singe

À la fin de son règne, Mobutu Sese Seko faisait venir d’Ostende des avions remplis de ce nouveau billet de cinq millions de Zaïre, qu’il faisait descendre dans la population par toutes les personnes complices de son régime corrompu, notablement par la solde des militaires.  La population appelait ce nouveau billet « MOKOMBOSO », qui désigne en lingala un singe de la famille des chimpanzés. Un refus de masse a pu être organisé, notamment au départ à partir de petits groupes engagés dans la désobéissance civile non-violente. Ainsi, après s’être concertées, toutes les mamans d’un même marché adoptaient la même attitude, face aux militaires y venant acheter quelque chose avec ce nouveau billet de banque : « Mon fils, ce billet n’est pas valable, je n’en veux pas. Tiens, prends ces légumes sans payer cette fois, et reviens la prochaine fois avec d’autres moyens de paiement ». Touché dans sa conscience, le soldat revenait à la caserne et touchait à son tour la conscience de son supérieur, qui lui-même faisait remonter le refus de la population d’être payée en monnaie de singe…

Tendre l’autre joue, c’est aimer son prochain ET être lucide sur les injustices du système ET organiser une non-coopération collective mettant efficacement des bâtons dans les roues d’un point précis de ce système injuste.

Poèmes pour extraire les bleus sous ma peau et créer du lien

« J’ai été condamné à une peine de trente ans de prison, dont vingt ans de sûreté. Les dix premières années que j’ai passées derrière les barreaux ont été terribles. J’étais un enragé. Dans ce désert, j’ai trouvé l’écriture et la poésie. Elles m’ont servi de boussoles, m’embarquant pour de longs voyages, jetant des passerelles vers l’autre. Lire, écrire et créer en prison, c’est survivre. Je me suis découvert un cerveau à 52 ans. J’ai réussi à sortir de tout cela grâce aux mots, qui m’ont permis d’EXTRAIRE LES BLEUS SOUS MA PEAU. J’ai déclamé un poème que j’avais rédigé lorsque j’étais à l’isolement et cela m’a révélé. En 2016, j’ai reçu un premier prix de poésie à la Sorbonne. Quand j’ai vu mon nom à côté de ceux de grands auteurs, les Baudelaire, Verlaine, Rimbaud, je ne l’ai pas cru. Mais j’ai compris que j’avais une sensibilité qui touchait les gens. EN ÉCRIVANT DES POÈMES, JE CRÉAIS DU LIEN EN PRISON » (Khaled Miloudi). Vient de sortir son livre Les couleurs de l’ombre.

Rire tris-mal : qui est très aigu, qui a la caractéristique d’un grincement de dent, d’un trisme (mot construit par Arthur Rimbaud dans son poème Comédie en trois baisers).

Je baisai ses fines chevilles.
Elle eut un long rire tris-mal
Qui s’égrenait en claires trilles,
Une risure de cristal…
(Arthur Rimbaud, 1895).

Solide terre, solidaires

« Cultiver un potager, ce n’est pas seulement produire ses légumes. C’est apprendre à s’émerveiller du mystère de la vie » (Pierre Rabhi).

« Deux biens sont pour nous aussi précieux que l’eau ou la lumière pour les arbres : la solitude et les échanges » (Christian Bobin).

« Il nous faudra sans doute, pour changer jusqu’aux tréfonds de nos consciences, laisser nos arrogances et apprendre avec simplicité les gestes qui nous relient aux évidences » (Pierre Rabhi).

(3 fois rien) x 3 = rien de neuf

Parce qu’on m’a demandé de faire un discours, je vous signale tout de suite, Mesdames et Messieurs, que je vais parler pour ne rien dire.
Oh ! je sais ! vous pensez : « S’il n’a rien a dire, il ferait mieux de se taire ! » Ouais c’est trop facile !… Mais c’est trop facile ! Vous voudriez que je fasse comme ceux qui n’ont rien a dire et qui le gardent pour eux ? Et bien, non ! Mesdames et Messieurs. moi quand je n’ai rien a dire, je veux qu’on le sache ! Je veux en faire profiter les autres !Et si vous-mêmes, Mesdames et Messieurs, vous n’avez rien a dire, eh bien, on en parle, on en discute ! Je ne suis pas ennemi du colloque. Mais, me direz-vous, si on parle pour ne rien dire, de quoi allons nous parler? Eh bien, de rien ! De rien ! Car rien, ce n’est pas rien ! La preuve, c’est que l’on peut le soustraire : rien moins rien = moins que rien ! Alors si l’on peut trouver moins que rien, c’est que rien vaut déjà quelque chose ! On peut acheter quelque chose avec rien ! En le multipliant !
Une fois rien,… c’est rien !
Deux fois rien,… ce n’est pas beaucoup !
Mais trois fois rien,… pour trois fois rien, on peut déjà acheter quelque chose. Et pour pas cher !
Maintenant, si vous multipliez trois fois rien par trois fois rien : rien multiplié par rien = rien. Trois multiplié par trois = neuf. Ça fait : rien de neuf !

Bon, allez, parlons d’autres choses ! Parlons de la situation. Tenez ! parlons de la situation, sans préciser laquelle ! Si vous le permettez, je vais faire brièvement l’historique de la situation quelle qu’elle soit ! Il y a quelque mois, souvenez-vous, la situation, pour n’être pas pire que celle d’aujourd’hui, n’en était pas meilleur non plus ! Déjà, nous allions vers la catastrophe et nous le savions… Nous en étions conscient ! Car il ne faudrait pas croire que les responsables d’hier étaient plus ignorants de la situation que ne le sont ceux d’aujourd’hui ! D’ailleurs, ce sont les mêmes. Oui ! la catastrophe, nous le pensions, était pour demain ! C’est-à- dire qu’en fait, elle devrait être pour aujourd’hui ! Si mes calculs sont justes ! Or, que voyons nous aujourd’hui ? Qu’elle est toujours pour demain ! Alors, je vous pose la question, Mesdames et Messieurs : est-ce en remettant toujours au lendemain la catastrophe que nous pourrions faire le jour même que nous l’éviterons ? D’ailleurs, je vous signale (entre parenthèses) que si le gouvernement actuel n’est pas capable d’assurer la catastrophe, il est possible que l’opposition s’en empare !

Raymond Devos, Belge une fois !…, pas pour rien…

Chant intérieur

« Nous avons tous cette mémoire au fond de nous quand, au-delà de nos échecs, monte du fond de la nuit comme un chant à peine audible, l’assurance qu’au-delà des désastres de nos biographies, qu’au-delà même de la joie, de la peine, de la naissance et de la mort, il existe un espace que rien ne menace, que rien jamais n’a menacé et qui n’encourt aucun risque de destruction, un espace intact, celui de l’amour qui a fondé notre être » (Christiane Singer).

Patience, pas science…

« Les patiences accumulées, comme les rivières endiguées, produisent les plus grands débordements. […] Dieu ne demande pas de la patience à ceux qui en ont, mais bien à ceux qui n’en ont pas » (Anne Barratin).

« Il n’y a rien dont la patience ne vienne à bout quand elle est secondée de la persévérance » (Tite-Live). « Avec du temps et de la patience, une souris coupe un câble » (Alphonse Esquiros).

« Une longue patience enveloppe les choses et le sang, plus sûrement que du lierre » (Christian Bobin).

« La patience est la clef de la jouissance » (Abu Shakour).